07 mars, 2011

TENNIS • Une nouvelle surface pour Roland Garros ?

Organisé dans l'Ouest de Paris depuis des décennies, le tournoi de Roland Garros pourrait quitter la capitale en 2016. Trois sites se disputent cette prestigieuse compétition: Gonesse, Marne-la-Vallée et Versailles. La Fédération française de tennis se réunit le 13 février pour décider de l'avenir de ce tournoi.

The New York Times

L'extension se situera dans un triangle allant de l'actuel site de Roland Garros au boulevard Murat. Il sera accompagné par un jardin d'un hectare et demi, ouvert au public toute l'année. © Bwcreation.com

L'extension se situera dans un triangle allant de l'actuel site de Roland Garros au boulevard Murat. Il sera accompagné par un jardin d'un hectare et demi, ouvert au public toute l'année. © Bwcreation.com

Ce qui au départ était hautement improbable – un déménagement du tournoi de Roland Garros en banlieue – et perçu comme un subterfuge de la Fédération à peine déguisé, apparaît aujourd’hui comme un choix parfaitement légitime, voire, pour le maire de Paris Bertrand Delanoë, une véritable menace. L’avenir de Roland Garros se jouera le 13 février puisque les 180 délégués de la Fédération française de tennis voteront pour savoir si le tournoi continuera à avoir lieu à son emplacement actuel Porte d'Auteuil ou, si à partir de 2016, il sera transféré sur l’un des trois autres sites : Gonesse, Marne-la-Vallée ou Versailles.

Une majorité des deux tiers est requise. Sans majorité dimanche 13 février, un nouveau vote aura lieu dans trois mois à la majorité absolue. "Il est vrai qu’au moment où nous avons commencé à débattre au sein de la Fédération d’un éventuel déménagement, cette idée n’a pas rencontré un grand succès, a déclaré Gilbert Ysern, directeur général de la FFT, lors d’une conférence de presse. Mais les mentalités ont évolué. Et après avoir planché sur le sujet et étudié tous les avantages qu’il y aurait à construire un nouveau site, les gens ont commencé à envisager les choses différemment. Et aujourd’hui, c’est loin d’être inconcevable." Pour l'instant, Paris et le stade Roland Garros restent encore grands favoris : on connaît l’attachement des Français à la tradition et à la centralisation, sans parler du coût prohibitif de la construction d’un nouveau site.

Etabli dans l'enceinte d'une ancienne caserne, le site de Versailles — avec son château accessible à pied — est particulièrement chic. Gonesse ou Marne-la-Vallée, en revanche, permettraient à la Fédération de posséder son propre site au lieu de le louer. Ces trois solutions accroîtraient considérablement la superficie d'un site qui est le plus petit des quatre tournois du Grand Chelem et dont les allées sont parfois aussi bondées qu'un wagon de métro aux heures de pointe.

Pourtant, Paris sera toujours Paris. Cela peut passer pour une banalité, mais pas pour ceux qui viennent de loin assister au tournoi le plus prestigieux d'Europe continentale, admirer le paysage [urbain] et profiter de la culture des cafés. Mais le tennis du Grand Chelem ne cultive guère la nostalgie. L'US Open a quitté le West Side Tennis Club, dans le quartier Forest Hills [de l'arrondissement du Queens], pour un site plus grand, avec moins de charme, à Flushing Meadows, en 1978. L'Open d'Australie s'est déroulé dans d'autres villes avant de se fixer à Melbourne, au Kooyong Lawn Tennis Club, pour ensuite refaire ses valises et adopter un nouveau site, au centre-ville de Melbourne, en 1988. Même Wimbledon — oui, Wimbledon — a déménagé de Worple Road pour prendre ses nouveaux quartiers en 1922, et a été gagné récemment par une fièvre de modernisation, qui est passée par la destruction de divers courts de démonstration, notamment le spacieux court n° 1.

L'Open de France pourrait donc bien déménager. S’il reste, il est envisagé de construire un toit rétractable au-dessus du court central Philippe Chatrier, et la municipalité de Paris a approuvé une proposition qui permettrait au tournoi d’étendre sa superficie, passant des dix hectares actuels à environ quinze, et qui autoriserait la construction d’un petit court dans les jardins botaniques voisins, les Serres d’Auteuil.
L’affaire n’a pas manqué de susciter une opposition dans une ville où les projets architecturaux grandioses — y compris la toute dernière idée de Frank Gehry — se heurtent immanquablement à des difficultés. Si Roland Garros date de 1928, les jardins, eux, remontent à 1761, et plus de 35 000 personnes ont signé une pétition en ligne pour défendre le site contre les intrus du tennis.

"Nous craignons qu'une telle construction ne dénature et ne défigure ce lieu conçu dans les moindres détails par leur créateur, Jean-Camille Formigé, homme d'art et de science", écrivait la chanteuse Françoise Hardy dans un commentaire paru dans Le Monde, appelant la municipalité à laisser partir le tournoi. Delanoë et son entourage soutiennent que le projet respecte les jardins, que les seules serres menacées de démolition n’ont aucune valeur historique et que toutes les plantes exotiques seront protégées. "Pas une feuille ne sera abîmée", a assuré le maire de Paris au Figaro. Peut-être pas. Mais on ne voit pas de tels débats dans les banlieues où l’on ne manque pas de place. Du moins pas encore.

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