29 mars, 2011

Libye: la coalition internationale, bras armé de la rébellion

WASHINGTON (AFP)

AFP

Un Mirage de l'armée française décolle de la base aérienne de Solenzara, en Corse, le 26 mars 2011

La multiplication des frappes contre les forces libyennes a fait de la coalition internationale le bras armé de l'opposition en permettant à des rebelles désorganisés de poursuivre leur contre-offensive vers l'ouest pour renverser Mouammar Kadhafi.

Pourtant, le président américain Barack Obama s'est voulu clair dans son discours lundi soir: si le but est de se débarrasser du colonel Kadhafi, il n'est pas question de le déposer par les armes car ce "serait une erreur".

"Si nous essayons de renverser Kadhafi par la force, la coalition va voler en éclats", a-t-il expliqué, sans évoquer les moyens "non militaires" pour aboutir à un changement de régime.

La mission dévolue par le Conseil de sécurité prévoit l'usage de "tous les moyens nécessaires", à l'exception de l'occupation du pays, pour "protéger les populations civiles" et non pas pour changer le régime.

Sur le terrain, les forces de la coalition "ne parlent pas" aux rebelles, assure donc le Pentagone.

"Nous ne sommes pas en soutien direct de l'opposition, cela ne fait pas partie de notre mandat et nous ne nous coordonnons pas avec l'opposition", a répété lundi un haut responsable américain, le vice-amiral Bill Gortney.

AFP/ECPAD/Archives

Des Mirage 2000 français en mission en Libye le 24 mars 2011

Mais les frappes aériennes contre les forces pro-Kadhafi ouvrent de fait la route aux rebelles.

"C'est sûr, les avions français vont venir s'occuper d'eux dans la nuit", a confié lundi à un journaliste de l'AFP Amir Mansour, un combattant rebelle qui se repliait lundi sur la route de Syrte après avoir être tombé dans une embuscade.

"Il est clair qu'ils (les rebelles, ndlr) bénéficient des actions que nous menons mais nous ne nous coordonnons pas avec eux", a reconnu le vice-amiral Gortney, selon qui l'opposition n'est ni "bien organisée" ni "très solide".

Les frappes représentent désormais l'essentiel des sorties aériennes de la coalition, avec 107 missions de frappes sur 178 sorties lundi.

La plupart des radars, défenses anti-aériennes et centres de commandement libyens étant détruits, les avions de la coalition s'en prennent désormais aux troupes au sol de Kadhafi.

L'engagement militaire semble même connaître une escalade avec l'entrée en scène ce week-end d'avions A-10 et AC-130 "Spooky" américains, des appareils conçus pour l'appui aérien rapproché à des troupes au sol, notamment contre les chars et les blindés.

"L'objectif de facto de se débarrasser de Kadhafi est assez bien compris et sans doute assez bien accepté, c'est juste très compliqué de le crier sur les toits", a jugé Thomas Donnelly, expert à l'Institut pour l'entreprise américaine (AEI), un centre de réflexion conservateur qui a organisé lundi une table ronde sur la Libye.

"L'idée qu'on puisse arrêter le massacre des civils libyens et puis partir, laissant Kadhafi au pouvoir n'a pas de sens", a abondé Kenneth Pollack, expert à l'Institut Brookings, un autre centre de réflexion.

Avec ses antécédents de sponsor du terrorisme et le programme nucléaire qu'il a tenté de développer, il serait dangereux de le laisser au pouvoir, a-t-il estimé.

Pour Paul Wolfowitz, un des néo-conservateurs qui a "vendu" l'invasion de l'Irak en 2003, il n'y a d'autre choix que de soutenir l'opposition, malgré les inconnues: "nous ne savons peut-être pas qui est l'opposition, nous savons qui est Kadhafi. Sauf qu'on ne sait même pas qui il est vraiment parce qu'on n'a jamais eu affaire à Kadhafi dans l'état dans lequel il se trouvera s'il réussit à conserver le contrôle sur la moitié de la Libye".

"Il n'aura de cesse de chercher à se venger et sera bien plus dangereux qu'il ne l'a été jamais été", a prédit l'ancien sous-secrétaire à la Défense de George W. Bush.

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