AMMAN (AFP) | © AFP Un manifestant est arrêté par la police, le 25 mars 2011 à Amman, en Jordanie |
La rupture semble scellée en Jordanie entre le gouvernement et les islamistes: le Premier ministre les accuse de "recevoir des ordres de l'Egypte et de la Syrie", tandis que le principal mouvement d'opposition appelle à sa chute, après la mort d'un manifestant vendredi.
La confrérie des Frères musulmans, dont le guide suprême se trouve en Egypte, jouissait historiquement de relations privilégiées avec le pouvoir jordanien, qui lui a assurée une protection dans les années 50 et 80 lorsque ses membres étaient persécutés en Egypte et en Syrie.
En retour, les Frères musulmans avaient fait preuve de loyauté envers les Hachémites, la famille régnante.
| © AFP Un manifestant réclamant des réformes, blessé, est allongé par terre après des heurts le 25 mars 2011 à Amman |
Sur un ton inhabituel, le Premier ministre Maarouf Bakhit les a accusés vendredi soir de "recevoir des instructions de dirigeants des Frères musulmans d'Egypte et de Syrie", estimant que leur refus du dialogue signifie leur choix "du chaos" dans le pays.
"Cessez de jouer avec le feu (...), cessez de cacher vos véritables intentions", a-t-il martelé à l'adresse des islamistes, dans des déclarations à la télévision jordanienne.
De son côté, le porte-parole de la confrérie, Jamil Abou Bakr, a estimé "qu'en accusant les Frères musulmans, le gouvernement tente de fuir ses responsabilités" et prouve que "les questions de réformes et de libertés sont de faux appels" de sa part.
| © AFP Blessé dans des heurts avec des partisans du régime, un manifestant réclamant des réformes est porté par des policiers le 25 mars 2011 à Amman |
Cheikh Hamzeh Mansour, chef du principal parti d'opposition, le Front de l'Action islamique (FAI), branche politique des Frères musulmans, a pour sa part accusé le gouvernement de "crimes contre l'humanité" après les violences ayant émaillé une manifestation vendredi à Amman.
Ces violences, les premières de ce genre depuis les déclenchement des protestations il y a trois mois, ont fait un mort et 130 blessés, dont trois se trouvent dans un état critique.
Elles sont intervenues au moment où le secrétaire américain à la Défense, Robert Gates s'entretenait en Jordanie avec le roi Abdallah II.
Le manifestant décédé, Khairy Jamil Saad, âgé de 55 ans, est mort à l'hôpital Hamzeh d'Amman.
| © AFP Des policiers essaient de repousser le 24 mars 2011 des partisans du gouvernement voulant s'approcher d'étudiants campant sur une place à Amman pour demander des réformes |
Son fils Nasser a affirmé à l'AFP que tous les deux se trouvaient sur la place du rassemblement des "jeunes du 24 mars", lorsque "la gendarmerie (les) a attaqués". Il a indiqué que "son père avait reçu plusieurs coups sur le corps", démentant la thèse officielle de la "crise cardiaque".
Le vice-Premier ministre et ministre de l'Intérieur, Saad Hayel Srour, a annoncé l'ouverture d'une enquête "pour déterminer les responsables des violences. "Nous sommes un Etat fort et nous sommes capables de protéger nos citoyens", a-t-il dit à la presse.
| © AFP Carte de localisation des manifestations en Jordanie qui ont fait 1 mort et plus de 130 blessés (45 x 73 mm) |
Islamistes, "jeunes du 24 mars", syndicats et partis de gauche doivent annoncer samedi leur plan d'action. Différentes conférences de presse sont prévues dans la journée.
Dans la matinée, des pancartes affirmant "nous sommes tous Khairy Saad" ont commencé à apparaître dans les sièges de ces mouvements.
La police a démonté vendredi le camp des "jeunes du 24 mars", un groupe rassemblant différentes tendances y compris des islamistes, qui campaient depuis jeudi pour réclamer des réformes.
Le Premier ministre a annoncé que le gouvernement "ne permettra plus dorénavant des rassemblements qui entravent la circulation, portent atteinte aux libertés des autres et affectent leur gagne-pain".
"Le but des autorités était de faire partir ce groupe de jeunes qui rappelle trop les manifestants de Tunisie, Egypte ou Bahreïn", a déclaré à l'AFP un analyste politique qui a requis l'anonymat.
Après les violences, 15 membres de la Commission de dialogue national, mise en place par le gouvernement pour lancer des réformes politiques et boudée par les islamistes, ont démissionné vendredi. Ils ont accusé le gouvernement de "massacre" et de "manque de sérieux dans son engagement pour les réformes".
Avec ces démissions, qui s'ajoutent à six autres précédemment, le futur de cette Commission, qui ne compte plus que 31 membres sur les 52, apparaît très incertain.
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