05 juin, 2011

L’islam de France plus divisé que jamais

Près de 5 000 délégués sont appelés aujourd’hui à voter pour élire leurs représentants au Conseil français du culte musulman. Dans quinze jours, cette instance en crise aura un nouveau président.Les 5 000 délégués appelés à voter aujourd’hui représentent 1 000 lieux de culte en France.

Les 5 000 délégués appelés à voter aujourd’hui représentent 1 000 lieux de culte en France.

Jean-Pierre Chevènement en avait rêvé, s’est targué de l’avoir mis en place. Mais aujourd’hui, la machine est enrayée. En portant sur les fonds baptismaux le Conseil français du culte musulman (CFCM) en 2003, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, espérait faire de cette instance l’incarnation d’un nouvel islam de France, qui aurait été l’interlocuteur unique des fidèles musulmans avec les pouvoirs publics.

Mais après huit années d’existence, et alors que les élections de ses représentants se tiennent aujourd’hui avant la désignation de leur président le 19 juin, le CFCM traverse une crise sans précédent. Elle met à jour les tensions entre les divers mouvements de l’islam en France. Elles sont telles que deux d’entre eux appellent à boycotter le scrutin. Cela risque de réduire le CFCM à ce que beaucoup redoutent qu’il ne soit déjà : une coquille vide.

Des mouvances plus désunies que jamais. En France, les principaux courants de l’islam demeurent marqués par l’influence qu’ont sur eux différents pays étrangers. Proche de l’Algérie, la Fédération nationale de la Grande Mosquée de Paris (FNGMP) bénéficie d’un véritable rayonnement historique derrière son leader, Dalil Boubakeur, mais souffre d’un manque de relais en régions. Au contraire, le Rassemblement des musulmans de France (RMF), proche du Maroc, a déjà pu compter sur la mobilisation de ses troupes, puisque c’est l’un de ses dirigeants, Mohammed Moussaoui, qui dirige actuellement le CFCM.
Les musulmans turcs sont également représentés, au sein du Comité de coordination des musulmans turcs de France. Enfin, l’UOIF (Union des organisations islamistes de France), proche des Frères musulmans, n’a jamais vu d’un bon œil la création d’une instance supérieure, qu’elle soupçonne de trop frayer avec le pouvoir politique.

Un mode de représentativité critiqué. Pour définir les critères d’élection des représentants du CFCM, il a été décidé, lors de sa création, de se fonder sur la superficie des lieux de culte. Plus l’édifice est grand, plus ses fidèles désignent de délégués (près de 5000 personnes votent aujourd’hui, représentant plus de 1000 lieux de culte). Un critère a priori objectif, mais qui ne passe pas auprès de tout le monde. Ainsi, comme en 2008, Dalil Boubakeur et les siens, outrés par « l’iniquité, l’injustice, et le manque de représentativité des critères retenus », ont décidé de boycotter les élections du CFCM, tout comme l’UOIF. Soit deux des plus grands mouvements de France!

Des dossiers qui avancent peu. Charte nationale de la certification halal, formation des imams en France, Fondation pour les œuvres de l’islam en France, censée certifier les fonds nécessaires à la construction de mosquées : autant de projets loin d’être aboutis pour le CFCM. Son équipe sortante — qui a toutes les chances d’être réélue, faute de challenger — souligne, elle, son bilan « honorable », en mettant notamment à son crédit l’augmentation des carrés musulmans dans les cimetières, la mise en place d’un suivi des actes antimusulmans et le développement du dialogue avec les instances des autres religions de France.
Le Parisie

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