10 août, 2011

Quand la Grande-Bretagne s'embrase

par Le Nouvel Observateur

On n'avait pas vu de telles scènes d'insurrection en Grande-Bretagne depuis les émeutes raciales des années 1980. Par notre correspondante à Londres, Marie-Hélène Martin

Une voiture en feu à Hackney, à Londres, le 8 août 2011 (Michael Bowles/REX/SIPA) Une voiture en feu à Hackney, à Londres, le 8 août 2011 (Michael Bowles/REX/SIPA)

"Quand on regarde une émeute, il est difficile de déterminer ceux qui combattent pour la justice et ceux qui se battent pour cet écran plasma haute définition dans la vitrine", a résumé l'écrivain et journaliste Tony Parsons. Mais les résultats sont les mêmes : magasins pillés, centres commerciaux saccagés, bâtiments en cendres, voitures calcinées dans une vingtaine de quartiers de Londres, puis à Birmingham, Liverpool, Bristol... Des scènes d'insurrection que l'on n'avait pas vues en Grande-Bretagne depuis les émeutes raciales du début des années 1980. Comme à l'époque, c'est une possible bavure policière qui a mis le feu aux poudres. Mark Duggan, 29 ans, trafiquant de drogue et caïd de l'un des gangs les plus connus de Tottenham, quartier très défavorisé du nord de Londres d'après la police, père aimant de quatre enfants selon son entourage, est mort lors d'une tentative d'arrestation jeudi dernier.

Une marche silencieuse a vite dégénéré, réveillant de vieilles blessures à Tottenham, où police et jeunes Noirs s'étaient violemment opposés, en 1985, dans la cité de Broadwater Farm. Puis les émeutes ont gagné des quartiers bien moins démunis. Bilan : un mort depuis mardi, 500 arrestations et une cinquantaine de blessés parmi les forces de l'ordre.

Le chômage élevé parmi les jeunes, les coupes drastiques dans les budgets sociaux expliqueraient en partie cet embrasement. Mais ce qui choque les Britanniques, c'est l'opportunisme de ces bandes d'adolescents - parfois d'une dizaine d'années - très mobiles, organisés, qui se sont tranquillement servis en écrans, vêtements et chaussures à la mode, sans être inquiétés. Et l'impuissance de la police, déstabilisée sans doute par la démission de son chef, sir Paul Stephenson, et de son numéro deux à la suite du scandale des écoutes dans les journaux de l'empire Murdoch, le mois dernier. Une capitale à feu et à sang à un an des jeux Olympiques : assez pour écourter les vacances du maire de Londres, Boris Johnson, de la ministre de l'Intérieur, Theresa May, et de David Cameron en personne.

De notre correspondante à Londres, Marie-Hélène Martin

Le Nouvel Observateur

Cet article est publié dans Le Nouvel Observateur daté du jeudi 11 août

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