La crise post-électorale ivoirienne est suivie de près par les médias africains. Entre éditoriaux acides, tribunes politiques et enquêtes sur la diplomatie de Laurent Gbagbo, passage en revue des réactions de la presse ouest-africaine.
Par Guillaume LOIRET (texte)
« Le président Gbagbo est de la trempe des partisans de la solution finale qui ont pour noms Mussolini, Hitler, Göring, Goebbels. » La tribune publiée mardi 21 décembre par le quotidien burkinabé « Le Pays » n’est pas tendre pour Laurent Gbagbo.
À l’inverse, le site d’informations Afrique Actu étrille, lui, la réaction de la communauté internationale : « À la honte de l’Afrique, il y a la communauté des États d’Afrique de l’Ouest et l’Union africaine, enrégimentées, peut-être également sous la menace et les ultimatums, pour soutenir une position qu’elles ne tiennent pourtant pas à l’égard du Soudanais Omar el-Béchir ».
Un « tournant démocratique manqué »
À la lecture de la presse africaine, force est de constater en effet que la crise politique ivoirienne divise au-delà de ses propres frontières. Tel est le cas par exemple de l’efficacité des sanctions prises à l’encontre du régime de Laurent Gbagbo. « Les sanctions ne tueront pas Gbagbo », titrait ainsi « Le Républicain » (Mali) mardi 22 décembre, jugeant amèrement que « les mesurettes telles que les interdictions de visas et les gels d’avoirs de toutes les manières volés au peuple ne tueront pas Gbagbo le résistant »… Une opinion que ne partage pas « Le Pays » (Burkina), qui estime que les sanctions pourraient être efficaces si elles visaient « un secteur qui pourrait faire grimacer Laurent Gbagbo : l’exportation de produits comme le café et le cacao ».
La crise ivoirienne est aussi l’occasion pour certains pays africains de regarder en face leurs propres divisions, de s’identifier au contexte abidjanais, et de s’interroger sur la démocratie à l’africaine. Au Cameroun, qui vivra lui aussi un scrutin présidentiel en 2011, A. Mbog Pibasso écrit dans « La Nouvelle Expression » : « Ce qui se passe depuis la semaine dernière en Côte d’Ivoire illustre à suffisance les atermoiements des Africains à s’approprier et à implémenter la démocratie occidentale ». Le « Cameroon Tribune » évoque, quant à lui, un « tournant démocratique manqué ».
Les mystérieux émissaires de Gbagbo au Bénin
La presse continentale sait aussi poser un autre regard sur la Côte d’Ivoire en traitant de sujets qui n’ont pas fait la une des médias occidentaux. Au Burkina Faso par exemple, « L’Observateur Paalga » s’intéresse à Henri Konan-Bédié, le « numéro 3″ de l’élection, pour noter qu’il vient juste de sortir du « silence de statue » qu’il observait depuis le second tour.
La correspondante à Abidjan du site Afrik.com se penche, elle, sur la communauté française de Côte d’Ivoire, ces « spectateurs inquiets du bras de fer Gbagbo-Sarkozy ».
Enfin, des médias béninois et camerounais racontent l’étrange histoire des émissaires du président sortant chargés d’aller redorer son image dans les pays voisins. Dans les pages du « Jour » (Cameroun), Stéphane Tchakam raconte la conférence de presse donnée par « le Dr Dagbo Gode Pierre et Fred Appiah Anderson, qui se réclament de la société civile ivoirienne, (…) en tournée en Afrique centrale pour informer leurs interlocuteurs de ce qui se passe réellement en Côte d’Ivoire ». Des émissaires qui ont eu moins de chance au Bénin, relate le quotidien « Le Matinal » : « Aussitôt arrivés à Cotonou, [ils] ont été interpellés par les services des renseignements généraux et de la surveillance du territoire »…
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