19 janvier, 2011

Tunis: nouvelle manifestation contre un gouvernement fragilisé

TUNIS (AFP)

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Manifestation à Tunis contre le parti de l'ancien président Ben Ali, le RCD, le 19 janvier 2011

Des milliers de manifestants ont exigé mercredi en Tunisie le retrait du gouvernement de transition, formé lundi, des figures de l'ancien régime et la dissolution du parti du président déchu Zine El Abidine Ben Ali.

Cette nouvelle démonstration de colère intervient avant même la première réunion du cabinet d'union nationale, dont quatre membres, appartenant à l'opposition, se sont déjà dissociés mardi.

Dans le même temps, l'Arabie saoudite où l'ancien dictateur a trouvé refuge lui a interdit toute activité politique liée à la situation dans son pays, dont il a été chassé le 14 janvier après 23 ans de règne sans partage.

La Suisse a également décidé de bloquer d'éventuels fonds appartenant au président déchu et à son entourage. Et l'agence officielle tunisienne TAP a annoncé qu'une enquête judiciaire a été ouverte contre Ben Ali et sa famille pour des transactions financières "illégales".

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Le président de transition Fouad Mebazaa (G) et le Premier ministre Mohamed Ghannouchi, le 18 janvier 2011 à Tunis

A Tunis, des unités anti émeutes de la police ont étroitement encadré une manifestation de quelque 2.000 personnes dans le centre ville, mais ne sont pas intervenus pour les disperser, selon des journalistes de l'AFP.

"Nous voulons un nouveau Parlement, une nouvelle constitution et nouvelle République", ont scandé les manifestants, qui s'en sont pris au Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), le parti du président déchu Ben Ali. "RCD out", proclamait une banderole.

"Peuple! révolte-toi contre les partisans de Ben Ali!", ont crié les manifestants.

"Nous avons pour ordre de ne pas charger la foule ni de tirer des bombes lacrymogènes", a indiqué à l'AFP un colonel de la police, Najmeddine Zegoulli.

Auparavant la télévision avait annoncé que le gouvernement avait décidé d'alléger le couvre-feu de deux heures, en raison d'une "amélioration de la sécurité", alors que Tunis a renoué avec les embouteillages et que de nombreux habitants ont repris le chemin du travail.

Il a en revanche maintenu les autres mesures de l'état d'urgence, telles que l'interdiction de rassemblement sur la voie publique de plus de trois personnes et l'autorisation aux forces de l'ordre de tirer sur les personnes prenant la fuite aux contrôles.

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Des unités anti-émeutes lors d'une manifestation à Tunis le 19 janvier 2011

Des manifestations identiques ont rassemblé des milliers de personnes notamment à Sidi Bouzid, Regueb, Kasserine, et Thala.

Ces localité, dans le centre du pays, ont été au coeur de la "Révolution du jasmin" qui en un mois d'émeutes populaires a balayé le régime autocratique de Ben Ali. Ce soulèvement a fait, selon le gouvernement, 78 tués et 94 blessés.

La colère des manifestants vise les vestiges de l'ancien régime, dont des personnalités importantes ont conservé des postes clefs au sein du gouvernement de transition formé lundi par le Premier ministre Mohammed Ghannouchi.

Face à ce qui est perçu comme le maintien de la mainmise sur les affaires du pays de dirigeants désavoués par le soulèvement populaire, quatre ministres, dont trois représentants de la puissante centrale syndicale UGTT, ont annoncé qu'ils se retiraient.

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Plan de Tunis situant les endroits où siège le pouvoir national tunisien (présidence, Parlement, ministères...)

Ces premières défections interviennent alors que le cabinet doit se réunir à une date non précisée mais qui pourrait être jeudi, pour prendre des mesures très attendues, comme l'amnistie pour tous les opposants politiques.

L'autre sujet sensible à l'ordre du jour sera l'application du principe de la séparation de l'Etat avec l'ancien parti au pouvoir, le RCD.

Le cabinet doit aussi préparer des élections législatives et présidentielle qui pourraient se tenir dans les six mois.

Dans ce contexte, le ministre saoudien des Affaires étrangères Saoud Al-Fayçal a souligné que le président déchu Ben Ali avait été accueilli dans le royaume par respect des traditions arabes d'hospitalité, mais qu'il ne pourrait y exercer aucune activité contre son pays.

Et la présidente de la Confédération helvétique Micheline Calmy-Rey a annoncé que "la Suisse a décidé de bloquer avec effet immédiat d'éventuels fonds en Suisse de l'ex-président tunisien Ben Ali et son entourage".

Un sommet de la Ligue Arabe s'est ouvert en Egypte, et devait se pencher sur les suites de la révolte populaire qui a secoué la Tunisie depuis la mi-décembre mais le ministre tunisien des Affaires étrangères Kamel Morjane a quitté la ville de Charm el-Cheikh sans y prendre part.

Le secrétaire général de la Ligue arabe Amr Moussa a lancé un appel pressant à répondre aux difficultés économiques et sociales pour conjurer les risques de contagion de la situation tunisienne dans la région.

En Algérie, en Egypte, et en Mauritanie, des tentatives d'immolation par le feu se sont multipliées, suivant le précédent du suicide d'un jeune Tunisien le 17 décembre dans le centre du pays, qui avait marqué le début des émeutes.

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