19 juillet, 2013

Paix sociale au Burkina : Faut-il craindre que les prophéties de Laurent Bado se réalisent ?

L’homme est connu pour son sens de l’humour, sa verve et ses vérités crues. Selon ses propres témoignages, il s’est engagé en politique par orgueil, déçu du rang mondial de son pays. Mais, depuis un certain temps, Laurent Bado – c’est de lui nous parlons- est tapi dans l’ombre, mais ses prédictions qui sonnaient comme un glas, tendent à prendre forme.
Le Pr Laurent BADO
Le Pr Laurent BADO
En août 2009, le Professeur Bado (parlant de l’Afrique) confiait à Abdouylaye Barry d’Africable : « A un moment, la jeunesse ne pourra pas tenir. Elle va se révolter. Mon fils, je vais vous dire une phrase. Peut-être qu’à ma mort, vous allez le constater : Sachez que César a été immolé en plein sénat, sans autres formalités. »
Et « l’intellectuel de haut niveau » d’ajouter que dans les 10 à 15 ans, il n’y aurait pas un seul jeune Africain qui ne chercherait pas à en découdre avec ce César. Deux ans plus tard, l’immolation par le feu d’un jeune tunisien déclenchait le printemps arabe, qui occasionnera la chute de trois présidents maghrébins.
Des mises en garde troublantes
Laurent Bado dit avoir prédit dans son œuvre Ni l’Est, ni l’Ouest, paru en 1981, la révolution burkinabè. Dans une interview que nous lui avons accordée en 2012, il rappelait sa phrase : « Les portes de l’enfer vont s’ouvrir sur le Burkina ». A en croire le Professeur, « Le wéréntété Sa sa sa ! » des armes lors des mutineries et les émeutes de la faim de 2008 n’étaient que « des lucarnes de l’enfer ».
Comme il le soulignait lors de l’émission « On est où là » de RFI, Laurent Bado se fonde sur un argumentaire capital : le fait que la moitié de la population n’avait pas quinze ans et que la pauvreté prenait une envergure inquiétante, dans un contexte où la gouvernance n’est pas des meilleures. « Si rien n’est fait fondamentalement, les jeunes ne laisseront pas une pierre sur une pierre », prévenait Pr Bado.
Bado à l’ombre, ses idées au soleil
Celui qui était au cœur d’une polémique (affaire des 30 millions offerts par le Président Compaoré) et qui avait perdu une partie de sa crédibilité, s’est décidé à s’offrir une retraite politique. A la marche de l’opposition le 29 juin dernier, son parti, le PAREN, était présent. Mais, l’on n’avait pas vu planer l’ombre de Bado.
Les tentatives de certains journalistes de lui arracher des mots ont été vaines. « Moi je suis fait pour mourir bientôt. Je me retire en douce », nous avait confié « l’homme des idées » au téléphone.
Dans sa « comédie politique », qui a grandement contribué à animer la campagne politique en 2005, Bado disait pourtant des vérités. Qu’une grande partie de l’opinion ne le croit pas, le professeur ne s’offusque point : « Ce n’est pas la majorité qui fait la vérité, mais c’est la vérité qui devrait faire la majorité ».  
Avec le fil des événements, il est  à craindre que les prophéties de Bado se réalisent. Il faudrait donc un dialogue inclusif, dénué de tout calcul égoïste, pour pouvoir éviter une sérieuse remise en cause de la paix sociale au Burkina. Chacun y gagnerait, et, en ce moment, le Professeur Bado pourrait couler ses vieux jours avec le soulagement d’avoir été entendu.

Michel KONKOBO

burkina24.com

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