10 août, 2011

L’étrange épopée des élus français à Tripoli

Une délégation d’anciens parlementaires s’est rendue discrètement dans la capitale libyenne la semaine dernière. L’ex-ministre Margie Sudre était du voyage.

Paris, hier. L’ancienne ministre Margie Sudre et l’ex-député européen Michel Scarbonchi s’élèvent contre l’intervention de la France en Libye.

Paris, hier. L’ancienne ministre Margie Sudre et l’ex-député européen Michel Scarbonchi s’élèvent contre l’intervention de la France en Libye. | (LP/MARC MENOU.)

Alors que les avions français sont toujours engagés dans le ciel libyen et que la communauté internationale continue à mettre la pression sur Kadhafi pour qu’il quitte le pouvoir, un bien curieux voyage s’est déroulé la semaine dernière à Tripoli. Quatre anciens parlementaires européens, dont une ex-ministre et deux autre Français et , ont été « invités » par une mystérieuse organisation non gouvernementale libyenne pour rencontrer des responsables du régime.

La chiraquienne Margie Sudre, secrétaire d’Etat chargée de la Francophonie dans le gouvernement Juppé de 1995 à 1997, faisait partie de la délégation.

Invités par une ONG sponsorisée par la fille de Kadhafi

Jointe hier au téléphone, elle assume sans l’ombre d’une hésitation ce déplacement. « Nous avons été contactés par une ONG libyenne pour mieux nous rendre compte de la situation dans le pays, raconte-t-elle. Nous sommes arrivés en avion à Djerba, en Tunisie, puis nous avons roulé quatre heures en direction de Tripoli. Là, nous avons rencontré des familles de civils bombardés par la coalition et constaté que des dépôts de nourriture avaient été touchés. Kadhafi était au courant de notre présence, mais nous ne l’avons pas vu, certainement pour des raisons de sécurité. » Margie Sudre, qui préside aujourd’hui un établissement officiel lié aux marchés publics sur l’île de la Réunion, s’est fait son opinion : « Je considère que la communauté internationale a outrepassé le mandat de l’ONU. Il ne s’agit plus de défendre les populations civiles mais de les attaquer. Cessons de nous mêler d’une guerre qui ne nous concerne pas. »

Sur place, la délégation, composée également de l’ex-député européen radical de gauche Michel Scarbonchi et de l’ancien maire de Montélimar (Drôme) et président du Parti radical valoisien, Thierry Cornillet, s’est entretenue avec deux ministres, dont Bechir Saleh, un proche de Kadhafi. Ainsi qu’avec le cheikh Ali, coordinateur des tribus, également lié au pouvoir.

L’ONG libyenne, qui a payé l’intégralité du déplacement, est discrètement sponsorisée par la fille de Kadhafi, Aïcha. Le voyage a duré quatre jours et les élus sont revenus à Paris, ce week-end, remontés contre la politique de la France. « Il faut être réaliste : 70% de la Libye sont contrôlés par Kadhafi. Après cinq mois, l’enlisement est total. Il faut négocier une sortie de crise pour éviter une partition du pays », lance Michel Scarbonchi. Qui ajoute : « Les conseils de Bernard-Henri Lévy mènent notre pays dans le mur. Les sondages montrent que les Français s’interrogent de plus en plus sur le bien-fondé de cette guerre. »

Le Quai d’Orsay n’a pas été mis au courant de cette escapade. Pas sûr que et apprécient cette tentative de diplomatie parallèle.

Le Parisien

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