13 octobre, 2010

Laurent Gbagbo : "Je n'exclus pas une victoire au premier tour de la présidentielle"

LAurent Gbagbo ne fait aucun cadeau à ses adversaires. LAurent Gbagbo ne fait aucun cadeau à ses adversaires.

Dans une interview publiée dans le n° 2597 de Jeune Afrique, en kiosque du 17 au 23 octobre, le chef de l’État ivoirien Laurent Gbagbo explique pourquoi il est, selon lui, le meilleur candidat à l’élection présidentielle du 31 octobre.

C’est en « homme heureux » que Laurent Gbagbo s’engage dans la campagne électorale officiellement lancée ce 15 octobre. « J’aime mener ces batailles-là, j’aime battre campagne, ça m’excite », s’enthousiasme-t-il.

Le leader du Front populaire ivoirien (FPI), ancien opposant au père de la nation, Houphouët-Boigny, affirme : « Le 31 octobre 2010 marquera la fin de la guerre des héritiers d’Houphouët [-Boigny, NDLR], dont je ne suis pas. » Il pense que cette élection historique sonnera le glas du « dispositif qu’Houphouët avait mis en place pour barrer la route à l’autre Côte d’Ivoire ». Celle qu’il représente, selon lui.

Fraude inévitable mais acceptable

Abordant la prévention de la fraude électorale et le désarmement des ex-rebelles, il se dit « globalement satisfait » de ce qui a été réalisé dans ces domaines. « Je sais bien qu’il y aura encore quelques fraudes, qui ne seront pas de notre fait. Mais dans une mesure disons acceptable et quasi inévitable », reconnaît-il.

Si les sondages le donnent presque tous vainqueur, Laurent Gbagbo se refuse à y voir le signe d’une victoire inéluctable. D'autant qu'il y a le poids des indécis. « En matière électorale, le risque zéro n’existe pas. Mais lorsque dix sondages, huit TNS-Sofres, un Gallup et un Afrobarometer, vous placent en tête depuis un an et demi et jusqu’à l’avant-veille du scrutin, il est rare qu’ils se trompent tous. » Raison pour laquelle, à la question d’une éventuelle victoire au premier tour, il déclare sereinement : « Je ne l’exclus pas. »

De Gaulle ivoirien

Laurent Gbagbo prétend être le candidat le plus proche des Ivoiriens : « Je suis africain et ivoirien. Je préférerai mourir plutôt que de brader l’Afrique et la Côte d’Ivoire », dit-il, assurant qu’il est également le plus patriote. « Je persiste et je signe. Il y a moi et il y a ceux qui ne font et qui ne disent qu’en fonction des desiderata de l’extérieur. »

Le chef de l’État ne fait pas de cadeaux à ses challengers. Au sujet d’Alassane Ouattara : « Répéter de meeting en meeting qu’on sait où trouver l’argent qui sauvera le pays, c’est se comporter en vendeur d’illusions. » Et à destination de Henri Konan Bédié, la pique se veut historique : « Pétain a capitulé, De Gaulle a résisté. Inutile de vous préciser qui ressemble à qui aujourd’hui en Côte d’Ivoire. »

Saluant la nouvelle orientation des relations franco-ivoiriennes, avec la récente visite de Claude Guéant à Abidjan, le président Gbagbo se dit « très satisfait de ce contact ». Mais il ne faut pas lui parler du séjour du juge français Patrick Ramaël, en charge des dossiers Guy André Kieffer et Xavier Ghelber. Selon lui, « les Ivoiriens se fichent complètement de Ramaël ».

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Otages d'Aqmi au Sahel, dont la seule femme du groupe, le visage flouté. Otages d'Aqmi au Sahel, dont la seule femme du groupe, le visage flouté.

Le Groupe d'action antiterroriste des pays du G8 tient une réunion au Mali, afin de proposer des améliorations dans la lutte coordonnée contre Aqmi dans la région sahélienne.

Des représentants du G8 (États-Unis, Russie, Japon, Canada, France, Grande-Bretagne, Italie et Allemagne) et des pays de la région sahélienne (Maroc, Mauritanie, Niger, Burkina Faso, Sénégal, Nigeria notamment) ainsi que de l'Union européenne (la Suisse, l'Espagne et l'Australie) se réunissent à compter du mercredi 13 octobre à Bamako, pour étudier les moyens de lutter contre Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).

Le Groupe d'action antiterroriste des pays du G8 (CTAG, créé en 2003 pour accroître les capacités de la lutte contre le terrorisme) propose de « faire progresser une prise de conscience » quant à l’importance du renforcement et de la coordination des opérations antiterroristes dans la bande sahélo-saharienne, selon une source diplomatique de la région.

Cette réunion qui a rassemblé plusieurs experts sur le sujet prendra fin jeudi. La rencontre intervient alors que sept otages dont cinq Français, un Malgache et un Togolais, sont détenus par Aqmi depuis le 16 septembre dernier. Enlevés à Arlit, au Niger, ils se trouveraient désormais dans la région de Timétrine (nord-est du Mali).

« Enjeu terroriste » au Mali

Le ministre malien des Affaires étrangères, Moctar Ouane, a estimé que cette réunion était « une marque d'estime et de confiance de la communauté internationale » envers le Mali. Le pays est un des principaux lieux d’action d’Aqmi et, selon la même source diplomatique, le fait de tenir la réunion à Bamako est « une façon de montrer qu'il y a un enjeu terroriste » au Mali.

L’Algérie, conviée à participer à cette rencontre, n’est pas représentée. Elle estime en effet que la lutte contre Aqmi est l'affaire des seuls pays du Sahel concernés et ne souhaite pas l'implication de pays extérieurs à cette zone géographique.

Les pays en présence comptent aborder la question du contrôle des frontières et du rôle que peuvent jouer dans la lutte antiterroriste l’Union africaine et la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cedeao). (Avec AFP)

10000 biodigesteurs d’ici à 2013 au Burkina Faso

Banfora, (AIB) – Le Programme national de bio-digesteurs du Burkina Faso (PNB-BF) ambitionne 10 000 biodigesteurs dans 3 ans. La réussite de ce pari passe nécessairement par la sensibilisation et la formation des principaux acteurs chargés de la mise en oeuvre. C’est pourquoi, le PNB-BF a organisé un atelier de formation à l’intention des maçons du 13 au 28 septembre 2010 à Banfora.

Ils étaient une quarantaine de maçons et superviseurs à prendre part à cet atelier. Venus de la Boucle du Mouhoun, du Centre Ouest, des Hauts Bassins, du Sud-Ouest et des Cascades ; ces professionnels de la truelle et du fil à plomb, se sont appropriés la technologie de construction du biodigesteur – type conçu par le Programme National de Biodigesteurs du Burkina Faso (PNB-BF). Ainsi outillés, ces maçons vont aller dans les derniers hameaux de culture de la zone d’intervention du programme pour répondre aux sollicitations des ménages qui souhaiteraient disposer d’un biodigesteur.

Les maçons au nombre de 44 ont fait deux jours d’échanges théoriques, avant de descendre sur le terrain pour la construction des premiers biodigesteurs des Cascades. Le village de Toumousséni dans la Comoé à quelques encablures de Banfora chef-lieu de la province, a été retenu comme site pilote des toutes premières réalisations du Programme. Les maçons ont été repartis sur 4 sites appartenant à différents ménages.

L’objectif recherché par le présent atelier, était de construire et de rendre fonctionnel les quatre biodigesteurs ; a déclaré le Coordonnateur National du Programme Xavier Bambara. « C’est à travers ce constat que l’on pourra dire que le présent atelier a atteint son objectif », a-t-il ajouté. Le coût d’un biodigesteur de 6 m3 varie entre 400 000 et 514 000 FCFA en fonction de la localité et des matériaux. Le PNB-BF alloue une subvention de 160 000 par biodigesteur.

Le bénéficiaire de la région des Cascades contribue financièrement à hauteur de 190 000 FCFA et assure la mobilisation des agrégats et de la main d’œuvre non qualifiée représentant une contre-valeur de 100 000 à 140 000 FCFA. Chaque ménage désireux d’obtenir un biodigesteur pourrait se l’acquérir en se conformant à ces dispositions.

Le biodigesteur vulgarisé par le PNB-BF est une construction souterraine en maçonnerie destinée à recevoir un mélange de déjections animales (bœuf et porc) et d’eau. Ce mélange subi à l’intérieur du biodigesteur une fermentation qui génère du gaz. Le biogaz est un combustible capable de remplacer le pétrole, le bois de chauffe et le gaz butane pour la cuisson des aliments et l’éclairage.

Faut-il le rappeler, le Programme national biodigesteurs du Burkina Faso (PNB-BF) avait été présenté en juillet dernier aux principaux acteurs de la région des Cascades à Banfora. Ce programme a pour objectif global de créer un secteur permanent et multi acteurs de construction de biodigesteurs afin d’accroître de façon durable les productions agro-pastorales et améliorer les conditions de vie des populations.

Présidentielle : À Korhogo, espoirs et frustrations


Près du kiosque à journaux, on parle beaucoup de politique à Korhogo. Près du kiosque à journaux, on parle beaucoup de politique à Korhogo.

Réputée très favorable au candidat du Rassemblement des républicains, Alassane Dramane Ouattara, la grande ville du Nord a payé un lourd tribut aux années de guerre. L’administration y est maintenant redéployée, et les habitants attendent beaucoup de l’élection à venir.

« Nos souvenirs pèsent plus lourds que nos rêves. » Aboubakar Sidik Ben Diarrassouba est magistrat à Korhogo. « C’est la raison pour laquelle nous sommes impatients d’exercer notre droit de vote. On veut en finir une fois pour toutes avec cette crise et nous projeter vers l’avenir. » La nuit est tombée depuis un bon moment sur la grande cité du Nord, mais les conversations sont toujours animées devant le kiosque à cigarettes du centre-ville. Une poignée de fonctionnaires, de commerçants et d’humanitaires partagent autour d’une boisson chaude leurs espoirs et leurs frustrations. C’est le « grin de thé » (grin désignant un groupe d’amis, en malinké). Petits ragots ou grands débats… Après la journée de travail, les habitués discutent de tout, mais ces derniers mois il est surtout question de politique. Les leaders des partis s’invitent régulièrement pour tâter le pouls de l’opinion et tester leurs idées. Le maire de la ville, Amadou Gon Coulibaly, le ministre de l’Agriculture, Mamadou Sangafowa Coulibaly, et Amadou Koné, anciennement chargé de l’Intégration africaine, y ont été aperçus.

Génération perdue

Ce soir, la « causerie » tourne autour du redéploiement de l’administration. « Certains d’entre nous vivent très mal leur affectation à Korhogo, explique un habitué. Le régime se cache derrière la présence des Forces nouvelles [FN] pour ne pas nous donner les moyens d’accomplir nos missions. » Et de citer, pêle-mêle, les enseignants qui n’ont plus de craies, les tribunaux qui reçoivent les plaintes mais ne peuvent pas les traiter, l’hôpital de la ville dont le budget a été divisé par trois, l’insécurité grandissante pendant les fêtes (ramadan, Noël, Tabaski)… Commentaire lucide d’un journaliste de la région : « C’est une époque de transition où chacun se cherche. Les FN rendent progressivement les clés de la ville aux agents de l’État, qui prennent péniblement leurs marques. Tout est lent et compliqué. »

En attendant, les habitants de Korhogo payent un lourd tribut à la crise. Selon les statistiques officielles, le taux de pauvreté (personnes qui vivent avec moins de 600 F CFA, soit 0,91 euro, par jour) dépasse 77 %. L’absence de l’État, depuis septembre 2002, a entraîné le délabrement des infrastructures et, en cette fin de saison des pluies, les routes sont sérieusement endommagées. Certains quartiers sont devenus insalubres depuis que ce n’est plus l’ONG Care International mais la mairie qui s’occupe de l’enlèvement des ordures. Les classes des écoles primaires et secondaires sont surchargées – jusqu’à quatre-­vingt-dix élèves par classe – et les enfants largement livrés à la bonne volonté d’enseignants, fonctionnaires et bénévoles. En matière de santé, moins de 10 % de la population a accès au système public. Au centre hospitalier régional (CHR) de Korhogo, médecins et infirmières sont revenus, mais tous les soins sont payants. Comptez 1 000 F CFA pour une consultation chez un généraliste. « Faute d’argent, de plus en plus de gens se tournent vers les guérisseurs traditionnels ou vers la médecine chinoise, bon marché mais loin d’atteindre les résultats escomptés », confie un cadre du CHR. « Les familles ne nous amènent plus que des patients dans des états très graves si bien que le taux de décès aux urgences bat tous les records. »

Pour les uns, les responsables sont à chercher du côté du Front populaire ivoirien (FPI) et du régime de Laurent Gbagbo. Pour les autres, les Forces nouvelles « ont montré leurs limites dans la gestion de la chose publique ». « En fait, nous avons vécu une longue descente aux enfers depuis la mort de Félix Houphouët-Boigny, tranche Youssouf. Les trois grands leaders politiques [le président Laurent Gbagbo, l’ancien chef de l’État Henri Konan Bédié et l’ex-Premier ministre Alassane Dramane Ouattara, NDLR] règlent leurs comptes sur le dos des populations depuis maintenant dix-sept ans, le temps d’une génération perdue. »

Tolérance et pardon

« Au début de la crise, je voulais m’enfuir à l’étranger car je ne voyais plus de débouchés, explique Sapero, artiste peintre. Mais progressivement, avec le soutien des Nations unies, des ONG et des chefs religieux, on reparle aujourd’hui de tolérance et de pardon, et on réapprend à vivre avec des valeurs que l’on avait oubliées. »

Le retour des touristes est attendu pour relancer l’artisanat, qui fait vivre une kyrielle de sculpteurs, potiers, bijoutiers et confectionneurs de pagnes. Siaka Koné ne regrette pas d’être resté. Ce mécanicien s’est reconverti dans le commerce des motos chinoises. Sept ans plus tard, ses deux magasins du quartier Soba regorgent de deux-roues asiatiques. Embellie aussi pour l’agriculture. « Nous avons relancé la dynamique », se félicite Raphaël Manan Ouattara, responsable du comité de suivi agricole des FN. « De 110 000 tonnes il y a trois ans, nous allons passer à 250 000 tonnes de coton lors de la prochaine campagne. Et cette année, la récolte d’anacarde a crevé le plafond des 360 000 tonnes. » D’autres tournent leur regard sur la mine aurifère de Tongon, située à 60 km de la ville et dont la mise en activité, courant octobre, donnera du travail à 700 personnes. Et puis, au « grin de thé », on ne manque pas de louer le dynamisme des femmes sénoufos, qui n’ont jamais baissé les bras. « Au plus fort du conflit, elles ont cherché des lopins de terre pour faire du maraîchage et se sont lancées dans le commerce pour nourrir leur famille », explique Salimata Coulibaly, présidente de l’association Grenier international. Restera à remettre au travail les jeunes qui, pendant des années, se sont adonnés au banditisme, au commerce de drogue ou à divers trafics. La tâche s’annonce difficile.

Campagne vertueuse

L’espoir repose désormais sur la bonne tenue du scrutin. « Quel que soit le vainqueur, on veut que les perdants respectent le verdict des urnes », martèle Aboubakar. Et d’appeler les responsables des partis politiques à mener une campagne vertueuse afin de ne pas retomber dans les flambées de violence survenues au mois de février après la dissolution du gouvernement et de la Commission électorale indépendante (CEI). Fin septembre, les leaders des organisations de la jeunesse ont été conviés à un séminaire de formation sur la prévention des conflits en période électorale. L’idée ? Les sensibiliser aux dangers de la manipulation ethnique ou religieuse à des fins politiques. « Je compte sur vous pour répandre la bonne parole, leur a lancé le secrétaire général de la préfecture, René Famy. Cette élection n’est pas la fin du monde. Les candidats passeront, et la Côte d’Ivoire subsistera. »

Sur le terrain, la bataille politique n’en est pas moins lancée. Le directeur de campagne de Laurent Gbagbo, Issa Malick Coulibaly, tente – non sans mal – de gagner des voix sur une terre réputée très favorable au Rassemblement des républicains (RDR). Le président Gbagbo est lui-même attendu à Korhogo le 7 octobre pour un grand meeting. Deux jours plus tard, Alassane Ouattara, en tournée dans la région des Savanes, lui succédera à la tribune. La distribution des cartes d’identité et d’électeur est programmée pour la première quinzaine du mois d’octobre. Quant aux FN, elles promettent de rester dans ce rôle d’arbitre que leur a assigné le Premier ministre, Guillaume Soro. « C’est l’aboutissement de notre lutte », se réjouit Kanigui Mamadou Soro, 34 ans, représentant politique des ex-rebelles à Korhogo. « Pour la première fois de ma vie, je vais aller voter. »

Faut-il croire au dégel


Nicolas Sarkozy et Abdelaziz Bouteflika en 2007. Nicolas Sarkozy et Abdelaziz Bouteflika

Malgré l’activisme de groupes de pression hostiles des deux côtés de la Méditerranée, le dialogue entre l'Algérie et la France n’a jamais été rompu au plus haut niveau.

Les relations entre Alger et Paris seraient-elles en voie de réchauffement ? L’optimisme qui règne des deux côtés de la Méditerranée a été conforté, le 31 août, par la décision de la cour d’appel de Paris de blanchir le diplomate Mohamed Ziane Hasseni, soupçonné par la justice française d’avoir commandité l’assassinat de l’opposant Ali André Mecili, en 1987, à Paris. Pour Alger, les soucis judiciaires du directeur des affaires protocolaires auprès du chef de la diplomatie, Mourad Medelci, avaient des allures de cabale. L’accusation ne reposant que sur le témoignage d’un ex-officier du Département recherche et sécurité (DRS), un déserteur réfugié en Allemagne, le gouvernement algérien avait la certitude que les malheurs de son diplomate étaient le produit de la détérioration du climat politique entre Alger et Paris après l’adoption par le Palais-Bourbon, en février 2005, d’une loi controversée sur le passé colonial de la France.

Le lourd contentieux entre les deux pays ne se limite pas à la seule affaire Hasseni. Alignement de Paris sur la position marocaine dans l’affaire du Sahara occidental, réserves gouvernementales françaises quant aux choix économiques d’Abdelaziz Bouteflika, apparition de l’Algérie sur la liste établie par le Quai d’Orsay des pays dont les ressortissants doivent faire l’objet d’une surveillance accrue pour menace terroriste – une mesure perçue comme une atteinte à la liberté de circulation des Algériens –, désaccord majeur sur des dossiers chauds, à l’instar de la question palestinienne, du dossier nucléaire iranien, du projet de réforme du Conseil de sécurité de l’ONU, ou de la gestion de la menace terroriste dans l’espace sahélo-saharien… les divergences entre les deux capitales ne manquent pas.

« Désaccords structurels »

Selon Alger, ces « désaccords structurels » sont le produit d’un lobbying actif de groupes de pression français : nostalgiques de l’Algérie française considérant que les « fellaghas » sont toujours au pouvoir, ou membres du barreau ayant pour fonds de commerce le « qui tue qui ? », en référence aux soupçons pesant sur l’armée algérienne dans les massacres de villageois (voire dans l’assassinat des moines de Tibéhirine) dans les années 1990. Sur l’autre rive, l’activisme des groupes de pression anti-Français n’a pas non plus faibli. La guerre de libération contre le colonialisme constitue, cinquante ans après l’indépendance, la principale source de légitimité du pouvoir et une garantie de perpétuation de la rente pour les vétérans (authentiques ou non) de la guerre de libération. Mais la sacralisation de la Révolution a eu des effets pervers. Afficher son hostilité à la France est devenu le meilleur raccourci pour tous les opportunistes pressés de pénétrer dans l’antichambre du pouvoir, quitte à verser dans le ridicule. Ainsi a-t-on banni du fronton de certaines institutions officielles l’usage de la langue de Molière au profit de l’arabe et de l’anglais. L’entrée de la base militaire navale de Mers el-Kébir est barrée d’un panneau écrit en arabe… et en russe.

Autre effet pervers de l’obsession antifrançaise : le projet de loi visant à criminaliser le colonialisme a durablement escamoté le débat autour de l’écriture de l’histoire de la guerre de libération côté FLN. Un débat autrement plus urgent. Dans leur gestion quotidienne des relations algéro-françaises, les présidents Abdelaziz Bouteflika et Nicolas Sarkozy font face, chacun à sa manière, à ces groupes de pression. Avec plus ou moins de bonheur. Au plus fort de la crise, les canaux de dialogue n’ont jamais été interrompus. Si les échanges de visites d’importance entre les deux capitales se comptent sur les doigts d’une main, la coopération économique n’a pas été réellement menacée. Mieux : la France a consolidé sa position de fournisseur numéro un de l’Algérie et la langue de Voltaire est enseignée dès la deuxième année du primaire dans les écoles publiques algériennes. Quant à la coopération militaire, elle enregistre des avancées significatives. La collaboration entre les services de renseignements des deux pays est plutôt intense en matière de lutte antiterroriste. « Quand la crise était à son apogée, et conscient des contraintes que subissait son homologue français, assure un conseiller d’Abdelaziz Bouteflika, le président a toujours affiché sa disponibilité pour aider Nicolas Sarkozy. N’a-t-il pas répondu favorablement à ce dernier, au grand dam de la quasi-totalité de la classe politique et d’une grande partie de l’opinion, quand il lui a téléphoné pour lui demander d’assister au sommet Afrique-France, le 31 mai 2010, à Nice ? »

Les maladresses de Kouchner

Cela dit, Abdelaziz Bouteflika sait également faire montre de fermeté. Claude Guéant, secrétaire général de l’Élysée, émissaire de Nicolas Sarkozy, a dû se rendre à deux reprises à Alger pour être reçu à El-Mouradia. Et le voyage du Premier ministre français, François Fillon, à Alger, le 21 juin 2008, n’a toujours pas provoqué la réciproque : aucun Premier ministre algérien n’a effectué de visite officielle en France depuis le retour aux affaires de Bouteflika, en 1999. Pourtant, la visite d’État du président algérien en France est désormais d’actualité, même si Bernard Kouchner est toujours considéré par Alger comme un pestiféré. « Ce n’est pas l’interlocuteur idéal », dit poliment notre conseiller, qui reproche au chef de la diplomatie française ses déclarations maladroites à propos de la génération de la guerre de l’indépendance.

Si Alger ne porte pas le locataire du Quai d’Orsay dans son cœur, celui-ci le lui rend bien. Kouchner s’abstient ainsi de citer l’Algérie parmi les partenaires fiables dans la lutte contre les djihadistes au Sahel. Cela ne l’empêche pas de rencontrer régulièrement son homologue algérien, Mourad Medelci, lors de joutes internationales, à l’instar de leur tête-à-tête, le 21 septembre, à New York, en marge de l’assemblée générale de l’ONU. « Ces rencontres sont informelles et moins importantes qu’on ne le prétend, tempère un diplomate algérien ; les canaux de dialogue sont ailleurs. » Le fonctionnement du couple Alger-Paris est décidément bien complexe.

Boues toxiques: l'usine incriminée va rouvrir ses portes

Boues toxiques: l'usine incriminée va rouvrir ses portes

La Hongrie a nationalisé la société MAL, productrice d'aluminium.


L'usine mise en cause dans le déversement de boues toxiques en Hongrie devrait redémarrer sa production dès jeudi.

Le bilan du grave accident chimique qui s'est produit le 4 octobre en Hongrie s'est alourdi à neuf morts. Une personne âgée est décédée à l'hôpital suite à ses blessures, ont annoncé ce mercredi les services de lutte contre les catastrophes.

D'autre part, l'usine d'aluminium, à l'origine de l'accident, va redémarrer sa production ce jeudi ou ce vendredi, selon le commissaire du gouvernement chargé de la gestion de la société. "Nous avons déjà démarré le chauffage industriel", et dès que la bonne température sera atteinte, "nous redémarrerons la production, jeudi ou vendredi", a déclaré ce mercredi György Bakondi, commissaire du gouvernement chargé de la gestion de la société.

Nationalisation

La Hongrie a nationalisé ce mardi la société MAL, qui était propriétaire de l'usine d'aluminium à l'origine propriétaire de l'usine de bauxite-aluminium à l'origine de l'inondation de boue rouge toxique. L'Etat hongrois peut ainsi prendre le contrôle de la société, dont le directeur général Zoltan Bakonyi a été placé ce lundi en garde à vue pour 72 heures, et mettre ses avoirs sous séquestre.

La société est soupçonnée d'avoir surchargé ses réservoirs, ce qu'elle a démenti. Même si les causes de l'accident n'ont pas encore été déterminées, elle a dès le lendemain de la catastrophe été considérée comme responsable par plusieurs membres du gouvernement. Zoltan Illes, le secrétaire d'Etat à l'Environnement, avait notamment indiqué que la société pourrait avoir à payer 73 millions d'euros d'amende.

L'épouse du Nobel de la paix Liu Xiaobo empêchée de rencontrer des diplomates norvégiens

L'épouse du Nobel de la paix Liu Xiaobo empêchée de rencontrer des diplomates norvégiens

La femme du Prix Nobel de la paix n'est pas autorisée à rencontrer des diplomates norvégiens © Sipa

L'épouse du Prix Nobel de la paix Liu Xiaobo a affirmé mercredi avoir été empêchée de rencontrer des diplomates norvégiens, venus à son domicile de Pékin où elle est assignée à résidence. "Hier, des diplomates norvégiens sont venus pour m'apporter leur soutien et on leur a barré le passage au portail principal", a déclaré Liu Xia dans un message transmis sur son compte Twitter. L'ambassade de Norvège à Pékin a confirmé que deux de ses diplomates avaient tenté en vain de rendre visite à Liu Xia. Ils étaient venus "vérifier comment elle allait", a dit Tone Helene Aarvik, porte-parole de l'ambassade, sans donner de précisions.

Mardi, la femme du Nobel avait annoncé être prête à se rendre en Norvège pour recevoir le prix prestigieux au nom de son mari, emprisonné dans le nord-est de la Chine. La police interdit aux journalistes d'approcher le domicile de Liu Xia à Pékin et restreint ses moyens de communiquer à l'extérieur. Après avoir eu son téléphone portable mis hors d'usage peu après l'attribution du prix à son mari, Liu Xia s'est fait prêter un autre téléphone, qu'elle n'a pu utiliser qu'un jour. "J'avais ce téléphone depuis seulement un jour et il a déjà été désactivé par les vandales", a-t-elle relaté sur Twitter.

La Chine ulcérée par la Norvège

Un des avocats de Liu Xiaobo a assuré mercredi ne pas être en mesure d'entrer en contact avec Liu Xia. "Nous ne pouvons pas la contacter actuellement. Nous ne faisons qu'attendre en espérant de trouver bientôt un moyen d'entrer en communication avec elle", a déclaré Shang Baojun. Cet avocat a annoncé mardi envisager de demander un nouveau procès pour son client, condamné le jour de Noël 2009 pour "subversion du pouvoir de l'État".

Liu Xiaobo, un vétéran de la dissidence chinoise, est devenu vendredi le premier citoyen chinois à se voir décerner le Nobel de la paix, ce qui a ulcéré Pékin qui a annulé des rencontres officielles et une manifestation culturelle avec la Norvège. Âgé de 54 ans, il purge une peine de 11 ans de prison après avoir été l'un des auteurs de la "Charte 08", un texte qui réclamait une Chine démocratique. Les États-Unis et l'Union européenne ont estimé que Liu Xia devrait avoir le droit de se déplacer librement.

Ahmadinejad accueilli en "héros" au Liban

Ahmadinejad accueilli en "héros" au Liban


Le président iranien y effectue une visite controversée ce mercredi et ce jeudi. Il devrait apparaître au côté du chef du Hezbollah lors d'un rassemblement populaire.

Le président iranien Mahmoud Ahmadinejad a reçu un accueil triomphal ce mercredi à Beyrouth, au premier jour de sa visite officielle controversée.

"Cet accueil populaire sera une gifle à tous ceux qui ont critiqué la visite, notamment les Etats-Unis et Israël, qui vivent dans un état de nervosité à cause de la venue d' Ahmadinejad", a déclaré la chaîne du Hezbollah, Al-Manar. Celle-ci faisait référence à la préoccupation de Washington et Israël qui s'affrontent avec l'Iran au sujet du développement de ses capacités nucléaires et de son rôle dans l'armement du Hezbollah.

Suite du programme

Le président iranien devrait apparaître ce mercredi soir au côté du chef du Hezbollah Hassan Nasrallah, lors d'un important rassemblement populaire organisé par le parti chiite, lequel est considéré comme une organisation terroriste par les Etats-Unis. Ce jeudi, au deuxième et dernier jour de sa visite, l'Iranien se rendra dans des villages du sud frontalier d'Israël, durement touchés en 2006 et reconstruits en grande partie grâce à l'aide iranienne.

Le président conservateur, qui effectue sa première visite au Liban depuis son élection en 2005, a affirmé que son pays soutenait "avec force la résistance du peuple libanais contre le régime sioniste" et que celle-ci avait changé "l'équilibre de force dans la région". En effet, l'Etat hébreu n'était pas parvenu à neutraliser le Hezbollah en 2006.

Il a en outre signé, conjointement avec son homologue libanais Michel Sleimane, plus d'une dizaine d'accords portant sur l'énergie, le commerce, le tourisme et les technologies. Ahmadinejad a aussi rencontré le Premier ministre soutenu par les Etats-Unis et l'Arabie saoudite, Saad Hariri, et le chef du Parlement Nabih Berr

«La mobilisation des lycéens illustre d'abord leur anxiété»


INTERVIEW - Spécialiste de la politisation des jeunes, Anne Muxel estime que l'entrée des lycéens dans la bataille des retraites traduit avant tout leur inquiétude quant à leur avenir.

Comment interpréter l'entrée des lycéens dans la mobilisation contre la réforme des retraites ?

Photo DR.

Il faut d'abord se demander si les jeunes scolarisés entrent dans la mobilisation contre la réforme des retraites, ou s'ils entrent dans un cycle - plus ancien - de mécontentement, et de contestation générale à l'égard du pouvoir. Alors qu'ils sont déjà très inquiets quant à leur entrée sur le marché du travail, ils constatent qu'ils devront aussi le quitter plus tard. Ils se retrouvent en quelque sorte pris en porte-à-faux entre ces deux difficultés majeures, et les retraites peuvent donc constituer ici un point d'inquiétude supplémentaire. Mais cette nouvelle mobilisation des lycéens illustre, plus généralement, leur anxiété pour leur avenir. Avec le Japon, nous sommes l'un des pays où les jeunes sont les plus pessimistes.

Le gouvernement a-t-il raison d'évoquer une manipulation des jeunes par les organisations de gauche ?

Cela me semble exagéré, dans la mesure où l'on voit sur le terrain que les actions lycéennes s'organisent la plupart du temps de manière très spontanée et assez peu organisée. On a toujours dit que les lycéens faisaient grève pour ne pas aller en cours, mais les enfants acquièrent très tôt des repères politiques, notamment dans leur environnement familial. Ils observent souvent les inquiétudes de leurs parents. Pour eux, les manifestations se sont banalisées au rang des outils de contestation, un peu au même titre que l'abstention électorale. Plutôt que de qualifier les jeunes manifestants d'irresponsables et de manipulés, il serait donc peut-être plus habile de dire que l'on entend leurs inquiétudes.

Les jeunes peuvent-ils constituer une clé dans le mouvement social contre la réforme des retraites ?

C'est peut-être, là aussi, exagéré. Mais il est certain que les jeunes constituent une force non-négligeable dans la rue, notamment par leur disponibilité et leur enthousiasme à protester. Il y a une autre certitude, c'est que les jeunes ont toujours fait plus peur que les salariés aux gouvernements, de droite comme de gauche. La majorité n'a donc pas vraiment intérêt à minimiser la mobilisation lycéenne qui est en train de naître.

Ryanair quittera Marseille début 2011

Ryanair quittera Marseille début 2011

La compagnie irlandaise à bas coûts a décidé de quitter sa seule base française le 11 janvier prochain en riposte à sa mise en examen pour travail dissimulé.

Le 20 mai, le directeur général de Ryanair, avait assuré que la compagnie à bas coûts irlandaise quitterait Marseille si elle devait faire l'objet de poursuites judiciaires liées aux soupçons de "travail dissimulé" pesant sur la situation des salariés opérant sur sa base aéroportuaire provençale. Lundi, le parquet d'Aix-en-Provence a décidé mettre l'entreprise en examen. Ce mercredi, son patron a donc mis sa menace à exécution.

Ryanair a annoncé officiellement la fermeture de son unique base française le 11 janvier prochain. Les 200 postes de pilotes et personnels navigants basés à Marseille mais rémunérés dans le cadre de contrats de droits irlandais seront transférés vers d'autres aéroports en Espagne, en Italie et en Lituanie, précise la compagnie à bas coûts dans un communiqué.

Outre le "travail dissimulé", la justice soupçonne Ryanair d'emploi illicite de personnel navigant, de prêt illicite de main-d'œuvre ainsi que d'entrave au fonctionnement du comité d'entreprise, aux fonctions de délégué du personnel ainsi qu'à l'exercice du droit syndical et au fonctionnement du Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).

Cette décision constitue une première victoire pour l'Unac (Union des navigants de l'aviation civile) et le SNPL (Syndicat national des pilotes de ligne), qui avec la Caisse des retraites des navigants avait porté plainte contre Ryanair. Ces derniers avaient mis en avant le fait que le personnel opérant depuis la base marseillaise de Ryanair n'était pas déclaré en France.

Facebook, grand absent de la charte sur le «droit à l'oubli»

Le texte, signé mercredi, engage les sites communautaires et les moteurs de recherche à mieux défendre la vie privée des internautes. Google a également fait faux bond.

La signature de la charte établissant le principe d'un «droit à l'oubli» sur les sites communautaires est intervenue mercredi sans le principal d'entre eux. Alors qu'un film consacré aux origines de Facebook sortait le même jour dans les salles françaises, le réseau social, qui affiche plus de 19 millions de membres en France, n'a pas souscrit aux engagements définis par le gouvernement pour mieux défendre la vie privée des internautes. «Ça traine un peu, mais ça va se faire», a promis Nathalie Kosciusko-Morizet. Google, du côté des moteurs de recherche, fait également partie des grands absents.

Dans le détail, le texte invite les sites communautaires à enseigner à leurs membres le respect de la vie privée, pour eux comme pour leurs amis. Dès la page d'accueil, des informations «conviviales» doivent les guider vers des paramètres de confidentialité «simple et ergonomiques», où visualiser ses données et supprimer son profil. Les signataires de la charte s'engagent aussi à ouvrir un guichet de réclamation, à prévenir lors du transfert de données à des partenaires et à mieux contrôler les comptes des mineurs. Une collaboration avec les moteurs de recherche est aussi prévue, pour supprimer des pages de leur index.

Une «impression trompeuse»

En l'absence de Facebook, cette charte, en discussions depuis un an, n'a pour l'instant séduit que quatre sites communautaires français : Copains d'avant, Skyrock, Trombi et Viadeo. Ils sont rejoints pour les moteurs de recherche par Microsoft et PagesJaunes, propriétaire de 123People. «Nous regrettons que de gros réseaux sociaux ne soient pas partie prenante. Il ne faudrait pas que la publicité qui soit faite autour de cette charte donne aux familles l'impression trompeuse qu'elles sont mieux protégées», a regretté Guillemette Leneveu, directrice générale de l'Union nationale des associations familiales.

Selon Nathalie Kosciusko-Morizet, Facebook serait tout de même déjà «très sensibilisé» à la plupart de ces principes et «assez en ligne» avec les éléments de la charte. Les polémiques successives touchant aux réglages de confidentialité l'ont en effet obligé à revoir ses positions en profondeur cette année. Mais le réseau social ne risque pas d'en faire beaucoup plus pour se caler exactement sur les positions françaises, qui n'ont pas la valeur d'une loi. «Ils mettent en place leurs propres normes pour le monde entier, et voient si ça peut entrer dans d'autres normes», a ainsi reconnu la secrétaire d'État au numérique.

Le risque de pénurie de carburant pointe pour la semaine prochaine

Les automobilistes pourraient commencer à manquer de carburant la semaine prochaine, si les grèves qui bloquent huit des douze raffineries françaises perduraient, mais les stations-service continuent pour l'heure à être alimentées par les dépôts pétroliers. La compagnie Total a annoncé, mercredi, qu'elle allait arrêter ses six raffineries françaises en raison du mouvement de grève contre la réforme des retraites. Faire tourner les raffineries "devient incompatible avec un fonctionnement normal pour des raisons de sécurité", selon un porte-parole. En plus du mouvement sur les retraites, la compagnie subit le contrecoup de la grève des terminaux pétroliers de Fos-Lavéra, qui a contraint sa raffinerie de La Mède à stopper ses activités par manque de brut dès dimanche. L'arrêt d'une raffinerie, processus très lourd, prend entre 48 heures et cinq jours en fonction de sa taille.

Au total, huit raffineries sur douze, représentant plus de 70 % des capacités du secteur, sont à l'arrêt ou en cours d'arrêt, selon l'Union française des industries pétrolières (Ufip). Et parmi celles qui tournent, certaines sont affectées par des grèves partielles et d'autres au ralenti par manque de brut. "Pour le consommateur, ça ne change rien, car les dépôts de distribution continuent à fonctionner", temporise cependant Jean-Louis Schilansky, président de l'Ufip, qui n'entrevoit des risques de pénurie qu'à compter du 20 octobre. La France compte 219 dépôts de produits pétroliers qui alimentent 12.500 stations-service. "La situation est préoccupante, mais elle reste sous contrôle", juge, lui aussi, Alexandre de Benoist, délégué général de l'Union des importateurs indépendants pétroliers (UIP), qui représente la grande distribution. "Il faut attendre la fin de la semaine pour évaluer la portée du mouvement actuel et savoir s'il se reconduit ou pas", ajoute Alexandre de Benoist.

"Les personnes âgées ont peur de manquer"

Certaines stations ont d'ores et déjà du mal à se réapprovisionner, reconnaît Alexandre de Benoist, mais cela est surtout dû aux achats de précaution effectués par des automobilistes inquiets. "Nos clients viennent en masse dans nos magasins, avec des hausses de vente de 50 % par rapport au même jour de l'année dernière, voire un doublement dans certains cas", indique-t-il. Cette ruée vers les pompes se remarque à Rennes, où plusieurs files de voitures d'une longueur inhabituelle ont été constatées par l'AFP lundi et mardi à l'entrée des stations-service. À Amiens, "les gens nous disent qu'ils ont peur de la pénurie. Hier, on a fait trois fois plus que d'habitude", a confié à l'AFP un responsable de station-service BP.

À Grenoble, quelques clients "remplissent des bidons de carburant. Surtout les personnes âgées. Elles ont fait la guerre, elles ont peur de manquer", témoigne Angelo Curatolo, gérant d'une station Agip. À Marseille, un porte-parole de Total confirme une demande de carburants deux fois supérieure à la normale et des embouteillages dans les dépôts de carburant. "Personne n'est capable de dire combien de temps on va tenir", car de nombreuses inconnues existent, souligne Alexandre de Benoist.

Une chose est certaine cependant : les prix vont augmenter, car le carburant est de plus en plus importé de l'étranger, note le responsable patronal. "Si la situation demeure ce qu'elle est, il faudra regarder très sérieusement le problème des stocks stratégiques de pétrole", prévient Jean-Louis Schilansky. La France dispose de réserves stratégiques représentant 98,5 jours de consommation de pétrole, composées à 60 % de produits raffinés et 40 % de brut. Le pays dispose donc de près de deux mois de réserves de carburants. "On a de quoi tenir sérieusement", note Jean-Louis Schilansky.