27 mai, 2011

LIBYE : L’UA peut-elle sauver le soldat Kadhafi ?

L’Union africaine a repris son bâton de pèlerin pour conjurer la crise libyenne. Après une première tentative qui s’est avérée infructueuse, cette dernière sera-t-elle la bonne ? Tout dépendra de la feuille de route que l’organisation panafricaine présentera aux protagonistes. Le cessez-le feu, la transition et les élections qu’elle préconise comme processus de sortie de crise ne posent pas de problème aux deux camps. Un seul point avait bloqué les négociations précédentes : le sort de Mouammar Kadhafi et de son clan. Le Conseil national de transition est prêt à tout accepter, sauf la présence de Kadhafi aux affaires. L’UA a-t-elle intégré cette donne essentielle dans ses nouvelles propositions ?

Thabo M’Beki, l’ex-président sud-africain, qui se présente comme le missi dominici de l’UA pour ce second round, n’a pas en tout cas exclu l’idée d’intégrer le départ du « Guide » dans les négociations. A défaut de pouvoir sauver le régime, il faut chercher au moins à sauver ses dirigeants. Si telle est la nouvelle option de l’UA, elle est plus réaliste. Car deux mois après l’intervention de l’OTAN (Organisation du traité de l’Atlantique nord), le « Guide » a perdu de sa superbe. Ce bédouin attaché aux grands espaces où il plantait sa tente, est aujourd’hui reclus dans un « bunker », à la façon du tristement célèbre Laurent Gbagbo. C’est déjà la pire des humiliations pour Kadhafi. Mais lui au moins a la chance de pouvoir jouir d’abris bien protégés.

Encore heureux qu’on lui propose par ailleurs un exil doré plutôt que les geôles d’un bagne ! Et ces centaines de Libyens tués par ses bombardements ou condamnés à l’exil ? Songe-t-il un seul instant à l’enfer qu’il leur fait vivre ? La seule concession que l’on peut faire aujourd’hui à un tel dirigeant, c’est de lui montrer la porte de sortie. Il faut donc espérer que l’UA aura la clairvoyance et le courage de le faire savoir au dirigeant libyen. En tout état de cause, il y va de la crédibilité déjà fort entamée de l’organisation panafricaine qui semble dépassée par la soudaine aspiration des populations nord-africaines à la démocratie.

Depuis le déclenchement du printemps arabe dont deux pays africains ont été les pionniers, l’UA n’est pas encore parvenue à se mettre au diapason de la nouvelle donne. D’où ses silences embarrassés ou, quand elle ose agir comme dans le cas libyen, ses interventions ratées. Mais on peut comprendre que dans une Afrique majoritairement dirigée par des chefs d’Etat mal élus, cette forme de solidarité soit toujours de mise. C’est le fameux syndicat des chefs d’Etat. L’évolution actuelle du continent, marquée par des poussées de fièvre un peu partout, ne laisse vraiment pas le choix à la nomenklatura politique. Elle doit s’incliner devant la volonté populaire ou prendre le risque d’être emportée par la bourrasque.

Les Occidentaux n’ont pas ce complexe démocratique qui leur causerait des remords. Ils peuvent donc agir en toute quiétude, tout en sachant qu’on ne les critiquera pas au moins sur leurs pratiques politiques. Si l’Afrique devenait une démocratie globale, l’UA s’en porterait mieux. Elle ne souffrirait pas tant à faire de grands écarts face à des dictateurs comme Kadhafi. Mais voilà, il y a loin de la coupe aux lèvres…

Mahorou KANAZOE

Le Pays

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