06 janvier, 2011

Côte d'Ivoire: Ouattara prône une opération commando pour "enlever" Gbagbo

ABIDJAN (AFP)

AFP

Le président proclamé ivoirien Laurent Gbagbo le 3 janvier 2011 à Abidjan

Alassane Ouattara, reconnu président ivoirien par la communauté internationale, a prôné jeudi, si nécessaire, une action commando "non violente" de l'Afrique de l'Ouest pour chasser Laurent Gbagbo de la présidence, où il se voit s'installer en janvier.

Les Etats-Unis ont renforcé leur pression sur le président sortant en annonçant le gel de ses avoirs dans le pays, ainsi que ceux de sa femme Simone et de trois de ses proches.

"S'il s'entête, il appartient à la Cédéao (Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest) de prendre des mesures nécessaires et ces mesures peuvent inclure la force légitime", a dit M. Ouattara lors d'une conférence de presse à son QG du Golf hôtel d'Abidjan, soumis à un blocus des forces fidèles au régime.

Après une nouvelle médiation infructueuse mardi, l'organisation ouest-africaine a brandi de nouveau la menace d'une opération militaire pour obtenir le départ de M. Gbagbo et résoudre la grave crise née de l'élection du 28 novembre.

Une intervention armée est en préparation mais cette entreprise à hauts risques reste pour la Cédéao un "dernier recours". Elle aurait des "conséquences incalculables", ont alerté les évêques catholiques ivoiriens, appelant au "dialogue".

AFP

Simone Gbagbo, épouse du président proclamé ivoirien Laurent Gbagbo, le 4 décembre 2010 à Abidjan

"La force légitime ne veut pas dire une force contre les Ivoiriens. C'est une force pour enlever Laurent Gbagbo et cela a été fait ailleurs, en Afrique comme en Amérique latine", a cependant expliqué M. Ouattara. "Il y a des opérations spéciales non violentes qui permettent tout simplement de prendre la personne indésirable et de l'emmener ailleurs".

"Laurent Gbagbo partira avant la fin du mois de janvier", a-t-il encore assuré. "J'ai toute une série de mesures en cours qui vont faire qu'il va tomber comme un fruit, pas mûr, mais comme un fruit pourri", a-t-il lancé, sans en dire davantage.

Retranché dans son QG alors que son adversaire est installé au palais présidentiel et contrôle l'armée et l'administration, M. Ouattara multiplie ces derniers jours les prises de parole après avoir été longtemps quasi-muet durant la crise.

Et s'il dit préférer une "solution pacifique", il use d'un style agressif qu'il laissait jusque-là à son Premier ministre Guillaume Soro, chef de l'ex-rébellion des Forces nouvelles (FN).

Fustigeant un Gbagbo "hors-la-loi", il a dit le rendre "responsable de tous (les) crimes" et "assassinats" qui ont marqué ces semaines de tourmente.

Fin décembre, le gouvernement Gbagbo, dont les Forces de défense et de sécurité (FDS) ont été mises en cause de façon répétée par l'ONU, avait fait état de 53 morts depuis le scrutin, dont 14 parmi les FDS.

Mais pour les Nations unies le bilan depuis mi-décembre atteint 210 morts, avec 31 décès dans la semaine écoulée. Des affrontements entre communautés guéré et malinké ont ainsi fait cette semaine 14 tués à Duékoué, dans la région ouest habituée aux troubles interethniques.

Dans ce contexte de violences, l'impasse politique reste complète, illustrée par le discours offensif de M. Ouattara comme par le maintien du blocus du Golf hôtel.

Un blocus que M. Gbagbo ne compte pas lever tant que les éléments FN qui protègent son rival n'ont pas quitté les lieux, a prévenu son ministre des Affaires étrangères, Alcide Djédjé.

Ce proche de M. Gbagbo a repoussé l'idée d'un exil du président sortant aux Etats-Unis et écarté toute offre d'"amnistie" en échange de son départ, évoquée par la médiation africaine.

Alors que M. Ouattara a assuré que les Nations unies lui avaient confirmé l'envoi "dans les prochains jours" d'"une mission d'investigation" de la Cour pénale internationale (CPI), le bureau du procureur de la CPI s'est borné à dire qu'une mission viendrait "au moment opportun".

L'impact de près d'un mois et demi de crise politique se fait aussi sentir au plan économique. Les importations du Niger en provenance de Côte d'Ivoire ont chuté de 70% depuis novembre, passant de 1.040 tonnes à seulement 310 tonnes en décembre, selon une source officielle nigérienne.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire