05 décembre, 2011

Pourquoi une candidature sud-africaine à la présidence de la Commission de l’Union africaine est malvenue.

AFRIQUE DU SUD (© 2011 Afriquinfos) Nkosazana Clarice Dlamini-Zuma est une femme accomplie et capable de se distinguer dans des fonctions de haut niveau que ce soit dans son pays, l’Afrique du Sud, ou ailleurs sur le Continent. Elle l’a démontré au cours des années de braise de la lutte anti-apartheid en tant que dirigeant proéminent du Congrès national africain (ANC), alors interdit, mais aussi aux différents postes ministériels qu’elle a successivement occupés depuis 1994. Aujourd’hui encore, elle est au poste - stratégique - de ministre de l’Intérieur au sein du gouvernement de son ex-époux, Jacob Zuma. C’est dire son poids au sein du parti et de l’Etat. (Par Fred Eno (*))
Pourquoi une candidature sud-africaine à la présidence de la Commission de l’Union africaine est malvenue.

Fred Eno

Nkosazana Clarice Dlamini-Zuma est souvent citée comme probable candidate à la direction de l'ANC, ce qui lui ouvrirait un boulevard pour la succession de Jacob Zuma à la tête de l’Etat lors des prochaines élections générales. Est-ce la raison pour laquelle ce dernier s’obstine à vouloir poser la candidature de son ancienne épouse à la présidence de la Commission de l’Union africaine (UA), histoire de se débarrasser d’une concurrente politique potentielle ?


Une règle non écrite veut que le poste de Président de la Commission échappe aux « grandes » puissances économiques et militaires du continent afin de ne pas accroître le fossé entre Etats membres. Ce souci d’équilibre devait normalement conduire l'Afrique du Sud à mettre tout son poids derrière un candidat originaire d’un autre Etat membre de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC). Pretoria a malheureusement fait un autre choix.

Au delà de sa position régionale, l'Afrique du Sud est le seul membre africain du club – très fermé - des « économies émergentes », avec le Brésil, la Russie, l'Inde et la Chine. C’est le seul pays africain membre du G20, le seul qui dispose d’un accord bilatéral privilégié avec l'Union européenne, l’un des rares Etats africains briguant, avec des chances de succès, un fauteuil de membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU. Ajouter à cette suprématie la présidence de la Commission de l'Union africaine n’augurera rien de bon pour la cohésion et l’harmonie requises entre Etats membres de la SADC et de l'UA.

Autant Madame Dlamini-Zuma est qualifiée un poste de ce niveau, autant il est important de savoir si elle est la seule capable de représenter la frange australe du continent. Pour beaucoup d'observateurs, à Addis Abeba, le simple fait qu'une des cinq « grandes puissances » (l’Afrique du Sud, l’Algérie, le Nigeria, l'Egypte et la Libye) veuille imposer l’un de ses nationaux à la tête de la Commission de l’UA pourrait heurter la sensibilité, le patriotisme et l’orgueil des « petits » Etats membres de la SADC.

La fameuse règle non écrite sous-tend que l’Afrique du Sud, l’Algérie, le Nigeria, l'Egypte et la Libye ne présentent aucun candidat au poste à la présidence de la Commission de l'Union africaine afin d’éviter de donner trop de pouvoir à des Etats déjà influents en raison de leurs contributions financières, militaires et matérielles à l'Union. A titre de comparaison, c’est comme si l’on désignait un Américain ou un ressortissant de l’un des quatre autres pays membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU comme Secrétaire général des Nations unies.

En considération de son expérience personnelle et de son remarquable parcours, il y a de bonnes raisons de penser que Madame Dlamini-Zuma peut efficacement apporter sa pierre, au plan interne, à la construction de la plus riche et la plus développée des Etats membres africains. Elle ferait, à n’en pas douter, un bon Président d’Afrique du Sud. Vouloir l’utiliser pour semer la discorde au sein de l'Union africaine est inapproprié et malvenu.

Fred Eno est correspondant de plusieurs médias à Addis Abeba (Ethiopie). Il est également éditeur panafricain et le fondateur de l’ONG Main-dans-la main Afrika.
Email : fredeno@hotmail.com

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