15 mars, 2011

Un mois après le début de la révolte, Kadhafi a repris l'avantage en Libye

AFP

Rebelles à Benghazi le 15 mars 2011.

Les forces pro-Kadhafi reprenaient l'avantage en Libye, encerclant la ville rebelle d'Ajdabiya (est), un mois après le début d'une révolte qui s'est transformée en guerre civile, sans que le G8 ne parvienne mardi à s'accorder sur une intervention militaire.

Pour les insurgés, il n'y a que "deux possibilités: se rendre ou fuir", a assuré le colonel Mouammar Kadhafi dans un entretien au quotidien italien Il Giornale, excluant toute négociation mais promettant de ne pas tuer ceux qui se rendraient.

Les forces gouvernementales ont lancé l'aviation et l'artillerie lourde contre Ajdabiya, noeud de communication stratégique et dernier verrou tenu par les rebelles avant le fief de l'opposition Benghazi, 160 km plus au sud, coupant la route entre les deux villes.

Selon la télévision officielle libyenne, "la ville d'Ajdabiya est totalement contrôlée (par les forces loyalistes, NDLR) et elle est en train d'être purgée des gangs armés".

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Un rebelle blessé à Ajdabiya, a été hospitalisé le 15 mars 2011.

Des centaines de civils et d'insurgés ont fui Ajdabiya vers Benghazi à bord de voitures, camions et pick-up, a constaté un journaliste de l'AFP.

"Il y a eu beaucoup de bombes, au moins cinq", dit Saïd, 42 ans. "J'ai pris ma famille, le plus d'affaires possible et on est parti. Si on était resté, on serait mort maintenant", affirme-t-il.

"Bientôt Ajdabiya sera sûre et calme comme elle l'était", affirmait un SMS envoyé par les autorités libyennes sur les téléphones mobiles.

Les combats ont fait au moins trois morts et une quinzaine de blessés, selon des médecins, en plus de deux morts reçus pendant la nuit.

"A moins que l'Otan n'intervienne, il (Kadhafi, NDLR) va tous nous massacrer", a déclaré le docteur Souleimane al-Abeidi.

"Nous sommes des civils. Que pouvons-nous faire contre des armes lourdes? Contre des chars, des roquettes Grad et des navires de guerre?", insiste ce médecin de 43 ans, alors que des confrères s'énervent contre les insurgés qui accompagnent des blessés, les accusant d'abandonner leur poste.

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Carte de localisation des combats entre pro et anti-Kadhafi

Selon des habitants, des combats sporadiques se poursuivaient à Brega, site pétrolier à 80 km à l'ouest, mais la ligne de front proprement dite était désormais aux portes d'Ajdabiya.

Lundi, des avions avaient largué des tracts sur Ajdabiya: "Nous arrivons pour vous libérer des terroristes", annonçaient-ils, tout en prévenant que la ville ferait l'objet d'une fouille maison par maison pour en extirper les "rats".

Les grandes puissances réunies au sein du G8 à Paris ont écarté faute de consensus l'option militaire pour ralentir les forces de Mouammar Kadhafi, se bornant à promettre pour cette semaine une nouvelle résolution à l'ONU sur des sanctions renforcées.

Les pays de l'Otan ont examiné pour la première fois les options militaires à leur disposition si l'alliance décidait d'intervenir en Libye, bien que la probabilité d'une résolution de l'ONU les y autorisant diminue.

Le ministre français des Affaires étrangères Alain Juppé a qualifié de "dépassée" l'idée d'instaurer une zone d'exclusion aérienne en Libye, voulue à l'origine par Paris et Londres ainsi que la Ligue arabe et réclamée par l'opposition libyenne.

Il a évoqué "des frappes ciblées" sur des "objectifs militaires", tout en affirmant que le Conseil de sécurité de l'ONU était bloqué en raison de l'opposition des Chinois, tandis que les Américains n'ont toujours pas défini de position.

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Un employé de l'hôpital nettoie la voiture dans laquelle un rebelle est mort, surpris par une attaque, à Ajdabiya, le 15 mars 2011.

Barack Obama a de nouveau appelé le dirigeant libyen à partir, mais sa secrétaire d'Etat Hillary Clinton a refusé de promettre une aide militaire aux rebelles, même sous la forme de livraisons d'armes.

Un groupe de puissances comprenant les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la France espère présenter à l'ONU dès mardi un projet de résolution durcissant les sanctions contre la Libye.

Le temps presse pourtant pour les insurgés. L'armée a annoncé dimanche qu'elle était en marche "pour purger" l'ensemble du pays.

Dans l'Ouest, les rebelles ont annoncé qu'ils contrôlaient toujours Misrata, théâtre de violents combats la semaine dernière à 150 km à l'est de Tripoli, mais qu'ils s'attendaient à une offensive des forces gouvernementales rassemblées dans une caserne proche.

A Zouara, ville située à 120 km à l'ouest de Tripoli et reprise lundi par les pro-Kadhafi, des partisans du régime ont manifesté selon la télévision et des coups de feu retentissaient, "probablement des tirs en l'air pour faire peur aux habitants", selon un témoin proche de la rébellion.

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Le ministre français des Affaires étrangères Alain Juppé, le 15 mars 2011 au sommet du G8 à Paris.

Depuis le 15 février, la répression sanglante de l'insurrection a fait au moins des centaines de morts et poussé plus de 250.000 personnes à fuir le pays.

Le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a appelé les combattants à laisser fuir les civils, soulignant le nombre inhabituellement faible de femmes et enfants arrivant aux frontières avec l'Egypte et la Tunisie.

Les autorités libyennes ont adressé une mise en garde aux journalistes "entrés illégalement" en Libye, affirmant qu'elles n'étaient pas responsables de leur sécurité.

Selon l'Agence internationale de l'énergie, la production de pétrole libyen, habituellement de 1,6 million de barils par jour, était presque à l'arrêt ces derniers jours.

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