27 juillet, 2011

Bras de fer tendu dans le nord du Kosovo

.rfi.fr/Des membres des unités spéciales de la police kosovare (KPS), le 26 juillet 2011, à Mitrovica.
Des membres des unités spéciales de la police kosovare (KPS), le 26 juillet 2011, à Mitrovica.
Reuters/Hazir Reka
Par Jean-Arnault Dérens

Le nord du Kosovo est en ébullition depuis lundi soir 25 juillet 2011. Le gouvernement de Pristina a, en effet, essayé de prendre par la force le contrôle des deux postes frontaliers qui mènent vers la Serbie, à Bërnjak et à Jarinjë. La population, majoritairement serbe, de cette région, ne reconnaît toujours pas l’indépendance proclamée par le Kosovo en février 2008.

De notre correspondant dans les Balkans,

Le Kosovo a décidé la semaine dernière d’appliquer un embargo sur toutes les marchandises provenant de Serbie, et le gouvernement de Hashim Thaçi a envoyé les unités spéciales de la police (KPS) pour qu’elles prennent le contrôle de ces deux postes-frontières. Ces unités de la KPS sont parvenues sans encombre jusqu’au poste de Brnjak, près de la petite ville de Zubin Potok, mais elles ont été bloquées par des manifestants serbes avant d’atteindre celui de Jarinje.

Alertés par les mouvements de troupes, les habitants de la ville voisine de Leposavic ont érigé des barricades, bloquant la route. Un face-à-face très tendu s’est poursuivi toute la nuit de lundi à mardi 26 juillet 2011 et toute la journée de mardi, tandis que la KFOR, la mission de l’Otan au Kosovo, avait bloqué tous les accès à la zone. Mardi après-midi, des échanges de tirs se sont produits près du poste de Brnjak : un policier kosovar a été tué, et trois manifestants serbes blessés.

Après 24 heures d’extrême tension, la crise semblait pourtant, mardi soir, devoir se dénouer : toute la journée, les représentants de la KFOR et de la mission européenne avaient mené des négociations parallèles avec le gouvernement du Kosovo et les représentants de Belgrade. Un accord avait été annoncé, prévoyant le retrait des unités spéciales de la police du Kosovo et la levée des barricades serbes.

Des rumeurs, des informations impossibles à vérifier

Méfiants, plusieurs centaines de Serbes ont néanmoins monté la garde près des barricades toute la nuit de mardi à mercredi. Le retrait annoncé des forces du KPS semblait s’amorcer mercredi matin mais, vers 14 heures, les sirènes ont retenti dans les villes serbes du nord, appelant la population à se mobiliser.

En réalité, le Kosovo vit depuis lundi soir au rythme des rumeurs, des informations impossibles à vérifier et « d’accords » immédiatement démentis par les faits. Certains médias kosovars rapportaient ce mercredi que, loin du retrait annoncé du KPS, des renforts seraient en train d’être acheminés vers les postes-frontières.

Côté serbe, la radio KiM est la principale source d’information mais, en réalité, personne ne connaît la situation qui prévaut réellement sur les postes-frontières, désormais impossibles à rallier. Le pays n’avait pas connu une telle flambée de violence depuis 2008.

Pourtant, début juillet, les relations entre Belgrade et Pristina semblaient en voie de normalisation, après la signature de premiers accords, salués par l’Union européenne. Au Parlement du Kosovo, l’opposition avait vivement contesté ces accords, évoquant une « trahison ». C’est dans ce contexte que le gouvernement Thaçi a tenté ce coup de force, au risque de s’attirer les foudres de la communauté internationale.


Depuis l’indépendance du Kosovo, le contrôle de ces deux postes-frontières a été effectué par EULEX (Mission État de droit de l’UE au Kosovo). Mais tous les contrôles nécessaires n’ont pas été faits. Par ces deux points de passage entre la Serbie et le Kosovo sont passé des camions et des véhicules pleins de marchandises mais sans régler aucune taxe douanière. Le plus inquiétant est que des groupes criminels font du trafic de stupéfiants, d’êtres humains, de prostituées en passant par ces postes-frontières. Ils sont devenus une plaque tournante du crime organisé.

Nous avons donc voulu faire respecter la loi et instaurer un contrôle douanier dans ces deux postes frontières.

Belgrade observe pour sa part un embargo sur les produits kosovars depuis l'indépendance en 2008. La Serbie estime qu'elle ne peut pas importer des produits accompagnés de tampons douaniers kosovars, un symbole étatique.

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