20 août, 2011

Didier Drogba, plus qu'un footballeur

Plus qu'un simple joueur de football, Didier Drogba est une idole en Côte d'Ivoire. Le capitaine des Eléphants dépasse les clivages ethniques ou politiques et marque «pour la paix».

Didier Drogba, Côte d'Ivoire-Portugal, le 15 juin 2010, Afrique du Sud. Balibouse

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En un mot, Didier Drogba est une légende. En une grosse décennie, l'attaquant de Chelsea a empilé les honneurs, les buts et les titres: champion d'Angleterre (2005, 2006 et 2010), Coupe d'Angleterre (2007, 2009 et 2010), Ballon d'or africain (2006, 2009), joueur africain de l’année de la BBC (2009), meilleur joueur de la saison en France (2004), meilleur buteur de l'histoire de la sélection ivoirienne (49 réalisations)...

Mais limiter l'influence de Drogba à ces quelques lignes et statistiques serait négliger l'importance du joueur de 33 ans. Quand les Eléphants, le surnom de l’équipe nationale ivoirienne, sont dans la panade, c'est bien souvent de l'ancien Marseillais, devenue une idole de l'exigeant stade Vélodrome en une petite saison à peine (2003-2004), que vient la lumière. Comme l'explique le défenseur Souleymane Bamba à Afrik-foot:

«C’est notre capitaine. Et notre buteur. Je n’ai pas l’impression que nous soyons trop dépendants de lui. Nous nous tournons vers lui, c’est notre leader. Et il nous tire souvent des difficultés. Mais la Côte d’Ivoire a tellement de grands joueurs...»

Didier Drogba, capitaine et buteur de la sélection ivoirienne, reste néanmoins le plus grand de tous. La tête de proue, l'idole de tout un continent —au même titre que le Camerounais Samuel Eto'o. Face au Bénin, lors des éliminatoires de la Coupe d’Afrique des nations 2012, c'est lui qui met les mains dans le cambouis pour signer un doublé salvateur (2-1). Idem au retour, où il jaillit du banc pour passer les Ecureuils béninois à la moulinette (2-6).

Un footballeur pour la paix

Mais l'apport de Drogba ne se limite pas au pré vert d'un terrain de football. Quand «Gbagbadè» parle, on l'écoute. Ce n'est pas pour rien que le Time Magazine en a fait l'une des cent personnalités les plus influentes en 2010. Aux côtés des politiques (Lula, Sarah Palin, Barack Obama, Christine Lagarde...), des artistes (Jet Li, Ben Stiller, Conan O’Brien, Neil Patrick Harris...), des penseurs (Victor Pinchuk, Steve Jobs, Amy Smith...), l'Ivoirien est le seul footballeur du palmarès. Mais ce n’est pas pour ses qualités techniques que le buteur de Chelsea est nommé.

«A la Coupe du monde 2006, lorsque son pays est ravagé par la guerre civile, il est à l’initiative d’une déclaration des Éléphants appelant à la paix. Beaucoup lui créditent le calme qui s’en est suivi et qui a permis à la réconciliation de démarrer.

Lors d’un match en mars dernier, 22 personnes sont mortes dans un crash alors qu’elles venaient voir jouer leurs héros. Après le match, Drogba décide de donner chaque dollar qu’il gagne grâce à ses sponsors à une association caritative qui œuvre pour construire des hôpitaux dans le pays», explique le magazine américain.

Car Didier Drogba est un homme respecté. Plus qu'un simple joueur de football, il a un rôle politique essentiel. Drogba, le Bété, comme Gbagbo, transcende les opinions et les différences. C’est un faiseur de paix, qui a contribué à réconcilier le nord et le sud de la Côte d'Ivoire. Comme lors de la qualification de la Côte d'Ivoire à la coupe du Monde 2006, la première de l'histoire, où le buteur de Chelsea se met à genou devant les caméras de TF1.

«Ivoiriennes, Ivoiriens, on vous a prouvé aujourd'hui que toute la population de la Côte d'Ivoire peut cohabiter, peut jouer ensemble pour un même objectif. Aujourd'hui, on vous le demande à genoux: un pays qui a toutes ces richesses ne peut pas sombrer dans la guerre comme cela.»

Il est à genoux, aux côtés de Touré du Nord, de Boka du Sud, de Barry dont les parents sont guinéens. Didier Drogba poursuit:

«S'il vous plaît, déposez tous les armes. Organisez des élections, et tout ira mieux.»

Drogba l'idole

Au milieu de la circulation d'Abidjan, on voit des bus couverts de slogans à la gloire du footballeur ivoirien: «Didier est grand», «Merci Didier». A Abidjan, on entend souvent dire que c'est grâce à Drogba si les armes se sont tues. Le terme «drogbacité» sert à résumer les valeurs qu'il incarne: la modestie, la générosité, la tolérance.

Désormais, depuis son déplacement à Bouaké, la capitale des rebelles, il est une icône, à l'image de Mandela. Les Nations unies le nomment même ambassadeur de bonne volonté et les Ivoiriens se demandent s'il ne devrait pas se porter candidat à l'élection présidentielle.

«Ce n'est pas possible, analyse Drogba, que le destin de tout un pays dépende d'un footballeur.»

Sportif à la conscience sociale et politique vivace, Drogba est vénéré comme un saint. Et, même quand il joue, le natif d'Abidjan n'oublie pas la Côte d'Ivoire. Après son doublé face au Bénin, lors d'un match délocalisé à Accra en raison des troubles liés à l'élection présidentielle, la première pensée de Drogba est pour son pays.

«On a gagné pour tous les Ivoiriens. Arrêtez maintenant, nous voulons la paix, on a gagné pour vous, il faut que la paix revienne en Côte d'Ivoire, on fera tout pour ça.»

Didier Drogba portait un t-shirt blanc avec l'inscription «Pour la paix en Côte d'Ivoire» .

Nicholas Mc Anally

slateafrique.com/

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