26 octobre, 2010

PRÉSIDENTIELLE 2012 Le rêve américain du Parti socialiste

Par Charlotte Chaffanjon

Le rêve américain du Parti socialiste

Martine Aubry a demandé à Arnaud Montebourg de plancher sur le processus de désignation du candidat PS à la présidentielle 2012 © Sipa

"It's a revolution !" Un cri du coeur comme une inestimable récompense. Lorsque Howard Dean, président du Parti démocrate américain pendant la présidentielle 2008, s'adresse en ces termes à Arnaud Montebourg et Olivier Ferrand, début octobre, les socialistes français savent qu'ils sont sur la bonne voie. Le secrétaire national à la rénovation du PS et le président du think tank Terra Nova passent trois jours à Washington pour parler "primaires" avec une vingtaine de dirigeants du Parti démocrate.

C'est qu'Arnaud Montebourg, chargé par la patronne du PS Martine Aubry de mettre en oeuvre ce processus très ouvert de désignation du candidat à la présidentielle 2012, compte s'inspirer largement du modèle américain. Du rêve américain, à entendre Olivier Ferrand qui raconte ainsi les primaires qui ont consacré Barack Obama : "Vingt-cinq millions de votants, onze millions de personnes inscrites sur le site de campagne d'Obama, trois millions de personnes qui ont fait des dons pour sa campagne, deux millions de personnes mobilisées sur le terrain..." Autant dire qu'à Washington, leurs interlocuteurs sont jugés maîtres.

"Une dynamique électorale, politique et personnelle" (Ferrand)

De ces entretiens, Montebourg et Ferrand ont tiré un rapport qu'ils remettront à leur première secrétaire dans les prochains jours. L'adaptation du processus dans l'Hexagone est délicat, question de mentalité, question de moyens aussi, alors que le financement de la vie politique est ici beaucoup plus restreint. "Les primaires françaises seront plus artisanales, les candidats auront de quoi se payer le train pour faire le tour des départements", souligne Olivier Ferrand. De toute façon, l'important semble ailleurs. "Les primaires vont constituer une dynamique électorale, politique et personnelle", pense-t-il.

Dans un premier temps, la dynamique électorale doit venir de la mobilisation du peuple de gauche. Moyennant une contribution financière, un euro minimum, tout le monde peut participer. Arnaud Montebourg, grandiloquent, affirme qu'il voit déjà "4 millions de personnes" se rendre aux urnes le jour J, en octobre 2011... Olivier Ferrand avance plus raisonnablement : "Au-delà d'un million de votants, l'opération sera un succès." Il s'agirait, en effet, d'une petite victoire, alors que le PS compte aujourd'hui quelque 200.000 militants, seuls jusqu'ici à pouvoir s'exprimer lors des votes internes. Cela permettrait également d'engranger des fonds en vue de la campagne finale.

Une vaste base de données

Toujours en s'inspirant du modèle américain, le PS profiterait de la primaire pour se lancer dans un grand chantier : constituer une vaste base de données. Le parti veut coupler ses listes électorales avec ses fichiers de militants. Innovant. Et légal. Aux bénévoles, ensuite, de faire du porte-à-porte pour convaincre les uns et les autres d'aller voter ! Et de collecter les adresses mails afin de mobiliser dans la dernière ligne droite.

La dynamique politique doit, elle, venir d'une campagne plus longue que celle de 2006 qui opposa, trois semaines durant, Dominique Strauss-Kahn, Ségolène Royal et Laurent Fabius. Le dépôt des candidatures devrait avoir lieu dès le mois de juin 2011, top départ de deux mois de campagne officieuse pour les candidats qui se jetteront dans le grand bain d'une campagne officielle en septembre et en octobre. "Les primaires doivent servir à peaufiner le discours du futur candidat, à travailler son positionnement, à approfondir le travail de fond. C'est une répétition", résume Ferrand.

Le scénario Hillary Clinton

Pour ce qui est de la pratique, Ferrand et Montebourg relèvent que le Parti démocrate organise plusieurs sortes de présentation des candidats, comme "des débats vivants avec la presse, pas des trucs complètement aseptisés", lâchent le premier et des "forums". Chacun est alors seul sur scène. Une manière de lancer la dynamique personnelle. Le vainqueur de la primaire est consacré lors d'une "grande convention de lancement de campagne", que les partisans français du modèle veulent à tout prix importer.

Alors que le PS a toujours eu du mal avec la personnalisation du pouvoir, Olivier Ferrand n'hésite pas à dire qu'il faut tenir en novembre 2011 une "convention préparée, structurée" : "Il faut scénariser le ralliement au vainqueur।" Et de se rappeler 2006, l'adoubement de Ségolène Royal à la Mutualité (Paris), "dans une ambiance lugubre, devant 300 militants, avec un micro qui ne marchait pas et des perdants muets au premier rang"। Si les perdants ne devront cette fois pas être muets, ils devront être disciplinés, à l'image d'une Hillary Clinton en 2008। Les socialistes français pourront-ils, là aussi, adapter le modèle américain ? lepoint.fr

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