19 avril, 2011

Climat/USA: la Cour suprême pas convaincue de son rôle de gendarme

WASHINGTON - Les juges de la Cour suprême se sont montrés peu convaincus par l'idée qu'ils puissent réguler, au nom de la "nuisance publique", les émissions de gaz à effet de serre des compagnies énergétiques dans la lutte contre le réchauffement climatique.

Depuis 2004 huit Etats, ainsi que la ville de New York, ont demandé, et obtenu en appel, à cinq grands producteurs d'électricité aux Etats-Unis de limiter leurs rejets de gaz à effets de serre parce que ceux-ci participent au réchauffement de la planète.

Le jugement de la plus haute juridiction des Etats-Unis est attendu d'ici fin juin.

Ces producteurs d'électricité, dont American Electric Power Company et Tennessee Valley Authority, sont accusés par les Etats de rejeter à eux seuls 10% du total des émissions américaines.

Lors de l'audience mardi, les juges sont apparus dubitatifs quant à leur capacité à légiférer en la matière. Estimant que l'affaire relève de "la séparation des pouvoirs", ils ont rappelé que l'Agence américaine de l'environnement (EPA) voire le Congrès étaient les mieux placés pour imposer des limites de pollution.

"L'injonction que vous cherchez à obtenir, à savoir l'imposition de limites d'émissions, me semble être du ressort de l'EPA", a contesté la juge progressiste Ruth Ginsburg. "C'est comme demander à un juge d'être un super EPA", a-t-elle poursuivi, notant que l'agence gouvernementale travaillait à un projet de régulation des émissions.

"Nous ne savons pas ce que le Congrès va faire", a pour sa part objecté le juge conservateur Samuel Alito. De fait, depuis près de deux ans, les Républicains du Congrès ont tout fait pour empêcher l'agence fédérale de mettre en place des régulations des émissions de gaz à effet de serre.

"Il se peut qu'il y ait conflit avec ce que l'agence (EPA) fera", a renchéri Mme Ginsburg. "Il se peut aussi que cela n'arrive jamais...", a ironisé l'avocate des Etats, Barbara Underwood.

Au delà, l'avocate des huit Etats (Connecticut, New York, Californie, Iowa, New Jersey, Rhode Island, Vermont et Wisconsin) a mis en avant "l'autorité fondamentale des Etats à protéger leurs terres et leurs citoyens" au nom de la "nuisance publique".

"Comment un simple juge peut-il décider de ce qui est raisonnable et économiquement viable ?", lorsqu'il s'agit de contraindre une centrale au charbon à faire appel à de nouvelles technologies pour rendre sa combustion propre, s'est encore inquiété le juge Alito.

Les juges se sont également interrogés sur la portée de telles régulations. Faut-il limiter les poursuites "aux pollueurs les plus importants ou s'appliquent-elles à n'importe qui ?", a demandé la juge nommée par Barack Obama, Elena Kagan.

"Dans ce dossier, les sociétés produisent ensemble 650 millions de tonnes par an" d'émissions polluantes, a argumenté Mme Underwood.

"C'est parce que vous les considérez tous en bloc. Supposons que vous preniez en compte" les flatulences de "toutes les vaches du pays ensemble, est-ce que vous engageriez des poursuites contre tous les fermiers (...), vache par vache ?", a demandé le juge ultra-conservateur Antonin Scalia, ne réprimant pas cette comparaison scatologique.

(©AFP /

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