23 février, 2011

Côte d’Ivoire : L’impossible synthèse des panélistes

Les panélistes de luxe sont donc à labour en Côte d’Ivoire depuis le 21 février 2011 : le Mauritanien Abdel Aziz, le Sud-Africain Jacob Juma, le Tchadien Idriss Deby Itno et le Tanzanien Jakaya Kikweté vont donc faire la navette entre le Palais de Cocody et l’hôtel du Golf pour écouter Laurent Gbagbo et Alassane Dramane Ouattara (ADO) afin de : “Formuler une solution politique d’ensemble dans un délai n’excédant pas un mois”.

Trouver donc un remède au mal ivoirien d’ici le 28 février. Tout l’enjeu est contenu dans ce bout de phrase, qui tient lieu de feuille de route pour ces chefs d’Etat mandatés par l’Union africaine (UA) ; feuille de route jalonnée de questions insolubles. 1er problème : comment trouver le juste milieu entre deux personnalités qui sont allées loin à telle enseigne que tout recul leur est quasi impossible ?

Depuis la proclamation des résultats du deuxième tour de la présidentielle, il y a désormais 2 Côte d’Ivoire, dirigées par 2 présidents :
- Laurent Gbagbo, déclaré vainqueur par le Conseil constitutionnel, qui n’a vécu que pour le pouvoir depuis qu’il a créé le FPI ; convaincu par les 8 sondages et ses divers réseaux qu’il gagnerait haut la main, il est allé à ce scrutin confiant jusqu’à ce que le ciel lui tombe sur la tête le 3 décembre 2010.

N’ayant pas de plan B, l’opposant historique à Félix Houphouët-Boigny se referma, comme une huître, dans son cocon, fait de ses fidèles faucons et déploya tout ce qui est en son pouvoir pour rester scotché à son fauteuil. Et même diminué, 3 mois après, bon an mal an il y est parvenu ;
- ADO, qui tient là son ultime chance de devenir président de la Côte d’Ivoire et n’entend pas céder d’un iota sur sa position. Il a raison, il a gagné à la régulière cette élection.

En outre, depuis de 2 août 1999, où il fut adoubé comme président et de facto champion du RDR par suite du décès de Djenni Kobena, de nombreux militants l’ont suivi, ont cru en lui, sont allés en prison pour lui et même sont morts pour ses idéaux. Ce serait une trahison qu’il recule à présent qu’il est dans l’antre de la présidence. Advienne que pourra. C’est cela aussi, être leader politique.

2e problème : sur quoi vont tabler les 4 panélistes à Abidjan pour contraindre les deux parties, vu que le conclave de 6 heures à Nouakchott les 19 et 20 février fut un flop ?

Partis dans la capitale mauritanienne avec les conclusions des experts, les panélistes présidentiels sont arrivés à Abidjan sans un accord a minima ; car, en dépit des litotes diplomatiques et des circonlocutions, le fait est palpable que ces faiseurs de paix en chef n’ont pas un plan arrêté de commun accord pour sortir le pays de cette très mauvaise passe.

Pour ne rien arranger, la rétractation de Blaise Compaoré vient vicier une palabre déjà teintée de méfiance. En effet, si le Burkinabè a été récusé par Gbagbo via Blé Goudé et Cie, la présence d’un représentant de l’Afrique de l’Ouest était plus que nécessaire. Du reste, trop marqué dans ce dossier, Blaise aurait dû décliner l’offre dès le départ.

Dans tous les cas, la CEDEAO a condamné haut et fort le maintien de la mission du panel malgré le désistement de Blaise Compaoré ; et la garde rapprochée de Zuma a eu des frictions avec des Alassanistes à Abidjan par suite du communiqué dont s’est fendu un de ses ministres, qui a dit que la solution à l’imbroglio politico-électoral ivoirien est soit le partage du pouvoir, soit la reprise de la présidentielle de toutes les divisions.

Pourtant, officiellement parlant, la mission du panel ne consistait-elle pas uniquement, seulement et exclusivement à permettre à ADO d’exercer la réalité du pouvoir ? Et dire que l’Afrique du Sud rêve d’un siège permanent au Conseil de sécurité de l’ONU au nom de l’Afrique. Voilà là un couac de plus dans ses efforts pour faire l’unanimité africaine autour de sa candidature.

Suspecté d’être “miné” par les deux camps, le panel se devait d’être équilibré, or, à présent, il semble ne plus l’être, si l’on prête foi au fait que, à travers le communiqué de son ministre, le Sud-Africain a roulé pour Gbagbo. Au-delà, l’absence d’un voisin immédiat de la Côte d’Ivoire dans ce panel est sujette à caution.

Vu le sort réservé aux précédentes médiations, les 4 panélistes risquent, hélas, de se rendre à une évidence, criarde depuis 3 mois : les positions sont si antagoniques qu’une conciliation n’est pas envisageable. Les panélistes ne pourront se heurter qu’au mur de l’impossible synthèse, puisqu’il n’y a point de préréquis et que, désormais, la CEDEAO et l’UA pourraient être à couteaux tirés sur le plan diplomatique.

Par Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana

L’Observateur Paalga

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