22 avril, 2011

Burkina Faso • Attention ! Les habitants n'ont plus peur des militaires

En réponse à la grogne de la société, le président burkinabé s'est borné à remanier son gouvernement, en s'octroyant le poste de ministre de la Défense. Insuffisant, à l'heure où il faut prendre de réelles mesures sociales

Le siège du parti au pouvoir, le CDP, incendié le 16 avril 2011 à Ouagadougou.

Le siège du parti au pouvoir, le CDP, incendié le 16 avril 2011 à Ouagadougou.

Le calme est revenu au "pays des hommes intègres", mais combien de temps va-t-il durer ? Une question que tout esprit sensé doit se poser, au regard du remaniement gouvernemental effectué le 21 avril et qui est loin de répondre aux aspirations profondes des Burkinabés.

On ne bouleverse pas l'organisation d'un pouvoir qui gagne depuis 1987, c'est le message que le discret Blaise Compaoré a voulu envoyer à son peuple, en communiquant, le 21 avril, la composition de son nouveau gouvernement. Sur 29 ministres d'un cabinet qui se veut restreint, 15 sont de nouvelles têtes. Mais, sur le fond, les "serviteurs" du chef de l'exécutif au Burkina Faso sont toujours issus du même sérail : soit le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP, au pouvoir), soit des partis que l'on qualifierait de satellites dans le marigot politique burkinabé. Adieu l'ouverture, en avant le "compaoréisme".

Dans le cadre du bras de fer psychologique que les contestataires de son régime ont engagé contre lui depuis le début de l'année 2011, le militaire Compaoré a donc voulu leur dire : "J'ai été ébranlé dans mes certitudes, mais je tiens plus que jamais la route !" A l'image des patrons des meilleurs pouvoirs autistes en Afrique noire, le régime du CDP ne juge pas opportun d'opérer de profondes réformes à même d'apaiser la colère du peuple. C'est d'ailleurs pour mieux gérer d'éventuelles et nouvelles colères de la population que Blaise Compaoré s'est octroyé le maroquin de la Défense.

Que l'on ne s'y trompe pas ! Le célèbre médiateur Blaise n'a aucunement envie d'abandonner le navire Burkina dans les semaines ou mois qui vont venir. L'éruption du mécontentement général sur son sol natal exigeait que l'on y apporte des réponses plus innovantes que celles de ce 21 avril. Celles de ce jeudi saint sont à des années-lumière des attitudes de concession qu'a affichées ces dernières semaines le pouvoir d'Ouagadougou. Les Burkinabés n'ont nullement besoin en ce moment d'un chef de l'exécutif fort, mais plutôt d'un président qui soit à l'écoute de leurs cris du cœur.

L'ouverture progressive du régime burkinabé à la contestation voudrait que le nouveau gouvernement formé soit une étape cruciale vers une recherche consensuelle de solutions aux maux du pays. Une démarche qui commandait donc que de vrais opposants fassent leur entrée dans la nouvelle équipe gouvernementale. Ou encore que d'importantes décisions soient annoncées par la présidence pour amoindrir les disparités sociales frappantes au pays des hommes intègres.

Au nom de l'impérieuse préservation de la paix en Afrique de l'Ouest, croisons les doigts pour que Pâques 2011 inspire les nouveaux ministres de Blaise Compaoré। Une chose est évidente désormais dans ce pays : les habitants n'ont plus peur des armes des militaires.
courrierinternational.com

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