09 mars, 2011

Les insurgés libyens pressent l'Ouest de neutraliser l'aviation

Les insurgés libyens, confrontés à une contre-offensive des soldats de Mouammar Kadhafi, ont lancé mercredi un appel à la communauté internationale pour qu'elle impose une zone d'exclusion aérienne au-dessus de la Libye afin de prévenir un bain de sang.

Les rebelles, pratiquement désarmés face aux raids aériens gouvernementaux, ont été stoppés dans leur progression vers l'ouest du pays par les forces gouvernementales.

L'idée d'une zone d'exclusion est défendue de concert par la Grande-Bretagne et par la France mais plusieurs pays, dont la Chine et la Russie qui disposent d'un droit de veto au Conseil de sécurité de l'Onu, sont très réservés.

Les Etats-Unis ont souligné qu'une telle initiative, qui entraînerait nécessairement des attaques contre les défenses aériennes libyennes, devait bénéficier d'un large soutien international, ce dont conviennent Londres et Paris.

A Tripoli, Mouammar Kadhafi a affirmé que le peuple libyen courrait aux armes si une telle zone d'exclusion aérienne était instaurée, car cela prouverait selon lui que les Occidentaux veulent "prendre le contrôle de la Libye et lui voler son pétrole".

Sur le terrain, entre les villes de Ras Lanouf et de Bin Djaouad, où les adversaires se font face, les insurgés, qui subissent les pilonnages de l'aviation et de l'artillerie kadhafistes, crient leur frustration devant la passivité de la communauté internationale.

"Ils (les Occidentaux) avaient établi une zone d'exclusion aérienne en Irak. Kadhafi est-il leur chouchou pour qu'ils ne fassent rien, alors qu'ils avaient agi contre Saddam Hussein ?", se demande Nadji Saleh, volontaire dans les forces rebelles à Ras Lanouf.

Plus à l'est, à Benghazi, capitale de la Cyrénaïque et fief des insurgés, le Conseil national libyen (CNL) qui représente la rébellion dit être en contact avec des gouvernements étrangers en vue de l'établissement de cette zone d'exclusion.

"Nous concentrons nos initiatives diplomatiques sur ce sujet et nous ne ménageons pas nos efforts. Mais, comme d'habitude, elles (les puissances étrangères) traînent des pieds. On espère pourtant qu'elles finiront pas agir", dit à Reuters Iman Bougaigis, attachée de presse de la coalition du 17-Février.

"Pour moi, la priorité de Kadhafi est de reprendre la ville de Zaouïah, quel que soit le prix à payer, afin d'éviter un encerclement de Tripoli et ne pas être coupé de la frontière occidentale du pays comme il l'est déjà de la frontière orientale", ajoute-t-elle.

Les forces kadhafistes tentent depuis plusieurs jours de reprendre Zaouïah et les combats sont acharnés dans cette ville à 50 kilomètres à l'ouest de la capitale.

Si Zaouïah tombe aux mains des loyalistes, nul doute que le gouvernement enverra des renforts dans l'Est.

"C'est pourquoi nous menons des efforts diplomatiques et que nous agissons également sur le terrain. Il y a un tel déséquilibre des forces ! Nous voulons au moins cette zone d'exclusion, mais cela prend trop de temps. C'est insensé, des gens meurent par centaines chaque jour et personne ne bouge", ajoute Iman Bougaigis.

"Et les droits de l'homme, alors ? Je ne comprends pas cette façon de faire deux poids, deux mesures. Nous ne faisons que nous défendre et il y a urgence. Il (Kadhafi) est maintenant considéré comme un criminel international, il faut donc agir et des efforts exceptionnels sont nécessaires."

Mardi, Catherine Ashton, haute représentante de la diplomatie européenne, a reçu à Strasbourg deux émissaires de l'opposition libyenne, Mahmoud Djebril, qui dirige la cellule de crise du CNL, et Ali Essaoui, chargé des affaires internationales.

Hafiz Ghoga, porte-parole du CNL, a affirmé mardi à Benghazi ne pas douter de la chute de Kadhafi si une zone d'exclusion aérienne est mise en place.

"Nous pourrions alors parachever notre victoire. Et si des mesures étaient prises pour empêcher Kadhafi de recruter des mercenaires, alors ce ne serait qu'une question d'heures", a-t-il estimé.

"Obama, où es-tu ?", scandaient mardi les combattants rebelles sur la ligne de front.

Le chef du CNL, l'ancien ministre de la Justice Moustafa Abdeldjeïl, a toutefois dit qu'il n'était pas question que des troupes étrangères interviennent en territoire libyen.

"Nous sommes suffisamment nombreux et nous avons la détermination nécessaire pour libérer toute la Libye. Tout ce que nous demandons, ce sont des frappes aériennes pour nous aider à atteindre cet objectif le plus vite possible", a-t-il dit.

Guy Kerivel pour le service français

Par Reuters

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