14 septembre, 2012

EN DIRECT. Ban Ki-moon : "Un film haineux et répugnant"


 Les violences se multiplient dans le monde musulman. L'ambassade américaine à Tunis pourrait avoir été incendiée.

Au Cachemire, en Inde, un manifestant face aux forces de l'ordre. Au Cachemire, en Inde, un manifestant face aux forces de l'ordre. © Rouf Bhat / AFP
Des dizaines de milliers de musulmans ont manifesté vendredi à travers le monde arabe et l'Asie pour dénoncer un film produit aux États-Unis dénigrant l'islam, déclenchant de nouvelles violences.
Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a condamné le film tout en lançant un appel "au calme et à la raison : "Rien ne justifiait les meurtres et la brutalité" a déclaré le secrétaire général. "Il semble qu'un film haineux, répugnant, a suscité cette violence. Il est honteux de profiter du droit fondamental de libre expression pour provoquer délibérément le sectarisme et une effusion de sang".
Par mesure de précaution, les États-Unis ont dépêché une équipe de marines pour protéger l'ambassade américaine au Yémen alors que des manifestations et violences antiaméricaines menacent le bâtiment, a annoncé le Pentagone vendredi soir.
À Khartoum, quelque 5 000 islamistes ont attaqué les ambassades britannique et allemande, mettant le feu à cette dernière et y arrachant le drapeau national pour le remplacer par un étendard islamiste, selon un correspondant de l'AFP. Un manifestant a été tué lors de la dispersion de la manifestation. La victime a été écrasée par un véhicule policier qui a foncé sur un groupe de manifestants lançant des pierres sur les forces de l'ordre, selon le correspondant de l'AFP sur place.
Une épaisse fumée noire s'élevait vendredi après-midi au-dessus de l'ambassade américaine dans la banlieue de Tunis, a constaté une journaliste de l'AFP après que la police a procédé à des tirs de sommation et de lacrymogènes contre des manifestants. La fumée s'élève depuis le parking de l'ambassade. Selon un policier interrogé par l'AFP, des manifestants y ont jeté des cocktails Molotov.
Au Liban, 300 islamistes ont incendié un fast-food américain à Tripoli (nord), d'après un journaliste de l'AFP. Un manifestant a été tué et 25 autres ont été blessés.
Au Maroc, quelque deux cents salafistes ont manifesté à Salé, près de Rabat, après la prière du vendredi, contre le film anti-islam produit aux États-Unis, déchirant et brûlant des drapeaux américains.
À Sanaa, la police a tiré en l'air pour repousser quelques centaines de manifestants qui s'approchaient de l'ambassade américaine, selon un correspondant de l'AFP. Elle a également fait usage de canons à eau pour disperser les protestataires qui s'étaient rassemblés à quelque 500 mètres de l'ambassade, brûlant le drapeau américain et réclamant l'expulsion de l'ambassadeur. Jeudi, quatre personnes avaient trouvé la mort lors d'attaques contre cette même ambassade.
Au Bangladesh, environ 10 000 manifestants ont brûlé à Dacca des drapeaux américains et israéliens, et tenté de s'approcher de l'ambassade des États-Unis. À l'issue de la prière du vendredi, les manifestants se sont rassemblés devant la mosquée Baitul Mokarram, la plus importante du pays, en affirmant notamment : "Nous ne tolérerons pas d'insultes envers notre grand prophète."
En Indonésie, environ 350 islamistes radicaux ont également manifesté à Jakarta contre la "déclaration de guerre" que représente, selon eux, le film. Dans la capitale iranienne, des milliers de personnes se sont rassemblées aux cris de "Mort à l'Amérique" et "Mort à Israël", selon des images de la télévision d'État.
Au Caire, où l'ambassade américaine est visée par des manifestations depuis mardi, des heurts sporadiques se sont poursuivis dans la matinée avec les forces de l'ordre déployées aux abords de la mission diplomatique. Le puissant mouvement des Frères musulmans, dont est issu le président Mohamed Morsi, a retiré son appel à manifester à travers tout le pays, affirmant qu'il n'organiserait qu'un rassemblement "symbolique" au Caire, sur la place Tahrir.

Forces de sécurité sur le qui-vive

En Syrie, théâtre de violences depuis mars 2011, près de 200 manifestants ont organisé un sit-in de protestation devant l'ambassade des États-Unis à Damas, fermée depuis plusieurs mois, selon un journaliste de l'AFP. Silencieux, ils portaient des pancartes dénonçant le film. En Jordanie, des salafistes ont annoncé des manifestations devant la chancellerie américaine, qui a fait savoir qu'elle avait "relevé sa sécurité". Les Frères musulmans jordaniens appellent de leur côté à des "défilés pacifiques". En Tunisie, des imams de mosquée ont aussi appelé à un grand rassemblement dans l'après-midi devant l'ambassade des États-Unis.
À Benghazi, dans l'Est libyen, le trafic aérien a été suspendu dans la nuit pour des "raisons de sécurité", après l'attaque menée mardi soir qui avait coûté la vie à l'ambassadeur Chris Stevens et à trois autres Américains. Mais il a pu finalement reprendre vendredi. De nombreux pays ont renforcé la sécurité des ambassades américaines après cette attaque, comme le leur a demandé le président Barack Obama.
L'Inde, qui compte une importante minorité musulmane, a ainsi placé en alerte ses effectifs déployés autour des bâtiments américains. Le plus haut responsable religieux musulman de l'État indien du Cachemire a demandé aux citoyens américains de "quitter immédiatement" la région. En Afghanistan, les autorités sont sur le qui-vive et la plupart des ambassades ont pris des mesures de sécurité accrues pour leur personnel et appelé leurs ressortissants à éviter de sortir.
Alors que le département d'État américain a déconseillé à ses ressortissants de se rendre en Algérie en raison d'un risque accru d'attentats, les forces de sécurité ont très sensiblement renforcé leur présence autour de l'ambassade à Alger. Les forces de l'ordre israéliennes ont aussi annoncé le renforcement de leur dispositif de sécurité dans la Vieille Ville et à Jérusalem-Est en raison des "tensions régionales". Des appels à manifester ont été lancés dans l'enclave palestinienne de Gaza, contrôlée par le mouvement islamiste Hamas.

Un film considéré comme "une agression"

Les réactions parfois violentes déclenchées par Innocence of Muslims ("L'innocence des musulmans"), dont des extraits sont diffusés sur Internet, rappellent la colère qu'avait provoquée la publication de caricatures du prophète Mahomet en 2006 par un journal danois. Réalisé par un cinéaste qui s'est présenté comme Américano-Israélien et qui, selon les médias américains, serait de religion chrétienne copte, le film de piètre qualité cinématographique dénigre les musulmans, présentés comme immoraux et brutaux, ainsi que le prophète Mahomet. L'auteur du film aurait demandé la protection de la police californienne après avoir été identifié par les médias.
Les déclarations se sont multipliées pour fustiger ce film, tout en appelant au calme. Le président égyptien Mohamed Morsi a jugé vendredi que le film constituait une "agression" qui "détourne l'attention des vrais problèmes au Proche-Orient", tout en condamnant de nouveau les violences qu'il a entraînées dans la région. Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a estimé que ce film était une "provocation" qui ne peut néanmoins justifier les attaques. La secrétaire d'État américaine Hillary Clinton a assuré que le gouvernement américain n'avait "absolument rien à voir" avec cette "vidéo écoeurante et condamnable", exhortant les dirigeants politiques et religieux à condamner les violences survenues. Le site de partage de vidéos YouTube en Inde a bloqué l'accès au film. YouTube avait déjà restreint cette semaine l'accès à ce film, "de manière temporaire", en Libye et en Égypte. Le Pakistan et l'Afghanistan ont de leur côté bloqué l'accès à la vidéo tandis que l'Indonésie, pays musulman le plus peuplé de la planète, a aussi demandé à YouTube un blocage du film.

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À Tripoli (Liban), à Sanaa (Yémen), à Dacca (Bangladesh), à Téhéran ©AFP

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