19 avril, 2011

Syrie: le régime fait des concessions mais reste ferme face aux manifestants

DAMAS (AFP)

SANA/AFP

Photo, publiée par l'agence syrienne Sana le 19 avril 2011, de funérailles à Homs, où des manifestants ont été tués

Le gouvernement syrien a annoncé mardi une série de mesures censées desserrer son emprise sécuritaire sur le pays, approuvant notamment une projet de loi pour la levée de l'état d'urgence, tout en avertissant qu'il ne tolèrerait aucune nouvelle manifestation contre le régime.

Dans une apparente tentative d'apaiser le mouvement de contestation qui s'amplifie à travers le pays et quelques heures après de nouveaux morts lors de la dispersion d'un sit-in, le cabinet a également approuvé l'abolition de la Haute cour de sûreté de l'Etat, une juridiction d'exception, et la réglementation du droit de manifester.

Le Parlement doit tenir une séance extraordinaire du 2 au 6 mai pour ratifier ces projets de loi visant à "libéraliser le régime", a indiqué un responsable syrien à l'AFP.

Ces annonces surviennent quelques heures après que les forces de sécurité ont réprimé une manifestation de plusieurs millier de personnes à Homs (centre), tuant au moins quatre personnes selon un militant des droits de l'Homme.

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Le président syrien Bachar al-Assad à la télévision d'Etat le 16 avril 2011

Samedi, le président Bachar al-Assad avait promis d'abroger "dans une semaine maximum" la loi d'urgence, qui réduit fortement les libertés publiques depuis 1963.

Cette abrogation était l'une des principales revendications du mouvement de contestation déclenché le 15 mars dans la foulée des révoltes arabes.

Mais l'avocat et militant des droits de l'Homme Haytham al-Maleh a minimisé les mesures annoncées. Selon lui, la levée de l'état d'urgence "passe par un décret présidentiel en vertu de l'article 101 de la Constitution, ou par une décision du Parlement".

"La levée de l'état d'urgence ne nécessite pas de loi", a souligné l'avocat, affirmant que ce qui doit être aboli ou amendé est la loi d'urgence" elle-même.

Quelques heures avant l'annonce de ces mesures, le ministère de l'Intérieur avait prévenu qu'il n'accepterait aucune nouvelle manifestation, "sous n'importe quel slogan".

En dépit de la mise en garde du ministère, une centaine d'étudiants ont observé mardi un sit-in pendant un quart d'heure à l'Université de Damas, appelant à la fin de l'"effusion de sang", selon un militant.

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Carte de Syrie situant les villes où de nombreux rassemblements ont lieu pour réclamer la chute du régime de Bachar al-Assad

A Banias, plus de 2.000 personnes ont manifesté pour protester contre les propos des autorités qui avaient accusé lundi soir des "groupes salafistes" de mener une "rébellion armée" à Banias et à Homs, selon des témoins.

Le cheikh Anas al-Ayroute, une des figures du mouvement de contestation à Banias, s'est exprimé devant la foule réunie sur une des places de la ville. Joint au téléphone par l'AFP il a affirmé que les manifestations à Banias "vont se poursuivre pour réclamer la liberté".

Dans un communiqué signé des "habitants de Banias", ces derniers ont dénoncé "un nouveau mensonge" des autorités. "Nous sommes sortis dans la rue pour réclamer un Etat civil moderne où règne la justice et la dignité (..) et des citoyens de toutes les confessions y ont participé".

A Homs, troisième ville du pays, les manifestants rassemblés pour un sit-in toute la nuit de lundi à mardi ont appelé au départ de M. Assad.

Les autorités ont affirmé que cinq officiers de l'armée et trois enfants avaient été tués ces dernières 24 heures par des "groupes criminels armés" dans la région de Homs.

Mardi, la presse officielle a aussi accusé Washington d'être "derrière" les manifestations. "A tous ceux qui parient (sur la chute du régime), nous disons: +ne pariez pas car vous serez perdants+", a lancé le quotidien As-Saoura.

Les Etats-Unis ont réclamé mardi la fin des violences contre les manifestants en Syrie.

"Le gouvernement doit engager d'urgence des réformes plus importantes, et cesser d'utiliser la violence contre des manifestants pacifiques", a déclaré Mark Toner, porte-parole de la diplomatie américaine. "Nous avons entendu beaucoup de mots et vu peu d'action" de la part du président Assad.

A Londres, le ministre des Affaires étrangères a appelé "les forces de sécurité syriennes à faire preuve d'un maximum de retenue", estimant que "la décision aujourd'hui pour la levée de la loi d'urgence est un pas dans la bonne direction", tout en appelant les autorités syriennes à "faire plus".

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