14 mars, 2011

L'Allemagne gèle le sursis accordé au nucléaire

AFP

La chancelière allemande Angela Merkel, le 14 mars 2011 à Berlin.

A deux semaines d'un scrutin régional où la question nucléaire pourrait lui coûter cher, la chancelière allemande Angela Merkel a annoncé lundi un moratoire sur l'allongement de la durée de vie des réacteurs atomiques, après les explosions au Japon.

"Nous allons suspendre l'allongement de la durée des vie des centrales nucléaires allemandes récemment adopté. Il s'agit d'un moratoire, et ce moratoire est valable pour trois mois", a annoncé la chancelière, réagissant à la menace nucléaire au Japon après les explosions dans une centrale endommagée par le séisme et le tsunami de vendredi.

Ce qui se passe au Japon "est une césure pour le monde entier, pour l'Europe et pour l'Allemagne", a-t-elle assuré. "Je le dis clairement : il n'y a pas de tabous en ce qui concerne l'examen des conditions de sécurité" dans les 12 centrales allemandes.

"La situation après le moratoire sera différente de celle avant le moratoire", a-t-elle encore insisté. "Nous ne pouvons pas faire comme si de rien n'était".

A la Bourse de Francfort, les poids lourds de l'énergie en Allemagne, EON et RWE, ont été sanctionnés, perdant respectivement 5,26% et 4,77% à la clôture dans un marché en baisse de 1,65%.

Deux réacteurs parmi les 17 que compte l'Allemagne devraient être immédiatement arrêtés, dont un dans le sud-ouest du pays où se déroule le 27 mars un scrutin régional crucial pour les conservateurs de Mme Merkel.

Cette décision née notamment des images "apocalyptiques" du Japon qui "nous laissent sans voix", selon la chancelière, intervient quatre mois et demi seulement après l'adoption par les députés d'une loi repoussant de 8 à 14 ans, selon les cas, la fermeture des centrales nucléaires.

Le ministre de l'Environnement, Norbert Röttgen, a indiqué pour sa part que la centrale de Neckarwestheim 1, au Bade-Wurtemberg (ouest), cesserait ses opérations dans le courant du trimestre puisque sa fermeture était prévue pour janvier, avant que la nouvelle loi sur la prolongation de la vie des centrales ne soit adoptée.

Les centrales "qui doivent fermer pendant la durée du moratoire sont celles qui n'auraient pu opérer sans prolongation de leur durée de vie", a-t-il déclaré.

Et "j'estime pour ma part que ce qui est retiré du réseau pendant la durée du moratoire ne reviendra plus sur le réseau", a ajouté le ministre.

Comme elle s'y était engagée pendant sa campagne électorale en 2009, Angela Merkel était ainsi revenue sur l'abandon définitif du nucléaire décidé en 2002 par son prédécesseur, le social-démocrate Gerhard Schröder. Avec son allié Vert, l'ancien dirigeant de gauche avait décidé de la fermeture définitive des centrales au plus tard vers 2020.

Ce sursis accordé au secteur nucléaire, inscrit dans le programme de gouvernement de Mme Merkel signé avec son partenaire minoritaire libéral (FDP), a relancé la contestation antinucléaire en Allemagne.

Elle s'est traduite par des manifestations massives à Berlin ou encore par une résistance farouche à un convoi de déchets nucléaires retraités en France et stockés dans le nord en novembre.

Un scrutin régional crucial dans le Bade-Wurtemberg doit avoir lieu le 27 mars. Bastion chrétien-démocrate depuis plus d'un demi-siècle, cette région prospère du sud-est de l'Allemagne pourrait basculer à gauche, avec l'appoint des Verts qui y ont également le vent en poupe.

Angela Merkel, dont le gouvernement a traversé une longue période d'impopularité depuis sa formation en octobre 2009, est engagée dans un marathon électoral : six élections régionales doivent encore être organisées d'ici à fin septembre.

L'opposition de son côté ne cesse de dénoncer une énergie nucléaire "incontrôlable" et a redoublé d'ardeur ces derniers jours.

Des veillées antinucléaires étaient prévues en début de soirée dans quelque 400 villes, notamment à Berlin devant la chancellerie.

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