08 février, 2011

Tunisie: le gouvernement avance à petit pas, l'armée rappelle des réservistes

TUNIS (AFP)

AFP

Un Tunisien porte un bidon d'essence après l'annonce d'une grève des camionneurs, le 8 février 2011 à Tunis

Vote "hara-kiri" de l'Assemblée nationale, suspension du parti de Ben Ali, le gouvernement tunisien continue à assurer à petit pas la transition vers la démocratie mais la convocation des réservistes de l'armée vient rappeler la fragilité de la situation.

Le ministère de la Défense a appelé lundi soir les militaires partis en retraite entre 2006 et 2010 et les conscrits de fin 2008 et de 2009 à se présenter à partir du 16 février "dans les centres régionaux de conscription et de mobilisation les plus proches de leurs lieux de résidence".

Le ministère n'a toutefois donné aucune indication sur la raison de cette décision.

L'armée compte environ 35.000 hommes, des effectifs sans commune mesure avec ceux de la police du temps de Ben Ali (estimés à plus de 100.000 hommes) qui a été le fer de lance de la répression depuis la mi-décembre.

Deux cent trente-quatre personnes sont mortes et 510 ont été blessées en Tunisie depuis lors, a appris l'AFP mardi de source proche du gouvernement.

Selon cette source ayant requis l'anonymat, parmi ces 234 personnes figurent 8 policiers et 74 détenus qui sont décédés dans des prisons. Le 1er février, l'ONU avait fait état de 219 morts, dont 72 prisonniers, et 510 blessés.

Depuis la chute de Zine El Abidine Ben Ali le 14 janvier, le gouvernement de transition de Mohammed Ghannouchi est confronté à de fortes tensions et de nombreuses contestations, d'abord à Tunis puis un peu partout en province.

Mardi, entre 400 et 500 personnes ont pénétré dans le bâtiment du gouvernorat de Tunis pour réclamer du travail et des aides sociales.

A chaque poussée de fièvre, la police est absente et c'est l'armée qui rétablit puis maintient l'ordre, dernièrement à Kasserine, à Gafsa (centre-ouest) ou au Kef (nord-ouest).

AFP/Archives

Manifestants devant les bureaux du Premier ministre le 27 janvier à Tunis

Plusieurs ministres ont été jusqu'à évoquer ces derniers jours un "complot" contre la révolution, qui, selon eux, serait l'oeuvre de partisans ou hommes de main du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), le parti de l'ex-président.

Lors d'un débat lundi à l'Assemblée nationale, appelée à se saborder pour autoriser le président par intérim Foued Mebazaa à organiser la transition par décrets-loi, Mohammed Ghannouchi a d'ailleurs insisté sur les "dangers" qui menacent le pays car "il y a des personnes qui veulent faire revenir la Tunisie en arrière".

Pour cette première et houleuse séance depuis la chute de Ben Ali, 195 des 214 députés étaient présents. 177 ont voté pour le texte qui sera examiné mercredi par le Sénat, pour permettre au président par intérim d'avancer à marche forcée pour organiser le nouveau paysage politique en vue des élections présidentielle et législatives.

Ces scrutins sont prévus dans six mois mais aucune date précise n'a encore été annoncée par le gouvernement et de plus en plus de voix s'élèvent pour dire que ce délai n'est pas tenable.

"Le temps est précieux. Ces décrets-lois, la Tunisie en a vraiment besoin pour écarter les dangers", a plaidé lundi Mohammed Ghannouchi.

La veille, le gouvernement avait frappé un grand coup en décidant de suspendre le RCD, désormais interdit de toutes activités en prélude à une dissolution programmée par voie de justice.

Le temps presse aussi économiquement. Interrogé par le quotidien français Libération, le ministre du Développement régional Néjib Chebbi a évalué à 5 milliards de dinars (2,58 milliards d'euros) à terme les pertes durant la révolution qui a mis à bas le régime Ben Ali.

En Tunisie pour quelques heures, Le chef de la diplomatie britannique William Hague a exprimé mardi à Tunis le soutien de son pays à la Tunisie et jugé "vital" que des élections "libres, transparentes et démocratiques" aient lieu cette année.

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