01 août, 2013

Pour les Palestiniens, le dialogue doit forcer Israël à dévoiler son jeu


. © Ahmad al-Rubaye Les pourparlers relancés à Washington doivent avant tout servir à tester les intentions d’Israël et le cas échéant lui faire porter la responsabilité d’un échec, selon experts et responsables palestiniens, qui leur assignent des objectifs modestes.
Les deux parties ont accepté mardi lors d’une première réunion de tenter de parvenir à un accord de paix dans les neuf mois, un objectif “à portée de vue” selon l’Union européenne, mais les Palestiniens se montrent beaucoup plus dubitatifs.
“A ce stade, il s’agit simplement de préparer les négociations”, a précisé mercredi le négociateur palestinien Yasser Abed Rabbo, à la radio officielle Voix de la Palestine, alors que la prochaine rencontre doit avoir lieu dans deux semaines, selon le secrétaire d‘État américain John Kerry.
Les négociations doivent porter sur toutes les questions liées au “statut final”: le droit au retour pour quelque 5 millions de réfugiés palestiniens, les frontières d’un futur État palestinien, le sort de Jérusalem, la question des colonies juives.
“Tout le monde sait que les activités de colonisation continuent, cela signifie que les négociations sont vouées à l‘échec et doivent cesser”, a prévenu M. Abed Rabbo. “Et les Américains en sont parfaitement conscients, ils devront donc décider s’ils veulent ou non de véritables négociations”.
Israël ne s’est pas engagé à geler la construction de colonies pendant les négociations —ce qui était une des demandes répétées des Palestiniens. En revanche, le gouvernement de Benjamin Netanyahu a accepté de libérer 104 prisonniers palestiniens arrêtés avant les accords d’Oslo en 1993.
“Ces discussions sont vouées a l‘échec, il n’y a aucune chance pour que ça mène à un accord”, affirme le politologue Abdelmajid Soueilem”, estimant que “le but de ces négociations est de faire plaisir aux Américains”.
“C’est le principe même des négociations qui est important pour les Américains afin de garder un rôle dans la région”, explique-t-il.
“L’annonce dimanche de la libération de 104 prisonniers palestiniens incarcérés avant les accords d’Oslo de 1993 ne suffira pas à amadouer l’opinion palestinienne ou la convaincre que ces négociations vont aboutir”, ajoute M. Soueilem.
Libérations sous pressions américaines
Un avis partagé par un autre expert, Hani Habib, pour qui “la rue palestinienne ne se sent pas concernée par la reprise des négociations”.
Selon lui, “ces prisonniers auraient dû être libérés après la signature des accords d’Oslo, il y a 20 ans, donc cela ne peut pas être considéré comme une faveur exceptionnelle en échange d’un retour aux négociations”.
De son côté, Samir Awad, professeur de science politique à l’Université de Bir Zeït, juge que la libération des prisonniers est “le fait des pressions américaines mais ce n’est pas suffisant pour assurer le succès des discussions”.
“Le peuple palestinien ne se sent pas partie prenante du processus de paix et a appris la reprise de négociations par la presse, pas par les dirigeants palestiniens”, remarque-t-il.
“L’opinion publique palestinienne ne pense pas que ces négociations sont dans l’intérêt du peuple palestinien mais uniquement le fruit des pressions américaines”, souligne juge Hani Habib.
Plus de deux tiers des Palestiniens (69%) jugent faibles ou nulles les chances de création dans les cinq ans d’un État palestinien à côté d’Israël, selon un sondage réalisé à la mi-juin.
En outre, si une majorité absolue de Palestiniens (53%) soutient une solution à deux États, 58% des Palestiniens considèrent qu’elle n’est plus viable.
Les experts jugent que la direction palestinienne doit surtout s’assurer qu’en cas d‘échec, la faute en retombe sur le gouvernement israélien.
“Israël n’est pas prêt à la paix”, affirme M. Soueilem, rappelant la très forte opposition à un État palestinien au sein même du gouvernement israélien, où le lobby de la colonisation a rarement été aussi puissant.
Le gouvernement d’“Israël ne pourra pas affronter le puissant lobby pro-colons”, prédit Samir Awad. “Mais il est important qu’il en arrive à ce point là”. Israël “devra alors assumer la responsabilité” de l‘échec des pourparlers”.

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