21 mars, 2011

Haïti se surprend avec une élection présidentielle sans violences

PORT-AU-PRINCE (AFP)

AFP

Un membre du personnel d'un bureau de vote à Port-au-Prince, le 20 mars 2011

Les Haïtiens ont globalement voté dans le calme dimanche pour élire leur nouveau président, surprenant la communauté internationale habituée aux violences électorales dans le pays mais qui reste vigilante avant l'annonce des résultats préliminaires à la fin du mois.

Echaudées par les violentes manifestations après le premier tour de scrutin en novembre dernier, les autorités --du président René Préval au Conseil électoral provisoire (CEP)-- ont retenu leur souffle jusqu'à la fermeture des bureaux de vote dimanche soir, à 16h00 locales (21H00 GMT) en province, et 17H00 locales (22H00 GMT) à Port-au-Prince.

Mais, dans un pays où politique et violence vont souvent de pair, le président du CEP, Gaillot Dorsinvil, a pu sans trembler annoncer dans la soirée, que la "démocratie a triomphé".

"Cela n'était pas gagné d'avance. Certains éléments pouvaient perturber le bon déroulement des élections", a réagi lundi l'ambassadeur de France en Haïti, Didier Le Bret, lors d'un entretien accordé à l'AFP.

Les craintes s'articulaient principalement autour de deux facteurs: l'intervention dans le jeu politique des anciens présidents de retour d'exil Jean Bertrand Aristide et Jean-Claude Duvalier et la crainte de fraudes, supposées ou réelles.

Mais MM. Aristide et Duvalier ont brillé par leur absence en ce dimanche électoral. Et, singulièrement, aucun des deux adversaires, Michel Martelly et Mirlande Manigat, ne s'est aventuré à accuser l'autre camp d'avoir usurpé les élections.

De fait, le camp de M. Martelly, de loin le plus remuant et le plus bruyant, aurait été bien mal avisé de crier au loup. L'ancien chanteur, selon Robert Fatton, politologue à l'Université de Virginie aux Etats-Unis, pourrait avoir bénéficié d'un "raz-de-marée" dans les urnes, notamment à Cité Soleil, le plus grand bidonville d'Haïti où la violence est omni-présente.

Si le pays est resté calme, c'est aussi parce que le futur "président n'est pas un candidat du pouvoir", souligne l'inflent président des chambres de commerce d'Haïti, Réginald Boulos. "C'est une vraie alternance et c'est comme cela qu'on construit une démocratie (...) C'est un tournant pour Haïti".

Pour preuve: la vague d'euphorie qui a porté Michel Martelly dimanche matin lorsqu'il est allé glisser son bulletin dans l'urne au centre de vote installé au lycée de Pétion-Ville, dans la banlieue de Port-au-Prince.

Mais, prévient Laenec Hurbon, sociologue au CNRS, si M. Martelly semble l'avoir emporté, ce n'est pas tellement à cause de son programme, de droite, mais parce qu'il s'est posé en candidat de la rupture.

"Si Martelly est arrivé là, c'est par défaut. C'est un vote anti-Préval, contre la continuité. Les gens en avaient marre d'un gouvernement sans énergie, ni projet", a expliqué M. Hurbon, lors d'un entretien avec l'AFP.

Haïti devra encore attendre jusqu'au 31 mars au plus tard pour connaître les résultats provisoires.

Le CEP a demandé aux médias de s'abstenir de publier des résultats partiels, sources d'éventuelles violences.

La mission de l'ONU en Haïti (Minustah) a exhorté dans un communiqué "tous les candidats et leurs partisans à la patience et à la retenue, donnant ainsi un exemple de démocratie, car c?est l?avenir du pays qui est en jeu".

Reste à voir aussi si Jean Bertrand Aristide et Jean-Claude Duvalier continueront à garder le silence.

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