06 juillet, 2011

Yémen: un mois sans Saleh, seule l'Arabie Saoudite peut débloquer la situation

© AFP Manifestation anti-gouvernementale, le 3 juillet 2011 à Sanaa, au Yémen
© AFP/Archives Mohammed Huwais

RYAD (AFP) - (AFP) - Un mois après l'hospitalisation à Ryad du président Ali Abdallah Saleh, le Yémen est plongé dans une impasse politique que seule l'Arabie saoudite peut débloquer, estiment des analystes.

"Tout le monde se tourne vers Ryad pour une solution (...). L'Arabie saoudite détient la carte du Yémen et elle s'est imposée comme le principal acteur de l'après-Saleh", affirme Farès al-Saqqaf, président du centre d'études pour l'avenir à Sanaa.

M. Saleh a été hospitalisé à Ryad le 4 juin, après avoir été blessé la veille dans un attentat dans la mosquée du palais présidentiel à Sanaa, alors que la contestation populaire de son régime, entamée en janvier, avait atteint son paroxysme.

Depuis, il n'a fait aucune apparition publique et son absence prolongée donne lieu à diverses spéculations sur son état de santé.

© AFP Le président yéménite Ali Abdallah Saleh, le 21 mai 2011 à Sanaa
© AFP/Archives Gamal Noman

"Les Américains et les Européens ont réussi à convaincre Ryad d'accueillir Saleh et d'empêcher son retour (...). Son départ de Sanaa était dû à des raisons politiques et non médicales", selon M. Saqqaf.

Le vice-président Abd Rabbo Mansour Hadi assure de facto l'intérim mais n'a pas été désigné officiellement par M. Saleh, au pouvoir depuis 33 ans, pour diriger le pays en son absence.

L'opposition réclame la mise en place d'un conseil intérimaire pour empêcher un retour du président.

"Nous faisons du sur-place et l'on peut dire que le pays tout entier se trouve à l'unité de soins intensifs", estime M. Saqqaf.

Avant l'attentat, M. Saleh avait irrité Ryad en refusant à plusieurs reprises de signer un accord de transition élaboré par le Conseil de coopération du Golfe (CCG) dont l'Arabie saoudite est le chef de file.

© AFP Le vice-président yéménite Abd Rabbo Mansour Hadi (C), lors d'une réunion avec des membres du parti au pouvoir, le 7 juin 2011 à Sanaa
© AFP/Archives

Le plan prévoit la formation par l'opposition d'un gouvernement de réconciliation et la démission un mois plus tard du président en échange de l'immunité pour lui-même et pour ses proches, puis une élection présidentielle dans les 60 jours.

Le chef de la diplomatie omanaise, Youssef Ben Alaoui Ben Abdallah, a assuré mardi à l'AFP que les pays du Golfe poursuivaient leurs "concertations intensives" avec les parties au Yémen pour trouver une solution.

Selon des sources politiques, l'une des solutions évoquées prévoirait une période intérimaire de deux ans, au cours de laquelle le vice-président détiendrait le pouvoir en attendant la tenue d'élections présidentielle et législatives.

Une telle issue permettrait de réduire la tension sur le terrain au Yémen, où le fils aîné et les proches du président Saleh continuent de contrôler une partie de l'armée et des organes de sécurité.

"Le pays est actuellement dans l'impasse politique et constitutionnelle la plus totale", a souligné le puissant général Ali Mohsen Al-Ahmar, rallié aux contestataires, dans une interview mardi à CNN.

"Des réactions négatives pourraient se produire et nous espérons que Dieu nous épargnera la guerre civile et d'autres problèmes", a-t-il ajouté.

Pour Mohammad Al Zalfa, ancien membre du conseil consultatif saoudien, il y a un risque de "dérapage de la situation au Yémen". "L'unité du Yémen est en péril. Le mouvement sudiste et Al-Qaïda dans le sud et les rebelles houthis dans le nord estiment que le chaos généralisé est dans leur intérêt", souligne-t-il.

Quand à l'analyste saoudien Anouar Eshki, il souligne "le poids stratégique du Yémen pour l'Arabie saoudite", qui ne veut pas d'un foyer d'instabilité à sa frontière sud et rappelle les liens étroits du royaume avec les chefs de tribus.

"Les pays du CCG déploient des efforts monstres pour que le Yémen ne soit pas morcelé, et sont déterminés à empêcher une guerre civile dans ce pays", assure-t-il.

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