11 juin, 2010

Violences ethniques meurtrières au Kirghizistan


Ces heurts, qui ont débuté dans la nuit et se sont étendus dans la journée au quartier ouzbek de la cité, sont les plus graves depuis la destitution du président Kourmanbek Bakiev en avril.

Des habitations et des maisons de thé ont été incendiées et des coups de feu résonnent à intervalles réguliers dans le quartier de Tcheriomouchki à majorité ouzbèke.

"Il y a des heurts entres Kirghizes et Ouzbeks. De nombreuses personnes ont dressé des barricades. J'ai vu une foule de gens mettre le feu à deux grands restaurants et à un supermarché", a raconté une journaliste de Reuters.

Ville de 200.000 habitants, Och est située dans une région particulièrement instable d'Asie centrale, aux confins de l'Ouzbékistan et du Tadjikistan.

Le gouvernement intérimaire y a décrété l'état d'urgence ainsi que dans plusieurs districts ruraux de la région qui était autrefois l'un des fiefs de Bakiev. Des troupes et des blindés ont été envoyés sur place.

"Malheureusement, il s'agit d'un conflit entre deux ethnies. Nous devons (mobiliser) des forces et des moyens pour arrêter et calmer ces gens, c'est ce que nous sommes en train de faire", a déclaré Roza Otounbaïeva, présidente intérimaire, s'exprimant devant la presse à Bichkek.

"Nous cherchons à bloquer pratiquement toutes les routes menant à Och. C'est ce que nos forces de sécurité tentent de faire", a-t-elle ajouté.

UNE AFFAIRE INTERNE

Roza Otounbaïeva a précisé que des "gens à l'air suspect" se dirigeaient vers Och, venant "de toutes les directions". Un policier affecté à un point de contrôle hors de la ville a dit à Reuters qu'environ 300 voitures étaient massées à l'entrée de la ville.

Selon ce policier, joint par téléphone, ces gens viennent de villages environnants pour porter secours à leurs proches vivant à Och. Il y a également environ 2.000 hommes, en majorité des Kirghizes, avec des bâtons et des fusils de chasse, a-t-il dit.

Outre les 46 morts, les affrontements ont fait 646 blessés, selon un bilan fourni par le ministère de la Santé. De nombreuses victimes auraient été touchées par balles.

Selon un porte-parole du gouvernement interrogé dans la nuit de vendredi à samedi, les forces gouvernementales ont "beaucoup de difficultés à reprendre le contrôle de la situation.

"Ils n'y parviennent pas", a-t-il poursuivi, ajoutant que des troubles avaient également éclaté à Bichkek. Selon un correspondant de Reuters dans la capitale, une cinquantaine d'hommes non armés et pour la plupart éméchés invectivaient les forces de l'ordre aux abords du Parlement.

La crise au Kirghizistan est suivie de près par la Russie et les Etats-Unis, qui disposent chacun d'une base militaire dans ce pays, ainsi que par la Chine.

S'exprimant lors du sommet annuel de l'Organisation de coopération de Shanghai à Tachkent, le président russe Dmitri Medvedev a souhaité qu'il soit rapidement mis fin aux émeutes.

Il a précisé par la suite que le pacte de sécurité entre les anciennes républiques soviétiques ne pouvait pas être mis en application dans ce cas précis car il s'agit d'une affaire interne au Kirghizistan.

Le président chinois Hu Jintao a proposé l'aide de son pays tandis que le chef de l'Etat ouzbek, Islam Karimov, a jugé que les violences à Och relèvent des "affaires internes" au Kirghizistan.

L'Union européenne a invité le gouvernement d'Otounbaïeva "à restaurer l'ordre public avec des moyens légaux", fait savoir Catherine Ashton, haut représentant de l'UE pour les Affaires étrangères, dans un communiqué.

Des renforts ont été dépêchés à la frontière avec l'Ouzbékistan, a dit un porte-parole de la police kirghize des frontières joint au téléphone.

Avec Olga Dzyubenko à Bichkek. Gregory Schwartz, Pierre Sérisier et Jean-Philippe Lefief pour le service français

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