22 avril, 2011

Syrie: la police tire sur les manifestants, près de 40 morts

AFP

Image de manifestants à Banias, dans le nord-est de la Syrie, prise par un photographe anonyme avec un téléphone portable, le 22 avril 2011

Près de 40 personnes ont été tuées par balles vendredi en Syrie lors de la dispersion par les forces de l'ordre d'imposantes manifestations contre le régime, l'une des journées les plus sanglantes depuis le début du mouvement de contestation, selon des témoins et des militants.

Des dizaines de personnes ont aussi été blessées lors de ces défilés qui ont rassemblé des dizaines de milliers de personnes à travers le pays, malgré l'annonce par le régime de la levée de l'état d'urgence. Un appel à manifester pour la journée du "Vendredi saint" avait été lancé via le réseau Facebook.

Il s'agit de l'une des plus importantes mobilisations depuis le début le 15 mars du mouvement de contestation sans précédent contre le régime du président Bachar el-Assad, arrivé au pouvoir en 2000 à la mort de son père Hafez el-Assad.

La Maison Blanche a appelé vendredi soir à la fin des violences en Syrie. "Nous déplorons l'usage de la violence, nous sommes très inquiets au sujet des informations parvenues de Syrie", a déclaré aux journalistes le porte-parole du président Barack Obama, Jay Carney.

"Nous surveillons de très près" la situation en Syrie, a ajouté M. Carney.

"Nous appelons le gouvernement syrien à cesser d'avoir recours à la violence, nous appelons toutes les parties à cesser d'avoir recours à la violence", a encore dit M. Carney.

En Syrie, l'opposition juge insuffisantes les mesures annoncées par M. Assad qui a aussi approuvé jeudi l'abolition des tribunaux d'exception. Amnesty International a estimé que cette journée serait "un test de la sincérité du gouvernement concernant l'application des réformes".

Malgré la levée de l'état d'urgence qui interdisait les manifestations, la police a tiré sur la foule dans plusieurs villes faisant près de 40 morts et des dizaines de blessés, ont indiqué des témoins et des militants des droits de l'Homme joints au téléphone par l'AFP.

AFP

Image de manifestants à Banias, dans le nord-est de la Syrie, prise par un photographe anonyme avec un téléphone portable, le 22 avril 2011

Selon la version officielle syrienne, les forces de l'ordre sont intervenues avec des gaz lacrymogène et des canons à eau seulement pour empêcher des heurts "entre certains manifestants et citoyens", et "pour protéger des biens privés". "Il y a eu des blessés", a indiqué l'agence Sana.

C'est dans la localité d'Ezreh, dans la province de Deraa, que le bilan a été le plus lourd: 14 morts, selon les témoins et militants. Une 15e personne a péri à Hirak, également dans la province de Deraa où est née la contestation.

Neuf autres ont été tuées à Douma, à 15 km au nord de Damas, alors que dans des localités de la banlieue proche de Damas, deux personnes ont péri à Barzeh, une à Harasta et trois à Maadamiya, selon eux.

Deux autres personnes sont mortes à Hama, 210 km au nord de Damas, deux à Lattaquié, 350 km au nord-ouest de Damas, et quatre à Homs (centre).

AFP/Archives

Le président syrien Bachar al-Assad à la télévision d'Etat, le 16 avril 2011

Quelque 10.000 contestataires se sont rassemblés dans le centre de Deraa à la sortie des mosquées, appelant à la dissolution des services de renseignement. Certaines pancartes appelaient à l'"annulation de l'article 8" de la Constitution, qui consacre l'hégémonie du parti Baas, selon un militant.

Six personnes ont été tuées à Douma, à 15 km au nord de Damas, où des milliers de personnes ont défilé, ont ajouté les mêmes sources.

A Qamishli (nord-est), au moins 5.000 manifestants arabes, kurdes et chrétiens ont défilé pour protester contre la corruption, alors qu'à Banias (nord-ouest), quelque 10.000 personnes ont appelé à la chute du régime à la vue "de traces de torture" sur le corps de détenus libérés, selon des témoins.

A Zabadani, à 50 km au nord-ouest de Damas, environ 3.000 manifestants ont scandé: "le peuple veut la chute du régime", "dégage", "ni le Hezbollah, ni l'Iran, c'est nous qui allons libérer le Golan" occupé par Israël, selon des témoins. Le Hezbollah libanais et l'Iran sont des alliés du régime syrien.

Près de 200 personnes ont même manifesté dans le centre de Damas aux cris "liberté, liberté", "le peuple syrien est un", avant d'être dispersées, a précisé un militant.

La levée de l'état d'urgence, qui limitait de façon drastique les libertés en Syrie depuis 1963, était l'une des principales revendications des opposants au début de la contestation. Mais ils réclament désormais aussi des réformes démocratiques, la libération des détenus politiques et la fin de la mainmise des services de sécurité sur la société.

Au moins 228 personnes ont été tuées depuis le 15 mars en Syrie, avait indiqué Amnesty International avant la journée de vendredi.

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