24 mars, 2011

Guatemala: le couple présidentiel divorce pour mieux rester au pouvoir

GUATEMALA (AFP)

AFP

Portrait géant de Sandra Torres le 9 mars 2011 à Guatemala

Divorcer pour rester au pouvoir, c'est le choix contesté du couple présidentiel du Guatemala pour permettre à l'épouse du chef de l'Etat Alvaro Colom, Sandra Torres, de contourner l'interdiction de briguer en septembre la succession de son mari, lui-même limité à un mandat.

La Constitution du pays le plus peuplé d'Amérique central (environ 14 millions d'habitants) interdit non seulement la réélection du président mais aussi les candidatures de ses proches parents, dont sa femme.

En 1989, la Cour constitutionnelle avait invoqué ce motif pour interdire à l'épouse du présidence Vinicio Cerezo (1985-1990) de se présenter à la présidentielle.

Pour contourner l'obstacle à six mois de la présidentielle de septembre, M. Colom et Mme Torres ont donc présenté une demande en divorce par consentement mutuel le 11 mars, trois jours après que la Première dame eut annoncé son intention de briguer la succession de son époux.

"Notre amour avec le président est plus solide que jamais, mais notre amour pour le Guatemala et notre engagement en faveur des plus nécessiteux l'est encore plus", a expliqué dans une déclaration écrite Mme Torres, en charge des programmes sociaux dans ce pays où plus de la moitié de la population vit dans la pauvreté.

Cette décision "implique un sacrifice familial", a ajouté celle qui a cofondé avec M. Colom l'Union nationale pour l'espérance (UNE), parti social-démocrate victorieux aux élections de fin 2007.

"Nous faisons un sacrifice réel, cela va être un divorce réel, une séparation physique. Nous faisons passer la stabilité et la gouvernabilité du pays (avant notre situation personnelle)", a ajouté le chef de l'Etat sur la chaîne mexicaine Televisa en réaction aux critiques suscitées par ce choix.

Le principal candidat de l'opposition de droite, Otto Perez Molina, battu en 2007 par M. Colom, a ainsi qualifié de "fraude" cette demande de divorce.

Un citoyen, Elmer Erazo, a même déposé un recours devant la Cour suprême de justice mercredi. Il lui demande de déchoir le président de son immunité, car il s'est rendu coupable selon lui de mensonge matériel et idéologique, mais aussi de violation de la Constitution, rapporte le quotidien Prensa Libre.

M. Erazo espère ainsi freiner la procédure de divorce du couple, qui pourrait être prononcé dans les quinze jours qui viennent, soit un mois avant la date limite pour l'enregistrement des candidatures.

La polémique fait aussi rage sur les réseaux sociaux et Prensa Libre affirme que 98% des 22.000 personnes ayant participé à un sondage téléphonique volontaire sur le sujet se sont dits opposés à cette séparation pour raisons politiques.

"Il nous semble lamentable que la famille soit sacrifiée sur l'autel des ambitions politiques", a aussi déploré le patronat (Cacif).

Le forum oecuménique, rassemblant l'Eglise catholique et plusieurs chapelles évangéliques, a souligné qu'il respectait le divorce en tant que décision privée, mais regretté la décision présidentielle jugeant qu'elle "allait contre la famille".

La hiérarchie catholique s'est montrée cependant assez discrète étant donné que l'union entre M. Colom et Mme Torres, déjà mariés auparavant, a seulement fait l'objet d'une cérémonie civile, agrémentée de rites mayas.

L'éventuelle élection de Mme Torres, soutenue par le parti présidentiel et la Grande alliance nationale (Gana), au pouvoir de 2004 à 2008, ne serait pas une première en Amérique latine.

En 2007, Cristina Fernandez de Kirchner avait succédé à son mari Nestor Kirchner, décédé fin octobre, à la présidence de l'Argentine.

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