28 juillet, 2011

Le président rwandais attendu à Paris en septembre sur fond de polémique avec Juppé

PARIS (© 2011 AFP) - La France a proposé à Paul Kagame d'effectuer début septembre une visite officielle à Paris, un déplacement à haute dimension symbolique mais délicat en raison d'un très vif contentieux entre le président rwandais et le chef de la diplomatie française Alain Juppé.Le président rwandais attendu à Paris en septembre sur fond de polémique avec Juppé

© AFP/Archives Steve Terrill. Le président rwandais Paul Kagame à Kigali, le 23 juin 2011

La date du lundi 12 septembre a été avancée mais elle n'est pas définitive et est toujours en attente d'une réponse officielle des Rwandais, selon plusieurs responsables français. "Ce serait dans la semaine du 12 septembre, c'est en cours de calage", a indiqué l'un d'entre eux sous couvert d'anonymat.

Cette visite est présentée comme la réponse à celle du président français Nicolas Sarkozy en février 2010 à Kigali.

Le 19 juillet, la ministre rwandaise des Affaires étrangères, Louise Mushikiwabo, s'est rendue à Paris pour la préparer. Elle s'était entretenue avec le ministre de la Coopération, Henri de Raincourt, mais pas avec Alain Juppé.

Le Quai d'Orsay a prétexté un agenda chargé du ministre pour expliquer cette non-rencontre, sans confirmer un refus de voir son homologue. "L'agenda du ministre ne le permet pas. C'est une question d'emploi du temps", s'est borné à dire le porte-parole du ministère, Bernard Valero.

Après une rupture de relations diplomatiques entre 2006 et 2009, liée à une enquête judiciaire en France sur les événements qui ont marqué le début du génocide rwandais de 1994, Paris et Kigali avaient scellé leur réconciliation avec la visite début 2010 au Rwanda du chef d'Etat français.

Nicolas Sarkozy avait alors reconnu "une forme d'aveuglement" de Paris pour n'avoir pas "vu la dimension génocidaire" du régime qu'il soutenait à l'époque.

L'apaisement des relations entre les deux Etats n'a pas gagné Alain Juppé, qui dirigeait déjà en 1994 le Quai d'Orsay au sein d'un autre gouvernement. Après sa prise de fonctions en mars, il a dit n'avoir aucune intention "ni de serrer la main" de Paul Kagame ni de se rendre au Rwanda, tant qu'y circulerait un rapport accusant la France de complicité avec les génocidaires.

Ce document de 2008 d'une commission d'enquête rwandaise accuse la France d'avoir "participé" au génocide sous couvert d'une opération militaro-humanitaire appelée Turquoise, menée en juin 1994. Le rapport vise nommément Alain Juppé et plusieurs personnalités françaises, de droite comme de gauche.

Entre avril et juin 1994, plus de 800.000 Rwandais, essentiellement issus de la minorité tutsi, ont été massacrés par des milices extrémistes hutu et les ex-Forces armées rwandaises, selon l'ONU.

Pour Paul Kagame, très critique à l'égard du ministre français, "la France ne se résume pas à Alain Juppé" et ce dernier ne doit pas être un obstacle à une visite à Paris. Il a fait savoir, via Louise Mushikiwabo, que ce déplacement "lui tenait personnellement à coeur, pour lui et pour son pays", relève-t-on au Quai d'Orsay.

"Il veut réactiver la coopération au-delà de la simple normalisation politique et souhaite voir aussi des acteurs de la vie économique française", ajoute-t-on.

Côté français, "on essaye de dépasser les problèmes de personnes au nom de la raison d'Etat" et on souhaite que "cette visite se déroule dans un cadre normalisé", fait-on valoir à Paris.

Un déplacement à l'étranger d'Alain Juppé pourrait opportunément faciliter la venue à Paris du président rwandais.

Ni confirmé ni démenti par le Quai d'Orsay, un long voyage du ministre français en Australie, Nouvelle-Zélande et Chine serait à l'étude pour septembre. Officiellement, il s'agirait de faire avancer des dossiers liés à la présidence française du G20. L'Assemblée générale annuelle de l'ONU débutant mi-septembre à New York, partir pour une semaine à l'autre bout du monde ne pourrait se produire qu'en début de mois.

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