23 avril, 2011

Tchad/présidentielle: les opposants tentent de mobiliser sur le boycott

AFP/Archives

Le président tchadien Idriss Deby lors d'une visite à Abidjan, le 21 février 2011

"Un seul mot d'ordre, le boycott à 100%", scande devant quelques milliers de personnes enthousiastes à N'Djamena samedi l'un des trois principaux opposants qui ont suspendu leur participation à la présidentielle de lundi, Saleh Kebzabo.

"Je vais vous poser une question: vous avez reçu les billets de 1.000 (FCFA, environ 1,5 euros), 1.000, 1.000?" pour venir au meeting, interroge l'ex-candidat de l'Union nationale pour la démocratie et le renouveau (UNDR, 9 sièges à l'Assemblée nationale), sous-entendant que de l'argent est distribué pour attirer les gens aux rassemblements du président Idriss Deby Itno qui devait tenir un dernier meeting dans l'après-midi.

"Pauvres nous sommes", poursuit-il dans la chaleur accablante, sur un terrain poussiéreux du 3e arrondissement de N'Djamena. L'auditoire est jeune et constitué quasi exclusivement d'hommes: "nous sommes là parce que vous êtes là, vous avez bravé toutes les menaces".

M. Kebzabo, Wadal Abdelkader Kamougué (URD, Union pour le renouveau et la démocratie, 7 sièges) et Ngarlejy Yorongar (FAR, Fédération action pour la République, 4 sièges) s'étaient vu interdire une campagne d'information sur les raisons qui les ont poussés à appeler au boycott "sous prétexte que nous ne sommes pas candidats alors que nous avons suspendu (nos candidatures)", avait expliqué M. Kamougué.

Le 18 avril, ils avaient annoncé leur intention de "braver" l'interdiction pour tenir ce meeting.

AFP

La biographie du président tchadien Idriss Deby

Dans un "appel au peuple tchadien à ne pas voter le 25 avril", lu par un porte-parole lors du meeting, les trois opposants jugent que "Voter le 25 avril, c'est se suicider. C'est s'autodétruire", et invitent à "ne pas cautionner le brigandage électoral en cours", également qualifié de "cirque électoral". Ils avaient notamment demandé de nouvelles cartes d'électeurs pour la présidentielle après les législatives de février.

Le suivi du boycott est devenu l'un des principaux enjeux de l'élection alors qu'en l'absence des poids lourds de l'opposition, Deby est certain de remporter le scrutin. Vendredi, il a assuré qu'"il y aura un taux de participation supérieur au taux des élections législatives". Il a aussi estimé que le scrutin serait "crédible", accusant les opposants de refuser le scrutin parce "qu'ils sentent qu'ils seront battus".

Au meeting de l'opposition, les Tchadiens ne se sont pas déplacés en masse. "Les gens craignent pour leur vie, c'est un Etat policier, par peur de représailles", estime Chris dans la foule électrisée, taisant son nom de famille.

"Si les gens ne viennent pas, c'est qu'on est sous-informés, moi-même en passant j'ai vu les gens, sinon je n'aurais pas su. Ils ont empêché que le message passe à la radio", assure Jean-Noël.

Il ajoute: "nous sommes soumis à une dictature, soumis à la France. Si la France ne soutenait pas Deby, il n'aurait pas été élu trois fois", en 1996, 2001 et 2006 lors d'un scrutin déjà boycotté.

Les Tchadiens présents au meeting veulent tous prendre la parole pour égrainer la liste de ce qu'ils reprochent au pouvoir: chômage, notamment des jeunes, manque d'électricité et d'eau potable, misère, prix qui flambent, corruption. Ils parlent de leur volonté de changement après 20 ans sous le même régime.

Ngarlejy Yorongar, "Yoro", parle en dernier. La foule lui semble acquise lorsqu'il lance en écho aux révolutions arabes: "ce n'est pas nous, les vieux, qui allons faire la révolution, c'est vous".

Outre Deby, deux autres candidats restent en lice: le ministre Albert Pahimi Padacke, président du Rassemblement national pour la démocratie (RNDT-Réveil) et l'avocat-opposant Nadji Madou, président de l'Alliance socialiste pour un renouveau intégral (ASRI).

4,8 millions de Tchadiens sont appelés à élire leur président pour un mandat de cinq ans.

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