23 août, 2010

AFFAIRE ICC SERVICES AU BENIN : Une démocratie qui s’assume

Le président béninois, le docteur Yayi Boni, est toujours dans le collimateur des députés de l’opposition. Le président de l’Assemblée nationale, Mathurin Nago, a, on se le rappelle, déclaré irrecevable pour vice de forme, la pétition des députés demandant l’assignation du docteur Yayi Boni, devant la Haute cour de justice pour forfaiture et parjure dans le scandale de l’affaire ICC services, qui a ruiné des milliers de Béninois. Mais les auteurs de cette pétition ne veulent pas lâcher prise. Ils sont revenus à la charge en déposant à l’Assemblée nationale cette même requête mais, cette fois, sous forme de proposition de résolution. Le texte a été transmis à la commission des lois qui doit l’étudier avant de le soumettre aux débats des députés.

La persistance des députés béninois à faire entendre le président Yayi Boni par la justice de son pays, dénote de la vitalité de la démocratie béninoise. Sous d’autres cieux, on en parlerait peu, sinon pas du tout. Le sujet serait qualifié de tabou et son évocation d’atteinte à la sûreté de l’Etat ou d’offense à chef d’Etat. Et toute velléité de l’opposition, dans ce sens, serait vite taxée d’acte déstabilisateur du régime. En somme, on userait de voies sournoises pour faire taire l’affaire, soit en intimidant les acteurs, soit, dans le meilleur des cas, en les corrompant. Mais le Bénin est un pays qui s’illustre bien en matière de démocratie.

L’opposition béninoise sait toujours rebondir sur les opportunités politiques. Toutes les failles du pouvoir en place ou tout acte indélicat d’un membre du régime, en particulier le chef de l’Etat, sont exploités à fond. Elle en fait ses choux gras. C’est pourquoi le sommeil du président Yayi est certainement fort troublé ces temps-ci. Malgré le ménage que celui-ci vient de faire, en traduisant quatre de ses ministres devant la justice dont celui de l’Intérieur, histoire de desserrer l’étau autour de lui, les députés n’entendent pas lui accorder le moindre répit. Ils n’ont pas fléchi, en témoigne le dépôt de leur proposition de résolution dont le but est d’obtenir l’accusation du président Yayi Boni.

Mais obtiendront-ils gain de cause ? Seuls le temps et l’évolution de leur action nous situeront. Pour l’instant, c’est le wait and see. La responsabilité, ne serait-ce que morale, du docteur Yayi Boni est engagée. D’ailleurs, la BCEAO n’avait-elle pas tiré la sonnette d’arme en avertissant les autorités béninoises sur l’illégalité des activités des structures comme ICC services et le danger que celle-ci représentait pour le peuple et l’économie du pays ? De toute apparence, le président béninois ne s’est pas montré méfiant, lui qui s’est du reste affiché en public avec les responsables d’ICC services. D’une certaine façon, il a donné sa caution morale pour que ICC services puisse exercer ses activités de collecte d’épargne en toute sécurité dans son pays. Pour autant, cette affaire fait-elle du dirigeant béninois, l’homme à abattre ?

Le docteur Yayi Boni, on se souvient, avait été élu en 2006, par la volonté du peuple béninois. Aujourd’hui, l’économiste chevronné sans armure solide, se retrouve face à une opposition organisée et hargneuse qui veut sa tête. Si l’action des députés aboutit, il aura le loisir de se défendre. S’il sort blanchi, il renforcera sa popularité. Dans le cas contraire, il fera les frais d’une opposition teigneuse. Dans tous les cas, cette affaire servira de leçon à certains chefs d’Etat africains qui pensent que les lois sont faites pour les plus faibles.

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