14 janvier, 2013

Hollande, chef de guerre


François Hollande, qui a donné son feu vert aux opérations militaires françaises au Mali et en Somalie, est confronté pour la première fois à la situation périlleuse d'exposer la France à des pertes humaines, dans son rôle de chef des armées. Le même week-end, il s’est montré ferme sur le mariage pour tous. Des décisions qui lui confèrent une stature nouvelle.






En quelques jours, le temps semble s’être accéléré pour François Hollande. D'abord vendredi, à l’international, avec la déclaration de guerre contre les terroristes au Mali. Puis dimanche, dans les affaires intérieures, avec la manifestation contre le mariage pour tous.
Des évènements qui semblent renforcer son image présidentielle. "Il monte en première ligne pour répondre aux opposants, suite à la manifestation et aux interventions au Mali et en Somalie. Il se transforme, du coup, en chef de guerre", juge le politologue Stéphane Rozès.
François Hollande a tout fait pour ne pas passer pour un va-t-en guerre, allant jusqu'à taire la préparation de l'intervention au Mali jusqu'au dernier moment. Ce n'est que vendredi, aux alentours de 18 heures, que le chef de l'Etat a annoncé aux Français l'intervention militaire française imminente. Sur place, tout était pourtant déjà prêt pour un assaut contre les islamistes.
>> A lire : "Mali : ce week-end où la France est entrée en guerre"

La fin du président mou ?


Un week-end très chargé donc pour François Hollande. Qui semble vouloir ainsi estomper l’image d’un président flou, hésitant, et peu sûr de lui. Mais, pour son entourage, son retrait serait en fait une méthode de travail.
Pas question pour ses proches d’imaginer un président mou. "François Hollande est un homme d'écoute", l'a ainsi défendu Michel Sapin sur BFMTV, dimanche soir. "C'est le meilleur moyen de préparer une décision nette, tranchante, efficace".
Sa nouvelle stature présidentielle, François Hollande va devoir la conserver, car les dossiers en cours sont sensibles et l’Elysée redoute une guerre au Mali plus longue que prévu et une surenchère des manifestations sur le dossier du mariage homosexuel.

La presse algérienne critique l'attitude "coloniale "de la France au Mali


Des soldats français se préparent à N'Djamena avant d'intervenir à Bamako, le 11 janvier 2013.

"Paris a mis tout le monde devant le fait accompli", commentait dimanche 13 janvier Hacen Ouali dans le quotidien algérien El Watan. Même "le gouvernement algérien qui, depuis le début du conflit de l'Azawad, s'est constamment dit opposé à une présence militaire occidentale au Mali, semble désormais avoir changé son fusil d'épaule", poursuit Zine Cherfaoui, toujours dans El Watan. Largement soutenue sur la scène nationale comme internationale, l'intervention française au Mali, qui est entrée lundi dans son quatrième jour, fait grincer les dents de la presse algérienne.
"L'intervention militaire française au Mali a été baptisée du nom de code Serval. Pour ceux qui ne le savent pas, le serval est un petit félin africain qui a la particularité d'uriner trente fois par heure pour marquer son territoire. Justement..., débute, narquois, l'éditorial du quotidien Liberté. La France ainsi décidé de faire l'impasse sur les résolutions onusiennes pour partir en guerre contre le terrorisme au Sahel. Toute seule, comme le serval, elle n'a pas résisté à la tentation épidermique de revenir dans son ancien précarré pour montrer à tout le monde qu'elle est la seule qui connaît le mieux les intérêts des Maliens. Leurs anciens colonisés".
"LA RÉALITÉ DE LA FRANÇAFRIQUE"

L'interventionnisme français ravive, dans la presse algérienne, les mauvais souvenirs du colonialisme et de la Françafrique. En dépit de "conséquences terribles pour la sous-région, poursuit Liberté, François Hollande a démontré qu'il ne peut rien changer à la réalité de la Françafrique."  "Quand l'intérêt français est menacé en Afrique (Côte d'Ivoire, Rwanda, Tchad, Gabon, Centrafrique...), Paris dégaine son costume de gendarme et envoie ses hélicoptères. Protéger les gisements d'uranium du Niger vaut tous les sacrifices de dépenses militaires même en pleine crise économique", poursuit l'éditorial.

Preuve d'une décision purement intéressée, estime le quotidien L'Expression dans son éditorial, "la France est bien seule à faire le coup de feu au Mali". Aucune des grandes puissances occidentales ne semble prête à lui emboîter le pas. "Cet isolement de la France contredit l'argument de 'la légalité internationale' avancé par le président français pour justifier son intervention qui a, de toute évidence, été décidée dans la précipitation", poursuit L'Expression. Préserver les activités françaises dans le pays et pourquoi pas s'assurer une nouvelle base militaire dans le pays : voilà bien "la mouche qui a piqué Hollande".
AFFAIBLIR L'ALGÉRIE
"La France ne chercherait-elle pas à déstabiliser l'Algérie ?", osent certains commentateurs. Le Temps d'Algérie relaie une tribune signée par Laid Seraghni, un analyste qui intervient régulièrement sur les questions internationales et de géostratégie, dans Cameroonvoice"Derrière l'enjeu malien, la France coloniale cherche à punir l'Algérie", affirme ce spécialiste. "Cette crise n'est qu'une étape pour atteindre in fine l'Algérie, dont le Sud est cerné par l'armée française qui opère en Libye, en Côte d'Ivoire, au Niger, en Mauritanie, au Tchad et au Mali", prévient l'analyste, persuadé que "la France cherche par les armes à réaliser un rêve colonial". Pour lui, derrière le Mali, c'est donc bien l'Algérie qui est visée et "la préservation des intérêts de la France dans la région du Sahel".
Une position partagée par le professeur Ahmed Adimi, qui estime dans un entretien au quotidien Le Soir d'Algérie que "l'intervention militaire française au Mali est une des étapes d'un plan visant l'installation de forces étrangères dans la région du Sahel". Le politologue algérien Menas Mesbah va même plus loin, confiant au quotidien Le Temps d'Algérie, que "la France mène, au Mali, une guerre par procuration au profit des Etats-Unis d'Amérique, lui permettant également de défendre ses intérêts historiques". "C'est un nouveau jeu mondial dans lequel les USA confient des guerres à d'autres pays parmi ses alliés", ajoute-t-il.
Seul voix discordante à questionner la position des autorités algériennes, Ferhat Aït Ali s'interroge, dans Le Matin, sur une stratégie qui n'a jamais semblé "ni claire ni cohérente". Jusqu'à soulever quelques doutes sur "les déclarations contradictoires au gré des évènements, les accointances plutôt anti-maliennes et en même temps anti-azawadienne avec les narco-islamistes d'Ansar Eddine alliés effectifs et objectifs d'AQMI dans cette région, [qui] rendaient cette position plus que suspecte aux yeux des voisins et du reste du monde". Et si la position algérienne ne visait seulement, par "tous les stratégèmes", qu'à "saborder les prétentions autonomistes des Touareg de l'Azawad de l'intérieur même de cette communauté", interroge-t-il.

L'ALGÉRIE ENTRAÎNÉE DANS LA GUERRE ?
Quels que soient les intérêts en jeu, "l'intervention militaire en cours n'est pas et ne pourra être la panacée à la crise malienne comme le prétendent les partisans maliens et étrangers de la solution militaire", analyse Kharroubi Habib dans le Quotidien d'Oran. "Au vu de l'étendue et de la configuration du terrain d'opérations, il ne faut pas en attendre l'éradication totale et définitive de ces groupes armés, d'autant que le tout militaire qui l'inspire ne s'embarrasse nullement de répondre favorablement aux revendications légitimes des populations du nord du Mali et que partagent une grande partie des éléments enrôlés dans les groupes armés qui sévissent dans cette région du Mali", poursuit-il, prédisant "l'enlisement dans la guerre" et "la pérennisation de l'état d'insécurité".
Or, le "bourbier" qui s'annonce pour la France au Mali, poursuit le politologue, aura des répercussions sur l'Algérie, qui "est tenue de sécuriser ses frontières et renforcer ses forces au niveau des frontières. Ce qui alourdira sa tâche et exigera de l'Algérie énormément de moyens et, donc, de dépenses". Il n'envisage toutefois pas d'intervention militaire de son pays, à la différence de Laid Seraghni qui l'estime indispensable pour protéger les frontières et les populations. "(...) Les frontières [de l'Algérie] sont si grandes que l'Etat ne peut contrer les infiltrations des groupes terroristes d'Al-Qaida et l'afflux des populations à la recherche d'un refuge sur son territoire."
L'Amenokal du Hoggar, chef traditionnel des Touareg algériens, prédit ainsi que cette "guerre déclarée à nos portes engendrera le chaos" et aura de "graves répercussions" sur toutes les villes du sud de l'Algérie, dans El Watan. Comme en témoigne déjà, selon lui, l'arrivée de nombreux réfugiés.

Mali: la France confirme la prise de Diabali par les islamistes

PARIS - Le ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian a confirmé lundi la prise par les islamistes de la ville de Diabali, à 400 km au nord de Bamako, près de la frontière avec la Mauritanie.

Nous savions qu'il y aurait une contre-offensive vers l'ouest, d'autant plus que là se trouvent les éléments déterminés, les plus structurés, les plus fanatiques (...) Ils ont pris Diabali, qui est une petite commune, après des combats importants et après une résistance de l'armée malienne qui était insuffisament dotée à ce moment précis, a déclaré le ministre à la chaîne de télévision BFM-TV.

La prise de Diabali par les jihadistes en dépit de l'intervention française qui bombarde depuis quatre jours leurs colonnes et leurs positions, avait été annoncée à l'AFP par un élu de la ville.

Les islamistes sont dans la ville de Diabali. Ils sont nombreux. Ce matin, ils ont échangé des tirs avec les militaires maliens, puis les tirs ont cessé et les islamistes sont entrés dans la ville, a-t-il expliqué, après avoir requis l'anonymat.

Les combattants islamistes sont menés par l'un des chefs d'Al-Qaïda au Maghreb (Aqmi), selon une source de sécurité régionale.

Abou Zeid, l'un des chefs d'Aqmi, dirige lui-même les opérations. Lui et ses hommes ont quitté la frontière mauritanienne, pour éviter les raids des avions français, a précisé cette source.

La France, se proclamant en guerre contre le terrorisme au Mali, a bloqué vendredi la progression des groupes armés islamistes, qui contrôlent le nord du Mali depuis neuf mois, vers le centre du pays et bombardé pour la première fois dimanche leurs positions islamistes dans le nord, à Gao et Kidal, au coeur des territoires jihadistes.

Des positions islamistes à Nampala, à une cinquantaine de kilomètres de Diabali, et un camp d'entraînement jihadiste à Léré, près de la Mauritanie, ont notamment été visés dimanche par des frappes aériennes françaises.


(©AFP

Mali: les jihadistes à la contre-attaque dans le centre, menacent la France


AFP/Archives Des membres du groupe islamiste Mujao le 16 juillet 2012 à Gao AFP/Archives
BAMAKO (AFP) Les jihadistes ont repris l'offensive au Mali, attaquant lundi une ville à 400 km au nord de Bamako, tout en menaçant de "frapper le coeur de la France", qui bombarde depuis quatre jours leurs colonnes et leurs positions, leur occasionnant de lourdes pertes.
Le Conseil de sécurité de l'ONU doit se réunir lundi après-midi, à l'initiative de la France, qui souhaite informer ses partenaires sur la situation au Mali et son intervention militaire.
"Les islamistes ont attaqué aujourd'hui (lundi) la localité de Diabali (bien Diabali, centre). Ils sont venus de la frontière mauritanienne, où ils avaient été bombardés par l'armée française", a déclaré à l'AFP une source de sécurité malienne.
"Abou Zeid, l'un des chefs d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) dirige lui-même les opérations", a précisé une source sécuritaire régionale, qui a confirmé l'attaque.
Le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a reconnu lundi que si les islamistes étaient en "repli" sur le front est, il y avait toujours un "point difficile" à l'ouest. Diabali se situe dans cette zone, mais le ministre n'a pas spécifiquement évoqué cette ville.
La France, se proclamant "en guerre contre le terrorisme" au Mali, a bloqué vendredi la progression des groupes armés islamistes, qui contrôlent le nord du Mali depuis neuf mois, vers le centre du pays.
AFP
François Hollande 14 janvier 2013 à l'Elysée lors d'une réunion interministérielle sur le Mali
L'aviation française a bombardé pour la première fois dimanche leurs positions dans le nord, à Gao et Kidal, au coeur des territoires jihadistes.
Des positions islamistes à Nampala, à une cinquantaine de kilomètres de Diabali, et un camp d'entraînement jihadiste à Léré, près de la Mauritanie, ont notamment été visés dimanche par des frappes aériennes françaises.
"La France a attaqué l'islam. Nous allons frapper le coeur de la France. Au nom d'Allah, nous allons frapper le coeur de la France. Partout. A Bamako, en Afrique et en Europe", a déclaré à l'AFP Abou Dardar, l'un des responsables du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao).
Un autre chef du Mujao dans le nord du Mali, Omar Ould Hamaha, surnommé le "barbu rouge", a assuré sur une radio française qu'avec son intervention militaire, la France venait "d'ouvrir les portes de l'enfer", tombant dans un piège "beaucoup plus dangereux que l'Irak, l'Afghanistan ou la Somalie".
A Bamako, le lycée français a été fermé lundi "par mesure de précaution", selon l'ambassadeur de France, Christian Rouyer, qui recommande la "vigilance" aux 6.000 ressortissants français vivant au Mali.
Des menaces pèsent aussi sur les sept otages détenus par des groupes islamistes au Sahel.
AFP
Localisation sur une carte du Mali des combats et raids aériens français contre des groupes islamistes
Jihadistes "au paradis"
Le responsable du Mujao Abou Dardar a refusé de donner un bilan des raids français, se contentant d'affirmer que "tous les moudjahidine qui sont morts sont allés au paradis".
Mais plus de soixante jihadistes ont été tués dimanche dans la seule ville de Gao et sa périphérie, au cours de bombardements intenses, selon des habitants de la région.
"La nuit, les islamistes qui sont restés cachés dans les maisons sont sortis pour prendre les corps de leurs camarades", a déclaré à l'AFP un habitant de Gao, joint par téléphone depuis Bamako.
"Le bilan est lourd dans le camp des islamistes. Ils ont perdu énormément en logistique et des hommes. Le chiffre de 60 victimes n'est pas du tout exagéré à Gao. Le bilan est même certainement plus élevé", a indiqué à l'AFP une source régionale sécuritaire.
AFP
Photo fournie par le service de presse de l'armée d'un pilote français aux commandes d'un Rafale en partance 13 janvier 2013 pour le Mali depuis la base de Saint-Dizier
"Plusieurs chefs jihadistes ont été tués ou blessés lors des raids de l'armée française", a également indiqué une source de sécurité régionale, tandis qu'une source hospitalière contactée à Gao (nord) a affirmé qu'"Abdoulah", le nom de guerre d'un Béninois commandant une katiba du Mujao avait été tué.
Gao, Kidal, et la ville historique de Tombouctou sont les trois principales villes du Nord malien, en majorité désertique, sous la coupe des islamistes depuis près de neuf mois.
A Tombouctou, où les jihadistes ont mené ces derniers mois lapidations et amputations, un enseignant a fait état d'un "début de panique" parmi les familles des islamistes partis au combat, assurant que "beaucoup essayent de partir dans le désert".
Berlin a annoncé lundi étudier un possible soutien "logistique", "médical" ou "humanitaire" à l'intervention française au Mali, qu'elle juge "justifiée".
L'intervention française a recueilli un large soutien international. Mais la Chine ne l'a soutenue lundi que du bout des lèvres, en insistant sur le déploiement "aussi vite que possible" de la Force internationale de soutien au Mali (Misma) approuvée par le Conseil de sécurité de l'ONU.
Les préparatifs s'accélèrent également pour le déploiement de cette force ouest-africaine chargée de déloger les groupes liés à Al-Qaïda.
Les premiers éléments de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'ouest (Cédéao) se mettent en place, sous la direction d'un général nigérian, Shehu Abdulkadir.
Le Nigeria doit fournir 600 hommes. Le Niger, le Burkina Faso, le Togo, et le Sénégal ont également annoncé l'envoi chacun d'environ 500 hommes, et le Bénin 300.