14 mars, 2012

DAMAS - Syrie: l'armée reprend la ville rebelle d'Idleb, l'opposition se divise

DAMAS - L'armée a pris mercredi le contrôle total de la ville rebelle d'Idleb dans le nord-ouest de la Syrie, au moment où l'opposition, déjà fragmentée, était fragilisée par la démission de trois personnalités de la principale alliance anti-régime.

Cette prise de contrôle intervient au lendemain de l'annonce par le président Bachar al-Assad de la tenue d'élections législatives en mai, jugées "ridicules" par Washington.

Le régime profite des divisions internationales et de la fragmentation de l'opposition pour réaffirmer son autorité sur l'ensemble du territoire.

La prise d'Idleb, un bastion proche de la frontière avec la Turquie, intervient en effet deux semaines après la reprise le 1er mars de Baba Amr, quartier rebelle de la ville de Homs (centre), après un mois de pilonnage meurtrier.

"Depuis hier (mardi) soir, il n'y a plus de combats, l'Armée syrienne libre (ASL) s'est retirée et l'armée régulière a pris d'assaut toute la ville et mène des perquisitions maison par maison", a affirmé Noureddine al-Abdo, un militant local, en précisant que l'armée poursuivait mercredi ses arrestations.

Mardi, le quotidien proche du pouvoir Al-Watan avait annoncé la fin de l'offensive contre Idleb en un "temps record".

Face à la réticence de la communauté internationale à armer les rebelles, les militants ont avancé de nouveau le manque d'équipements pour expliquer ce revers. "L'ASL a préféré se retirer. Tout le monde sait qu'elle est incapable de faire face à (la puissance de feu) de l'armée", a indiqué M. Abdo.

Les armes parvenaient en quantité à Baba Amr, notamment en provenance du Liban voisin, ce qui n'a pas été le cas d'Idleb. "Les rebelles d'Idleb ne recevaient pas d'armes. Ce dont ils disposaient, c'était essentiellement les armes que les déserteurs avaient amenées avec eux", a précisé le militant.

Les combattants rebelles, essentiellement des déserteurs équipés d'armes légères et moyennes, répètent souvent qu'ils peinent face à l'artillerie lourde des forces régulières.

Dans la province d'Idleb, les violents combats se poursuivaient mercredi notamment dans le district de Jabal al-Zaouia, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), faisant quatre morts, deux civils et deux rebelles.

Parallèlement à la bataille militaire, le régime a tenté d'afficher une volonté de réformes, avec l'annonce mardi par M. Assad de la tenue de législatives le 7 mai, les premières depuis le début il y a un an de la révolte contre son régime.

Les Etats-Unis ont jugé "ridicule" l'organisation d'élections "au milieu des violences" qui, selon l'OSDH, avaient fait 79 morts mardi, en majorité des soldats.

Les législatives, prévues initialement en septembre 2011, avaient été reportées en raison des réformes annoncées par M. Assad, dont une nouvelle Constitution mettant fin à la primauté du parti Baas au pouvoir et plébiscitée le 27 février lors d'un référendum qualifié de "plaisanterie" par Washington.

Parallèlement, M. Assad a remis sa réponse aux propositions faites le week-end dernier par l'émissaire de l'ONU et de la Ligue arabe, Kofi Annan, lors d'entretiens qui avaient porté, selon ce dernier, sur la nécessité "d'un arrêt immédiat des violences et des meurtres, d'un accès aux organisations humanitaires et d'un dialogue".

"L'envoyé spécial conjoint pour la Syrie, Kofi Annan, a maintenant reçu une réponse des autorités syriennes", a indiqué l'ONU dans un communiqué, sans préciser la teneur de cette réponse.

Indiquant que "des questions" demeurent, le communiqué ajoute que "compte tenu de la situation grave et tragique sur le terrain, tout le monde doit comprendre que le temps presse".

"Comme l'a dit M. Annan lors de sa visite dans la région, on ne peut permettre que cette crise traîne en longueur" poursuit le bref communiqué.

"Nous examinons leur réponse", a simplement indiqué à l'AFP le porte-parole de M. Annan, Ahmad Fawzi, sans donner de plus de précision.

La Russie, principal allié de Damas, a affirmé elle qu'elle ne défendait "pas le régime" syrien "mais la justice", face aux critiques des Occidentaux et des pays arabes qui lui reprochent son opposition à toute résolution condamnant la répression.

De son côté, le Conseil national syrien (CNS), qui réunit les principaux mouvements de l'opposition, enregistrait la défection de trois personnalités.

Haitham al-Maleh, Kamal al-Labwani et Catherine al-Talli ont annoncé sur leur page Facebook qu'ils claquaient la porte en raison de "divergences" et de l'inefficacité" du CNS.

A Genève, le Haut commissaire adjoint aux droits de l'Homme, Mme Kyung-wha Kang, a indiqué que des observateurs de l'ONU seraient envoyés cette semaine dans les pays voisins de la Syrie pour recueillir des informations sur les "violations et atrocités" commises.

Amnesty International a fait état de "torture systématique" contre les détenus. "L'ampleur de la torture et des mauvais traitements en Syrie a atteint un niveau jamais vu pendant des années et rappelle l'ère sombre des années 1970 et 1980", a affirmé l'ONG.

Les violences ont fait plus de 8.500 morts depuis le 15 mars 2011, selon l'OSDH. Par ailleurs, 30.000 réfugiés ont été enregistrés par le Haut commissariat pour les réfugiés (HCR), qui évoque le chiffre de 200.000 déplacés.

© 2012 AFP

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