20 mai, 2011

Le fossé se creuse entre Fillon et une partie des députés UMP

PARIS — Six mois après son maintien triomphal à Matignon grâce au soutien unanime des députés UMP, François Fillon voit le fossé se creuser avec une partie de ses troupes, échaudée par les polémiques sur le FN ou le RSA, et furieuse des mesures prises sur la sécurité routière.

Réaction épidermique ou malaise plus profond vis-à-vis du chef du gouvernement? M. Fillon a été chahuté comme jamais depuis 2007, mardi matin, dans le huis clos de la réunion du groupe UMP à l'Assemblée.

"Manque d'écoute", "mesures technocratiques", "décisions nullissimes", les critiques ont fusé en direction d'un François Fillon très énervé, de la part de députés UMP qui figuraient pourtant parmi ses soutiens face à "l'omni-président" Nicolas Sarkozy, et qui avaient oeuvré à son maintien en novembre au détriment du centriste Jean-Louis Borloo.

En cause: les mesures annoncées le 11 mai lors d'un Comité interministériel sur la sécurité routière, réuni en urgence à Matignon après la hausse du nombre de décès sur les routes. A un an de la présidentielle et des législatives, la suppression des avertisseurs et des panneaux signalant la présence de radars ne passe pas auprès de députés inquiets pour leur réélection.

"Il y a, c'est vrai, une agitation (...). Des bémols ont été émis jusque dans les rangs de soutiens traditionnels du Premier ministre," admet un député filloniste, qui assure que des critiques avaient été relayées dès lundi à Matignon par les plus proches parlementaires de M. Fillon.

Dans l'entourage du Premier ministre, on assume l'impopularité générée. "On a eu des résultats mais ça ne suffit plus: dans ces cas-là, il y a parfois besoin de mesures qui frappent l'opinion", explique-t-on. Déterminé, comme Nicolas Sarkozy, à ne pas céder sur l'objectif de lutte contre l'insécurité routière, François Fillon devait s'employer vendredi matin à Linas-Montlhéry (Essonne) à expliquer ces mesures, dont une partie va rapidement entrer en vigueur.

Il n'en reste pas moins que, pour Gaël Slimane, de l'institut BVA, "faire du punitif sur l'automobile et les deux-roues, c'est extrêmement risqué. C'est même "une grave erreur", selon lui.

A Matignon, on veut toutefois croire qu'au sein du groupe UMP, "il y a aussi des députés qui défendent les mesures. Mais on les entend moins".

"A 90% les députés UMP sont contre", rétorque un membre du collectif de la Droite populaire. "Mardi matin, Fillon s'est raidi. Le fait de se raidir à ce point est surprenant", glisse-t-il.

Ces dernières semaines, le fossé s'était déjà creusé avec la frange des députés UMP prise à rebrousse-poil sur les consignes de vote dans l'entre-deux tours des cantonales, le débat sur la laïcité ou celui sur le RSA. "Avec Fillon, les liens se sont distendus", relève l'un d'eux, qui ajoute: "ça n'engage que moi, mais je pense qu'il serait temps qu'il parte".

Une hostilité encore très minoritaire mais qui tranche avec la standing ovation qui avait salué son discours de politique générale à l'automne.

Depuis, le chef du gouvernement a été exhorté par l'Elysée à s'exposer davantage, au risque de déplaire.

"La fin de l'unanimité, il savait que fatalement ça arriverait un jour ou l'autre", assure un autre député proche de François Fillon. C'est d'ailleurs pour cela que le Premier ministre, pourtant très soucieux de l'unité du parti, s'est résigné à mobiliser un cercle de fidèles, note-t-il.

M. Fillon "n'a pas assez de relais", estime néanmoins un responsable parlementaire UMP. "Il a eu son heure de gloire quand il a été renommé à Matignon, depuis il n'a que des emmerdes".

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