12 juillet, 2011

Inutile d'espérer à Damas un remake de l'affaire libyenne. Et pas seulement pour des raisons de capacité militaire.

Le Point.fr -

Syrie, pourquoi Assad est si sûr de lui

Le président syrien Bachar el-Assad peut compter sur l'inaction de la communauté internationale. © Mathieu Rondelle / Maxppp

Partager


À ne pas manquer
Click here to find out more!

Rarement la France avait connu une aussi brutale agression, prétendument populaire, contre l'une de ses représentations diplomatiques. Depuis trois jours, une foule hargneuse de plusieurs centaines de personnes, armées d'objets destinés à casser, à brûler ou même à donner des coups, tente de pénétrer dans l'enceinte de l'ambassade de France à Damas.

À peu de distance de là, une autre manifestation, tout aussi spontanée, utilise des moyens identiques pour briser les fenêtres, brûler les voitures, arracher les drapeaux de l'ambassade des États-Unis en Syrie.

Hama en dissidence

Lundi, les gardes de l'ambassade de France ont même dû, par trois fois, tirer en l'air pour faire lâcher prise aux assaillants. La raison de cette marée de violence contre les deux chancelleries est la visite à Hama - ville entrée pratiquement en dissidence pacifique et encerclée par l'armée syrienne - des deux ambassadeurs français et américain.

À la fin de la semaine dernière, en se rendant sur ce lieu - théâtre d'affrontements sanglants entre des manifestants en faveur d'une libéralisation du régime et les forces répressives -, Éric Chevallier et Robert Ford avaient provoqué la colère du président syrien Bachar el-Assad et de ses sbires. Les mêmes qui depuis deux mois n'hésitent pas à faire tirer par l'armée et la police sur la foule.

L'ambassadeur américain a de l'humour

La vengeance n'a pas tardé : dimanche soir, une chaîne proche du pouvoir, Dina Télévision, avait incité le peuple à protester contre "les chiens" qui pactisent avec "les saboteurs". Lundi, ce sont des bus affrétés sans doute par le parti Baas qui ont déposé à 200 mètres des ambassades "le peuple en colère" qui répétait en litanie : "La Syrie qui a vu naître Bachar ne s'agenouillera jamais." Comme il a le sens de l'humour, Robert Ford, l'ambassadeur américain, a fait remarquer sur sa page Facebook que l'attitude des forces de l'ordre n'était décidément pas la même selon qu'il s'agissait de manifestants jetant des pierres sur les représentations diplomatiques ou d'autres brandissant des rameaux d'olivier comme dans la Bible pour réclamer la démocratie.

L'humour est sans doute, hélas, l'une des rares réponses que la France et les États-Unis peuvent faire à semblables outrages, qui ne sont évidemment que peu de choses si on les compare aux souffrances endurées par le peuple syrien depuis plusieurs mois. Car à part réagir oralement, mais fermement, et sermonner les ambassadeurs de Syrie dans nos pays respectifs contre cette violation flagrante des accords de Vienne qui régissent les relations diplomatiques, nous sommes cruellement démunis.

Bachar el-Assad, garant de la stabilité régionale

Comme l'a fait remarquer l'ancien ministre des Affaires étrangères Hubert Védrine, lundi, au micro d'Arlette Chabot sur Europe 1, il n'y a pas à propos de la Syrie de réponse de type libyen. D'abord, parce que personne ne s'engagerait dans une nouvelle aventure militaire, dont on mesure aujourd'hui encore, du côté de Tripoli, qu'elle est toujours plus facile à engager qu'à conclure. Ensuite, parce qu'il n'existe pas de moyen simple de "remplacer un régime devenu cruellement répressif par une démocratie aimable".

Enfin, parce que l'énorme différence avec l'affaire libyenne qui a miraculeusement permis à l'Occident de neutraliser les veto russe et chinois et d'imposer la zone d'exclusion aérienne permettant de protéger les populations civiles, c'est l'attitude de la Ligue arabe. Elle a fait facilement son deuil de Kadhafi.

Bachar el-Assad, parce qu'il est le garant d'un équilibre compliqué et fragile à l'intérieur de son pays entre sunnites et chiites, et encore plus à ses frontières, entre Iran, Égypte, monarchies du Golfe et même paradoxalement Israël, détient là une assurance-vie auprès de ses voisins arabes, qu'ils ne sont pas décidés - pour le moment - à résilier.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire