26 octobre, 2012

Birmanie: plus de 100 morts dans les violences entre bouddhistes et musulmans


AFP/Archives Des familles musulmanes Rohingyas, dans un camp de déplacés, près de Sittwe, le 10 octobre 2012 dans l'ouest de la Birmanie AFP/Archives
SITTWE (Birmanie) (AFP) Plus de 100 personnes ont été tuées en quelques jours dans les violences entre bouddhistes et musulmans, dans l'ouest de la Birmanie, soulevant l'inquiétude croissante de la communauté internationale qui craint que le processus de réformes ne soit menacé.
Après plusieurs semaines d'accalmie dans un Etat Rakhine sous état d'urgence, des affrontements ont de nouveau éclaté depuis dimanche entre les bouddhistes de l'ethnie rakhine et les musulmans Rohingyas, une minorité apatride considérée par l'ONU comme parmi les plus persécutées de la planète.
Un porte-parole du gouvernement rakhine a fait état d'au moins 112 morts. "Jusqu'à ce matin, 51 hommes et 61 femmes sont morts", a indiqué à l'AFP Win Myaing, précisant que les victimes étaient à déplorer dans les deux communautés.
Il a également indiqué que plus de 70 personnes avaient été blessées et quelque 2.000 maisons avaient été incendiées.
Au moins 75.000 personnes, en grande majorité des Rohingyas, avaient été déplacées par la première vague de violence. Des milliers d'autres affluent désormais vers les camps autour de Sittwe, capitale de l'Etat Rakhine. Des structures déjà surpeuplées où les déplacés manquent de nourriture et de soins.
AFP
Un homme de l'ethnie bouddhiste rakhine, blessé, à l'hôpital de Sittwe, le 25 octobre 2012 dans l'ouest de la Birmanie
La crise devient problématique pour le président Thein Sein, au pouvoir depuis mars 2011, et qui a depuis multiplié les réformes. L'ancien général a notamment entrepris des négociations avec les rébellions ethniques, dont certaines sont en conflit avec le pouvoir depuis l'indépendance en 1948.
Mais les violences de l'Etat Rakhine sont d'une toute autre nature.
Elles opposent, dans un des Etats les plus pauvres du pays, deux communautés entre lesquelles les tensions existent depuis des décennies et qui ont plongé dans la violence en juin, avec un bilan officiel total de plus de 200 morts mais qui est probablement sous-évalué.
L'opinion birmane exprime de façon quasi-unanime une grande hostilité à l'égard des Rohingyas, qui sont environ 800.000 dans l'Etat Rakhine, mais ne sont pas reconnus comme une des minorités officielles du pays.
AFP
Birmanie: carte de localisation de l'Etat de Rakhine, lieu de violences entre bouddhistes et musulmans
A l'inverse, la communauté internationale s'inquiète du sort réservé à ces musulmans apatrides et de l'impact de ces événements sur le processus d'ouverture de la Birmanie.
"Les attaques par des groupes d'autodéfense, les menaces ciblées et la rhétorique extrémiste doivent être arrêtées", a insisté le porte-parole du secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon dans une déclaration transmise par les Nations unies à Rangoun.
"Si ce n'est pas fait, le tissu social pourrait être endommagé de façon irréparable et le processus de réformes et d'ouverture actuellement mené par le gouvernement est susceptible d'être mis en péril", a-t-il ajouté, dénonçant l'exploitation de la haine par "des activistes et des éléments criminels".
Les Etats-Unis ont pour leur part exhorté "toutes les parties à faire preuve de retenue et à stopper immédiatement toutes les attaques", réclamant "de sérieux efforts pour aboutir à une réconciliation nationale en Birmanie".
Vendredi, le quotidien officiel anglophone New Light of Myanmar publiait un communiqué du bureau présidentiel dans lequel il promettait de ramener le calme.
"La communauté internationale observe les progrès en cours en Birmanie avec intérêt", a-t-il souligné, assurant que les "individus et organisations (qui) se livrent à des manipulations" seraient poursuivis.
Dans ce contexte, les principales organisations musulmanes du pays ont annulé les célébrations de l'Aïd Al-Adha, l'une des plus importantes fêtes de l'islam, qui commençait vendredi.
Les violences font par ailleurs ressurgir le spectre de l'exil massif de Rohingyas, notamment vers la Malaisie, dans des proportions plus importantes que les années précédentes.
"Nous constatons déjà une augmentation du nombre de bateaux en partance, non seulement de Birmanie mais aussi du Bangladesh", a indiqué à l'AFP Vivian Tan, estimant que les violences allaient sans aucun doute multiplier les départs qui commencent en général à cette époque, à la fin de la saison des pluies.
Le Bangladesh voisin a de son côté renforcé ses patrouilles frontalières pour s'assurer qu'ils ne puissent pas entrer sur son territoire.

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