12 mars, 2011

Libye: le régime veut reconquérir l'Est, rapprochement Occident/opposition

AFP

Les rebelles, opposés au pouvoir libyen, prient ensemble à quelques kilomètres de Ras Lanuf, en Libye, le 11 mars 2011.

Les forces fidèles à Mouammar Kadhafi continuaient vendredi de bombarder des positions rebelles dans l'est de la Libye, alors que l'Occident affichait son rapprochement avec l'opposition, qui a perdu deux villes ces derniers jours.

Au 25e jour de l'insurrection, le président américain Barack Obama a annoncé qu'il allait se doter d'un représentant auprès de la rébellion libyenne.

Les dirigeants européens ont de leur côté qualifié le Conseil national de transition de l'opposition (CNT), basé à Benghazi (est), d'"interlocuteur politique".

La France a reconnu jeudi le CNT comme "le représentant légitime du peuple libyen". Tripoli a riposté vendredi en annonçant la suspension de ses relations diplomatiques avec Paris.

Sur le terrain, les forces loyalistes ont lancé au moins deux attaques aériennes à l'est de Ras Lanouf, touchant un poste de contrôle des insurgés et une raffinerie, selon des journalistes de l'AFP.

Cette ville pétrolière stratégique, au sud-ouest de Benghazi, fief de la rébellion, avait été pendant une semaine la base avancée des rebelles dans l'Est. Mais les insurgés avaient dû l'abandonner, après des bombardements intenses jeudi des forces pro-Kadhafi.

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Un rebelle marche à quelques kilomètres de Ras Lanuf, sur une zone de combat, le 11 mars 2011.

"Leur suprématie est totale. Ils ont tiré depuis des bateaux, et ils contrôlent les airs", a expliqué un médecin à Brega, ville située plus à l'est.

Selon une source médicale, les combats de jeudi à Ras Lanouf ont fait plus de 10 morts et des dizaines de blessés parmi les insurgés. Vendredi, un journaliste de l'AFP a aussi vu au moins cinq corps évacués de cette ville.

Les intenses bombardements qui ont touché Ras Lanouf ont bloqué la progression des insurgés partis de Benghazi à la conquête des villes côtières jusqu'à Tripoli.

Samedi dernier, les insurgés avaient progressé jusqu'à Ben Jawad, une localité à quelques dizaines de kilomètres à l'ouest de Ras Lanouf, mais en avaient été chassés dès le lendemain par les pro-Kadhafi dont les frappes n'ont cessé de s'intensifier depuis.

A Zawiyah ( 40 km à l'ouest de Tripoli), les forces du régime fêtaient vendredi leur victoire dans ce bastion rebelle tombé officiellement mercredi après plus de deux semaines de résistance acharnée, selon un journaliste de l'AFP.

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Carte de localisation des combats entre pro et anti-Kadhafi

Selon des secouristes à la frontière tunisienne, un homme arrivé de Zawiyah dans la nuit a raconté que la situation y était "catastrophique" et qu'"il y avait des morts partout".

Ailleurs dans le pays, les rebelles contrôlaient toujours Misrata (150 km à l'est de Tripoli) et plusieurs villes du Nord-Ouest, en particulier dans la région montagneuse du Jabal Al-Gharbi, selon des témoignages.

A Benghazi, les rebelles demeuraient déterminés à combattre les hommes de Kadhafi, en dépit des revers enregistrées ces derniers jours.

"Nous n'avons pas peur de cette armée composée à 90% de mercenaires. Nous pouvons les battre", assure Khaled, oncle de Fathi Ali, un insurgé de 21 ans tué jeudi à Ras Lanouf et enterré vendredi.

Plus de 10.000 personnes se sont par ailleurs rassemblées dans cette ville pour réclamer le départ du colonel Kadhafi.

Lors d'un sommet à Bruxelles, les chefs d'Etat et de gouvernement des 27 pays de l'UE ont accepté de dialoguer avec l'opposition libyenne et évoqué prudemment une option militaire pour protéger les civils, même s'ils restent très divisés face à cette perspective.

Ils ont décidé d'étudier "toutes les options" possibles, dans une allusion à une éventuelle intervention militaire, mais en précisant qu'il faudrait "une nécessité démontrée, une base juridique claire et le soutien de la région".

Dans ce but, un sommet tripartite doit se tenir prochainement entre l'UE, l'Union africaine et la Ligue arabe, qui se réunit de son côté samedi au Caire mais sans autoriser les émissaires du dirigeant libyen à participer.

"Les dirigeants actuels (de la Libye) doivent abandonner le pouvoir sans délai", a en outre déclaré le président de l'UE Herman Van Rompuy à l'issue du sommet.

Aux Etats-Unis le président Obama, "préoccupé" par la capacité de Mouammar Kadhafi à se maintenir au pouvoir, s'est dit déterminé à "resserrer l'étau" sur le régime libyen.

Les Etats-Unis ont par ailleurs annoncé qu'ils étendaient leurs sanctions visant la famille de Mouammar Kadhafi à son épouse et à plusieurs de ses enfants, et à des membres de son gouvernement.

Plus isolé chaque jour sur le plan international, le colonel Kadhafi, au pouvoir depuis près de 42 ans, a menacé l'Europe de cesser de soutenir la lutte contre le terrorisme international et l'immigration clandestine.

Si "l'Europe n'appuie pas et ignore le rôle actif de la Libye dans la lutte contre l'immigration (...) la Libye sera obligée (...) de se retirer des efforts de lutte contre le terrorisme et de changer complètement sa politique envers Al-Qaïda", a-t-il affirmé, cité par l'agence officielle Jana.

Sur le plan humanitaire, à Ras Lanouf, des médecins ont appelé la Croix-Rouge internationale à l'aide. L'Organisation internationale pour les migrations a indiqué de son côté négocier avec les autorités libyennes l'envoi d'une mission humanitaire en Libye où des milliers d'immigrants attendent d'être rapatriés.

Depuis la mi-février, plus de 250.000 personnes ont fui la Libye pour les pays voisins, selon l'ONU, et la répression sanglante de la révolte a fait des centaines de morts.

Une mission humanitaire de l'ONU est attendue samedi en Libye pour évaluer les besoins humanitaires, a annoncé en soirée le vice-ministre libyen aux Affaires étrangères, Khaled Kaaim.

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