07 décembre, 2011

BURKINA FASO Elections couplées de 2012 : Evitons de tromper le peuple !

Depuis quelques jours, des débats se mènent dans la presse sur l’opportunité ou non pour le Burkina Faso d’aller à la biométrie et sur la nécessité de reporter de quelques mois la date des élections couplées. Loin de moi la prétention de maîtriser le sujet ; je voudrais seulement en tant que citoyen ordinaire, mais très intéressé par les questions électorales d’ici et d’ailleurs, m’inviter au débat. La diversité des opinions permettra au peuple de mieux juger.

Mais avant, je tiens à saluer la vision de la nouvelle équipe de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) dirigée par Maître Barthélémy Kéré. Je suis avec beaucoup d’intérêt toutes ses sorties dans les médias pour expliquer la philosophie qui guide cette équipe dans l’organisation des élections couplées de 2012. J’ai compris dans la démarche du président de la CENI et de ses collaborateurs que le caractère non contestable et crédible du fichier électoral est un préalable important à l’organisation réussie d’une élection. M’étant procuré un exemplaire du rapport de la CENI sur les élections législatives du 6 mai 2007, j’ai pu lire ceci : « le principal sujet de controverse et même de contestation lors des scrutins qui se sont succédé dans notre pays a concerné la qualité et la crédibilité du fichier électoral et de la carte d’électeur … Quelle que soit la pièce administrative qui sera retenue pour s’inscrire sur les listes électorales, la confiance des acteurs dans le processus électoral ne sera restaurée qu’avec l’adoption de la carte d’électeur avec photographie et empreintes digitales numérisées ».

En effet, c’est un défi que de disposer de listes électorales avec photographie de l’électeur et qui ne comportent pas de doublons. En écoutant le président de la CENI, je me suis convaincu que la vision qu’il entend imprimer s’est inspirée d’une part, des leçons tirées de notre histoire électorale et d’autre part, des expériences réussies des autres pays. Avant de poursuivre dans le débat, il est peut-être utile de définir ce qu’on entend par biométrie.

Ayant eu l’opportunité de participer aux rencontres organisées par le président de la CENI avec les experts de l’Organisation internationale de la Francophonie, j’ai appris de la bouche même de ces experts que la biométrie est une technique visant à identifier une personne à partir de ses caractéristiques biologiques qui sont infalsifiables et uniques pour lui (main, empreintes digitales, iris, rétine, ADN etc.).

Toujours selon les experts, la biométrie permet d’assoir l’unicité physique de chaque électeur sur les listes électorales en évitant les votes multiples qui favorisent les fraudes. Elle permet également l’impression des mêmes photographies sur les cartes d’électeur et les listes électorales. Ce qui est un gage supplémentaire de transparence du processus et de sincérité des résultats du scrutin. Les mêmes experts ont assuré les participants que les kits qui seront acquis pour l’enrôlement peuvent être capitalisés, entre autres, pour l’identification précise et sûre des populations de manière générale, le tri et la gestion de populations cibles en fonction d’objectifs spécifiques ( tranches d’âge, sexe, profession), la confection et distribution du Permis de conduire, la gestion de la documentation électronique au niveau des administrations (gestion informatisée des fonctionnaires). Enfin, ils ont soutenu que la biométrie permet de disposer de listes électorales définitives qui n’auront plus qu’à être périodiquement mises à jour, par un procédé de révision rapide et peu coûteux. Fort de cela, je pense que la CENI est dans la bonne direction. Du reste, même si cette technologie engendre des coûts qui paraissent élevés, il s’agit d’une dépense définitive qui nous évitera les perpétuels recommencements en matière de constitution d’un fichier électoral transparent et crédible.

Ceci étant, on est tous d’accord que la biométrie n’est pas une panacée. Une bonne administration électorale est capitale dans le succès de l’élection, d’où l’importance, de la maîtrise de la cartographie, du choix d’un bon mode opératoire pour les scrutins. En outre, il faut pouvoir disposer, non seulement d’agents électoraux et singulièrement de membres des démembrements de la CENI d’un bon niveau et d’une probité certaine, mais également de membres des bureaux de vote issus des différents partis en compétition qui savent surveiller le déroulement du scrutin. Sur ce plan, je me suis laissé dire que la CENI a un programme qui prend largement en compte ces impératifs.

Par ailleurs, j’ai cru comprendre que la CENI souhaite pour les élections couplées de 2012 relever le défi du faible taux de participation généralement enregistré pendant les élections dans notre pays. L’ambition de pouvoir enrôler autour de sept (7) millions d’électeurs et faire en sorte que la biométrie qui est une technologie nouvelle pour nos populations puisse participer au renforcement de la démocratie et surtout du respect du choix des électeurs.

A cette fin, la Commission électorale nationale indépendante a estimé qu’il faut repousser de quelques mois ces élections couplées qui sont une première dans l’histoire de notre pays pour mieux les organiser.

Il faut, en effet, mesurer à sa juste proportion la délicatesse de ces scrutins qui ne sont pas de même nature : d’un côté, l’on a des élections locales et de l’autre des élections nationales qu’il faut coupler. Toute la classe politique et l’ensemble des Burkinabè de bonne foi doivent prendre toute la mesure des enjeux et faire des propositions constructives afin que le Burkina Faso qui a su donner des conseils avisés en matière organisation d’élections à d’autres pays montre de façon concrète la voie à suivre. Pour la date de la tenue des élections, toutes les personnes avisées de la scène politique savent que c’est le gouvernement qui convoque le corps électoral après des concertations avec les différents acteurs de la vie socio- politique. D’aucuns estiment, en outre, qu’il faut partir du fichier de l’Office national d’identification (ONI) pour engager l’enrôlement des électeurs. Ce n’est pas du tout mon avis au regard des controverses nées du croisement ou non lors de la dernière présidentielle. On pourrait tout au moins préinstaller ce fichier dans les kits qui serviront à l’enrôlement des populations car il est important de disposer d’un fichier propre comportant tous les renseignements nécessaires et susceptibles de servir à d’autres applications.

Je voudrais pour terminer exhorter la CENI à rester dans la même dynamique et à œuvrer vraiment à la consolidation de la paix et à l’édification de la démocratie dans notre pays. Que les élections ne soient jamais un prétexte de déchirure au pays des hommes intègres. L’on peut « se bagarrer » autour d’autres préoccupations relatives au développement et au bien-être des populations mais que jamais l’on ne contribue à mettre à rude épreuve la paix sociale à travers des élections mal organisées à coût de milliards avec ou sans biométrie. Que le Seigneur bénisse le Burkina Faso !

Charles PARE
Un citoyen

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