12 juillet, 2011

Une Europe à pleurer

Les marchés financiers ont enregistré lundi une véritable déroute, en raison, une nouvelle fois, des inquiétudes sur les dettes européennes. Les dirigeants ne sont pas à la hauteur. Session de rattrapage pour les Nuls.

Déprime, déroute même des marchés financiers ce lundi. La zone euro aujourd’hui ressemble à une copropriété d’immeuble qui se déchire pour savoir qui va payer la fuite d’eau qu’on a laissé couler trop longtemps, dont l’origine n’est pas claire, avec une copropriété qui, en plus, n’a pas de syndic !

D’abord les faits. La journée de lundi a été difficile, la plus difficile depuis un an. Les Bourses ont dégringolé – d’environ 4% à Lisbonne et Milan, de près de 3% à Paris, d’un peu plus de 2% à Francfort. A Paris, la Société Générale, la BNP et le Crédit Agricole ont chuté de 6 à 8%. La raison immédiate de ce vent très très frais est la tension sur les taux d’intérêt, entre les banques, et entre les marchés et les Etats. Les taux à dix ans sont montés au plus haut depuis la création de la zone euro en Espagne et en Italie.

Quelles sont les causes profondes de cette panique ? Essayons la crise pour les Nuls (et je me range dans cette catégorie tant c’est compliqué) . Il y a l’inquiétude sur la situation politique en Italie. Mais le fond de l’affaire reste le flottement européen, désespérant, pitoyable (osons le mot) face aux pays qui ne rembourseront pas leurs dettes. La Grèce sûrement, l’Espagne peut-être, voire l’Italie. Un engrenage est en route.

Sur la Grèce, la polémique porte toujours sur la participation du secteur privé à un nouveau plan de sauvetage. Pour la BCE, seuls les Etats doivent payer, sinon il y aura un effet domino et cela va mal se terminer ; les Allemands et les Néerlandais disent : les banques qui ont prêté à la Grèce ont leur part de responsabilité, elles doivent payer, tant pis si on prend le risque de contagion ; et les Français, eux, proposaient un compromis.

Problème, l’agence de notation Standard & Poor’s a taclé sèchement ce compromis. Selon elle, une participation volontaire du privé à une nouvelle aide grecque ne trompe personne, cela va coûter cher aux banques.

Sur le fond, la logique allemande a la morale pour elle ; il n’y a pas de raison de céder au chantage des marchés, dont le raisonnement ultime voudrait que les contribuables allemands renflouent l’Europe entière. Mais, en fait, c’est plus compliqué. Certains établissements financiers européens n’ont pas digéré la crise de 2008 et une panique générale les mettrait à genoux. Faut-il prendre des risques énormes pour que les créanciers privés paient 30 milliards sur les 300 de la dette grecque ? La morale n’est, hélas, pas le chemin le plus sûr.

Donc, impossible à dire comment en sortira-t-on tant on ballote depuis un an entre l’optimisme et le pessimisme. Cette nuit, après huit heures de réunion, les ministres des Finances se sont séparés, à Bruxelles, sans solution claire. Ils ont juste promis de renforcer le fonds de secours. Cela n’est absolument pas à la hauteur.

Quatre choses sont désormais claires.


- Un : il manque dramatiquement un vrai patron (un syndic ou un architecte) à l’Europe.

- Deux : les Européens donnent l’impression de baisser les bras et de ne plus exclure totalement une sortie de la Grèce de l’euro.

- Trois : il est tentant d’accuser les agences de notations et un certain nombre de spéculateurs anglo-saxons d’attiser le feu et de jouer contre l’euro ; ce n’est peut-être pas faux, mais les dirigeants européens n’ont qu’à s’en prendre à eux-mêmes : ils avaient annoncé des réformes qui ne sont pas venues.

- Quatre : si une solution est trouvée, les contribuables français, comme les autres, doivent s’attendre à ce que la Grèce leur coûte des vrais milliards d’euros, pas des milliards virtuels comme jusqu’à maintenant. Le plus probable est que cela se termine comme cela. Le pire, c’est ce qu’il faut espérer.

DOMINIQUE SEUX
blogs.lesechos.fr

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