20 janvier, 2011

Al-Azhar suspend le dialogue avec le Vatican, accusé d'attaquer l'islam

LE CAIRE (AFP)

AFP/Archives

Mosquée au Caire le 10 mars 2010

La plus haute institution sunnite, Al-Azhar, qui siège au Caire, a décidé jeudi de suspendre ses rencontres avec le Vatican, considérant des déclarations du pape Benoît XVI sur les chrétiens d'Orient comme des "attaques répétées contre l'islam".

"Le gel a été provoqué par les attaques répétées contre l'islam du pape Benoît XVI (...). Le pape a répété que les musulmans opprimaient les non-musulmans vivant avec eux au Moyen-Orient", selon un communiqué d'Al-Azhar.

Les déclarations du souverain pontife "sont très éloignées de la réalité et constituent une ingérence inacceptable dans les affaires intérieures des pays islamiques", poursuit le communiqué, reprenant un argument déjà invoqué par le gouvernement égyptien.

Le Vatican a rapidement réagi en affirmant vouloir poursuivre son "dialogue" avec ce centre d'enseignement et de diffusion de l'islam sunnite.

"Quoi qu'il arrive, la ligne d'ouverture et de désir de dialogue du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux reste inchangée", a déclaré à la presse le porte-parole du Vatican, le père Federico Lombardi.

Al-Azhar et le Vatican tiennent des réunions deux fois par an, pour discuter de coopération.

La suspension de ces réunions a été décidée lors d'une réunion extraordinaire des instances de l'institution sunnite, dirigée par le grand imam Cheikh Ahmed al-Tayyeb.

Proche du pouvoir égyptien -- le grand imam est nommé par le président Hosni Moubarak --, Al-Azhar se réclame d'un islam institutionnel modéré, sensé notamment contrer l'influence des prédicateurs radicaux.

Le 10 janvier, le souverain pontife avait souligné l'"urgente nécessité" pour les gouvernements du Moyen-Orient d'adopter "des mesures efficaces pour la protection des minorités religieuses", après un attentat qui a fait 21 morts devant une église copte orthodoxe d'Alexandrie (nord de l'Egypte) dans la nuit du Nouvel an, .

AFP/Archives

Le grand imam d'Al-Azhar, Cheikh Ahmed al-Tayyeb, le 2 janvier 2011 au Caire

Il s'était déclaré favorable aux démarches en vue d'une "réponse concertée de l'Union européenne afin que les chrétiens soient défendus au Moyen-Orient".

Le lendemain, le Caire avait rappelé pour consultations son ambassadeur au Vatican, jugeant que les propos du pape constituaient une "ingérence inacceptable" dans les affaires intérieures égyptiennes.

Ce durcissement de l'attitude du Caire face au Vatican "semble très liée à la situation politique égyptienne", a estimé à Rome le vaticaniste Marco Politi, commentateur au journal Il Fatto Quoditiano (gauche), interrogé par l'AFP.

Mis en difficulté sur la scène internationale et intérieure par l'attentat du Nouvel an, le pouvoir égyptien a affirmé à plusieurs reprises que la sécurité de ses citoyens de toutes confessions relevait de la seule souveraineté égyptienne.

Outre le Vatican, de nombreux pays, en particulier les Etats-Unis et les Européens, se sont alarmés d'un regain de violence contre les chrétiens d'Orient, en particulier après une attaque contre une église de Bagdad où 46 chrétiens ont été tués le 31 octobre.

Mercredi, à l'issue d'un sommet économique la station égyptienne de Charm el-Cheikh, les dirigeants arabes ont appuyé la position du Caire en rejetant toute "ingérence étrangère" au sujet des minorités du Moyen-Orient.

Principale communauté chrétienne de la région, les Coptes d'Egypte sont pour la plupart orthodoxes, avec une minorité de catholiques. Ils représentent 6 à 10% des quelque 80 millions d'Egyptiens, en grande majorité musulmans sunnites, et se plaignent régulièrement d'être marginalisés.

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