Évidemment, « bébé éprouvette » n’est qu’une simple figure de style, car les scientifiques sont toujours incapables de se passer de la mère. Lors de la fécondation in vitro, l’ovule est extrait du corps de la femme pour être ensuite artificiellementfécondé. L’embryon (ou les embryons) qui en résulte se développe dans un incubateur et est ensuite réimplanté dans l’utérus de la femme. De nombreux médecins chercheurs estiment que la fécondation in vitro est le plus grand progrès qu’a fait la médecine au 20e siècle. Ce n’est pas par hasard qu’un des inventeurs de cette méthode, Robert Edwards, a reçu un prix Nobel.
Aujourd’hui, cette technique de procréation est particulièrement populaire en Europe et aux États-Unis. Non seulement elle permet aux couples ne pouvant pas avoir d’enfant d’en concevoir un, mais elle permet également de planifier la grossesse : il est effectivement possible de faire provision d’embryons en les congelant et de les décongeler ensuite en temps voulu. Il est même possible de décider au préalable combien d’enfants doivent naître. Selon les scientifiques, la fécondation in vitro apporte une contribution considérable à la démographie du Vieux Continent. Cependant, cette technique de procréation fait face à de nombreux opposants, qui pointent ses aspects moraux et éthiques.
« La technique de fécondationin vitro en elle-même ne pose pas beaucoup de problèmes éthiques, car elle demande la participation des époux, des personnes ayant des difficultés à procréer. La fécondationin vitro permet donc de vaincre ce diagnostic. Toutefois, la technique peut comporter des aspects supplémentaires, comme la gestation pour autrui, le don de sperme et d’ovules, ainsi que le don d’embryons », explique Denis Ogorodnikov, médecin de la reproduction.
Ce sont ces aspects comme, par exemple, l’élimination d’embryons superflus ou leur réimplantation chez une mère porteuse, qui sont soumis à la critique des organismes sociaux, des scientifiques et même des gouvernements. Dans certains pays, par exemple, la gestation pour autrui est interdite. Les confessions religieuses les plus importantes sont assez méfiantes à l’égard de la fécondation in vitro. Le détracteur le plus féroce de cette technique de procréation est l’Église catholique, qui estime que l’embryon humain est déjà un individu et donc, par conséquent, son transfert peut être considéré comme la traite des êtres humains et l’élimination de l’embryon peut être vue comme un avortement. L’Église orthodoxe est farouchement opposée à la procréation médicalement assistée.
Le monde de la science n’est pas unanime non plus. Une partie des scientifiques appelle à se débarrasser de tous les préjugés et toutes les peurs. Selon Daria Khaltourina, démographe et anthropologue, s’il existe une possibilité de améliorer la vie et la santé des personnes, il faut absolument l’utiliser.
« Les tests d’embryons pour le dépistage de gènes qui augmentent le risque de contracter un cancer sont assez répandus. L’ADN permettra bientôt de déterminer l’aspect physique de la personne et de choisir un plus bel enfant. Le perfectionnement des tests génétiques et des recherches permettra de voir quels gènes sont liés à l’intellect. Il sera possible de choisir parmi toute une série d’embryons la meilleure variante », explique Daria Khaltourina.
C’est justement cela qui inquiète les opposants de la fécondation in vitrodans le monde scientifique : le retour de la sélection des êtres humains, la possibilité de mener des expériences avec les embryons humains et le clonage humain. D’autant plus que certaines technologies s’y sont vraiment rapprochées. Le gouvernement britannique travaille actuellement sur un projet de loi, qui autoriserait, lors de la fécondation in vitro, d’utiliser le matériel génétique d’une troisième personne. Le remplacement de ce que l’on appelle les mitochondries permettra d’éviter les maladies dangereuses. Toutefois, les générations futures vont hériter d’un ADN modifié. Cette technique soulève, elle aussi, des questions d’éthique. Quel statut juridique aura le donneur qui est, au fond, le troisième parent de l’enfant ?