02 avril, 2011

Libye: les avions de l'Otan tuent par erreur 9 rebelles et 4 civils

PRES DE BREGA (Libye) (AFP)

AFP

Des rebelles libyens près du corps d'un combattant des forces du régime de Kadhafi, à Brega, le 2 avril 2011

L'ambulance gît sur le côté, comme un gros animal carbonisé. Les cinq voitures civiles sont détruites. Sur la route de Bréga, dans l'Est de la Libye, l'aviation de l'Otan a commis vendredi soir une terrible erreur de tir.

Treize personnes, neuf combattants rebelles et quatre civils ont été tués: les insurgés étaient à bord de voitures, les quatre civils à bord d'une ambulance.

Il s'agit, selon des sources hospitalières dans la ville voisine d'Ajdabiya, de trois étudiants en médecine de Benghazi, volontaires pour soigner les victimes des combats, et du chauffeur de l'ambulance.

Selon le déroulement des faits, reconstitué par l'AFP sur place et à Ajdabiya, tout serait parti d'un tir de joie, vers le ciel, d'un insurgé libyen.

"L'un de nos hommes a tiré en l'air, après un raid de l'Otan contre les positions des hommes de Kadhafi. Il était heureux, ils avançaient sur Bréga", explique Issa Khamis, chargé à Ajdabiya de la coordination avec les autorités de la rébellion, à Benghazi.

"Les avions ont vu des balles traçantes, ils ont certainement cru qu'on leur tirait dessus alors ils ont détruit le convoi", ajoute-t-il.

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Des rebelles libyens près du corps d'un combattant des forces du régime de Kadhafi, à Brega, le 2 avril 2011

Samedi matin, la chaussée de l'unique route côtière reliant Benghazi à Brega, puis à Syrte, sur laquelle se concentrent les combats depuis deux semaines, était à l'emplacement du raid encore jonchée de terre, de roches, de débris de métal qui ont provoqué des crevaisons. De la fumée s'échappe encore de deux carcasses de voitures.

"C'est un raid de l'aviation. J'en suis sûr à 100%" assure à l'AFP, dans l'hôpital d'Ajdabiya, le Dr Mohamad Ahmad. "C'était une erreur. Ces voitures étaient trop près des combats, tout près des lignes de Kadhafi. Et un soldat ou un civil mal entraîné a fait la bêtise de tirer en l'air".

A Ajdabiya, acquise à la cause de l'insurrection libyenne, pas une voix ne s'élève pour blâmer l'Otan et ses avions, sans lesquels les rebelles n'ont aucune chance face à l'armée de Tripoli.

Pas même celle de Hussein Khadit, qui affirme être arrivé quelques minutes après la frappe aérienne et avoir vu les véhicules en flammes, sans pouvoir approcher à cause du brasier.

"C'est une erreur des révolutionnaires. Pas des Américains. Ils ne pouvaient pas savoir. Ils ont cru qu'on leur tirait dessus, ils ont répliqué. C'est triste mais c'est normal", dit-il.

Pas même non plus celle de parents et d'amis de l'une des victimes. Selon la tradition, ils sont venus distribuer à Ajdabiya des photos du "martyr". Sur le cliché Aboubakar Jemaa, 21 ans, étudiant en troisième année de médecine à Benghazi, en paraît cinq de moins.

L'un des deux autres étudiants en médecine tués s'appelle Ahmad mais c'était samedi matin tout ce que l'on savait de lui: seule cette mention était encore lisible sur ses papiers d'identité brûlés.

Cinq km après l'emplacement du tir sur le convoi civil, une position entière de l'armée de Tripoli a effectivement été détruite vendredi soir par les chasseurs-bombardiers de l'Otan.

Une équipe de journalistes de l'AFP a compté samedi matin, dispersés dans les dunes, sept cadavres de soldats libyens, dont certains atrocement déchiquetés. Près de l'amas de ferraille noirci qui fût l'un de leurs pick-ups, le cratère d'une bombe: cinq mètres de diamètre, deux de profondeur.

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