Et oui, Israël roule trop vite. Il a toujours une petite marge d’avance sur lui-même, qu’il s’agisse de fonder un état avant la date recommandée ou de noyer le croissant shiite, arc de résistance par excellence, dans le sang. Or, à force de trop foncer, on peut finir défoncé. Les actes de mauvaise foi, même s’ils passent mieux en politique qu’en privé, ne profitent jamais. Lorsque Netanyahu, croyant ne pas être filmé, raconte comment il a su « casser » les accords d’Oslo en feignant les appliquer au goutte-à-goutte, son discours trahit un manque d’intérêt total à l’égard des Israéliens. Régner, régner, régner, dominer. Coûte que coûte. Ce triste sire n’a aucun autre souci qui puisse satisfaire un tant soit peu les exigences élémentaires de stabilité requises par son peuple.
Le jusqu’au-boutisme mégalomaniaque d’un Netanyahu, loin d’être un cas isolé, fait symétriquement pendant à celui de l’équipe Fabius, pourtant dévouée, si je ne m’abuse, à la cause française. Monsieur le Ministre des Affaires étrangères fait le dur, l’intransigeant, l’intrépide. Il a sa conception de la démocratie qui est toute simple. Il suffit qu’un concept énoncé ex cathedra, qu’une ingérence dite humanitaire (pourquoi pas sanglante) colle comme de la glue aux intérêts de l’état hébreu pour que ceux-ci soient reconnus démocratiques. En réalité, nous avons affaire à un énième camouflé d’une certaine fraction oligarchique incorrigiblement aveugle quant au destin d’un pays qu’elle aime à la folie. Et cette folie, étant aussi une forme de fanatisme, pourrait perdre ce pays. Mais il y a pire. Ce fanatisme pro-israélien, fondé sur un obscur mélange de mégalomanie et d’exclusivisme nationaliste, perdra également la France. Il perdra également l’Occident dans son intégralité.
Lorsque les cités commencent à se soulever formant un mouvement contestataire puissant au cœur même de la France et que, de l’extérieur, des djihadistes français de père et de mère appellent M. Hollande à se convertir à l’islam radical, je me demande s’il reste encore des issues de secours. La France va dans le mur et elle continue de plus belle. Certes, le bonhomme lobotomisé incitant le Président à la conversion est fou à lier, c’est un toxico invétéré souffrant d’hallucinations. Certes, il annone ce qu’on lui dit d’ânonner. Mais, en sa qualité de médium, il retransmet les ambitions réelles des soi-disant rebelles dont nous voyons les saintes œuvres en Irak et en Lybie. Tant de pays sacrifiés au nom d’un seul, ça ne fait pas beaucoup ?
Et la question serait encore assez légitime si ce sacrifice avait un sens. Pourtant, comme on le voit clairement à travers l’exemple palestinien, Israël est loin de gagner les parties qu’il entame. Bien plus, nul doute que les USA, bien que perçus sous un jour presque hollywoodien de défenseurs suprêmes par Shimon Peres et Netanyahu, n’hésiteront pas, le temps venu, à plaquer leur chouchou. Enfin, les salafistes avec lesquels ils croient pouvoir faire cause commune, là encore, le moment venu, ne feront qu’une bouchée de Tel Aviv. Accumulant les erreurs de calcul, France et Israël foncent vers le précipice.
Cette esquisse que je viens de brosser semble grosso modo coïncider à la vision de M. Allain Jules, journaliste indépendant, politologue notamment spécialisé en relations internationales dont les brillants éclairages ont tout ce qu’il y a de plus perspicace.
La VdlR. « Pourriez-vous nous expliquer les motivations réelles de la France quand elle arme, avec une constance quasi-obsessionnelle, des rebelles islamistes ingérables ?
Allain Jules. Comme on l’a toujours dit, c’est incompréhensible. On a l’impression qu’Israël roule à tombeau ouvert. On ne peut pas soutenir des gens qui demain retourneront leurs armes contre vous. Mais la vraie question est de savoir ce qui se passe sur le terrain, parce que beaucoup d’informateurs signalent que certains éléments israéliens des services secrets sont aux côtés des rebelles en Syrie ! Voici une première explication. Reste à savoir pourquoi cette alliance. On a le sentiment, en fait, que ces djihadistes désignés par le terme de rebelles ont renoncé à revendiquer le plateau du Golan. Ce n’est que ça. Or, ce plateau est une zone très riche, notamment en hydrocarbures. Tuerait-on la Syrie parce qu’on veut à tout prix garder le Golan ? Manifestement, oui, l’intérêt est économique. Il y a donc juste eu un deal avec ceux qui veulent renverser Assad au moyen d’un coup d’état.
La VdlR. Quels dénouements possibles au conflit syrien ? Quelles conséquences pour l’Occident avant tout ?
Allain Jules. L’Occident a armé ses ennemis. D’après nos informations, à l’heure actuelle, il y a un recul constant des djihadistes sur le terrain. Alors que voulez-vous qu’il se passe demain ? Ces gens, qui eux-mêmes ont peur de mourir, rentreront en France, rentreront en Allemagne, rentreront en Belgique, rentreront en Hollande. Alors quelles perspectives pour la France notamment avec ses banlieues ? Il suffira que ceux qui étaient derrière leur recrutement à coups de milliers de dollars, c’est-à-dire le Qatar, l’Arabie Saoudite, bref, les pays du Golfe, claquent des doigts et refournissent encore de l’argent à ces gens-là pour qu’ils mettent le feu ici en France. C’est d’une évidence déconcertante. Assad que l’on aime tant affubler du statut de dictateur a pourtant clairement averti l’Occident en lui certifiant que les individus qu’il prenait en charge allaient tôt ou tard se retourner contre lui, qu’il était en train de creuser sa propre tombe et celle de la Syrie avec. Etes-vous au courant des dernières [la semaine dernière, La VdlR] mésaventures de l’ASL ? Kamal Hamami a été assassiné par un groupe islamique présent en Irak et au Levant armé par l’Arabie Saoudite et le Qatar quoi devient plus puissant sur le terrain que le front Al Nosra. En réalité, cela signifie que les zones dites libérées, notamment en Syrie, sont tenues par ces gens-là. L’ASL n’existe plus. M. Hamami, de son nom de guerre Abou Bassir al Ladkani, a été tué parce qu’il s’est rendu à une réunion à Lattaquié où les gens de cette brigade étaient présents, il a fait un peu de zèle en disant que les gens de son groupe allaient reprendre toutes les villes expropriées par l’adversaire. Naturellement, la réaction ne s’est pas fait attendre. Il a été assassiné. On voit donc, des faits de ce type à l’appui, que l’Occident est en train de se tromper d’une façon radicale et abyssale. La Syrie ne sera plus ce qu’elle était avant. C’est-à-dire qu’il y aura des attentats, des désordres de temps à autres … Cependant, le Président Assad tient la Syrie, les terroristes n’auront plus aucune mainmise sur les zones libérées. C’est ce que comprennent les USA. Même au niveau de l’ONU, vous savez que Ban Ki-moon a lu le rapport russe et il sait pertinemment que c’est le front Al Nosra qui a utilisé du gaz sarin….
La VdlR. Carla Del Ponte l’avait déjà démontré …
Allain Jules. Exactement ! Et pourtant, l’Occident s’obstine à dire le contraire ! Ils sont allés plus loin que Saint Thomas qui a dit que « quand je vois, j’accepte ». Mais ces gens-là, ils ont vu et c’est pour cette raison que les Américains ont décidé de ralentir. Maintenant, pour ce qui est de la France, j’ai comme l’impression qu’elle avance à l’aveuglette, ne sachant où elle va, ne sachant ce qu’elle fait » .
Si Monsieur Fabius, en génie de la pensée sinistre, était doté ne serait-ce que d’un soupçon de bon sens, il se garderait bien d’attiser un brasier dont les étincelles se transforment petit à petit en langues de feu dans les cités de France. Admettons que le sort de la population civile de Homs, d’Alep et d’autres villes ou villages de la Syrie lui soit totalement indifférent. Admettons qu’Israël prévale sur toute cause comme le répète d’ailleurs le majestueux et grandiloquent BHL. Mais il suffit pourtant de visualiser la vidéo de l’exécution du Père François Mourad pour capter la haine inqualifiable qui en ressort et imaginer que les bourreaux regagneront leurs cavernes, soutenus par des éléments agissant de l’intérieur et prêts à transformer des guerres soi-disant locales en ce qui sera, pour eux, une guerre internationale, pour nous, une guerre civile, une bonne partie des sympathisants islamistes étant officiellement français.

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