12 août, 2010

A Madagascar, l'accord politique ne lève pas les incertitudes


Le projet d'accord politique en vue d'une sortie de crise a été discuté dans la soirée du 11 août à Madagascar. Cet accord, très inclusif, devrait être signé vendredi. Un calendrier a été mis au point pour sortir de la crise. Il prévoit un référendum constitutionnel le 17 novembre et fixe au 4 mai 2011 l'élection présidentielle. Mais cet accord laisse encore planer beaucoup d'incertitudes.

Il était plus de 22h quand les représentants des 90 partis ont été appelés, un par un, pour parapher l’accord politique discuté depuis lundi 9 août. L’énoncé des acronymes, le plus souvent inconnus, mettait au grand jour l’une des particularités de cet accord. De micro-formations se sont engouffrées dans la brèche, et ont même obtenu d’être toutes représentées dans le futur congrès de transition. Certains y verront une nouvelle preuve de l’appétit des politiciens, toujours à la recherche d’un siège, fut-il de transition et très limité dans le temps. D’autres se féliciteront de la mise en place d’un processus inclusif à l’extrême.

Pourtant l’accord comprend encore de nombreuses incertitudes. Le Premier ministre et le gouvernement devront être choisis par Andry Rajoelina, dans des listes proposées par les partis politiques, mais aucune clé de répartition n‘a été établie. Libération des prisonniers politiques, amnistie et réouverture des médias censurés : la responsabilité des mesures d’apaisement est renvoyée à la conférence nationale, fin août.

S’il semble pour l’heure acquis que la signature officielle de l'accord aura bien lieu vendredi, son application est encore sujette à caution.

Niger : « La protection absolue contre les inondations n’est pas possible »


La crue exceptionnelle du fleuve Niger, due à une importante pluviométrie, a fait au moins 5500 sinistrés à Niamey, capitale de la République du Niger. Un phénomène d’une telle ampleur n’avait pas été observé depuis 1929. Explications scientifiques.

Docteur de Sciences Naturelles au Centre de Recherches Hydrologiques de Yaoundé au Cameroun, Daniel Sighomnou, consultant permanent pour l’Autorité du Bassin du Niger (ABN) (Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Guinée, Mali, Nigeria, Tchad et Niger), est spécialiste des problèmes hydrologiques dans cette région. Pour Afrik.com, le chercheur explique les causes de cette crue hors norme.

Afrik.com : Pour l’instant, seul le Niger semble touché. Y a-t-il d’autres inondations prévues dans les autres Etats membres de l’ABN ?
Daniel Sighomnou : Une partie importante des eaux responsables des inondations à Niamey vient des affluents du fleuve Niger qui prennent leur source au Burkina Faso, pays membre de l’ABN. Ces eaux résultent de précipitations exceptionnelles enregistrées dans la période du 21 au 31 juillet 2010 sur cette partie du bassin versant du Niger. Ces précipitations ont été, entre autres, à l’origine de débordement de certains petits barrages de retenue d’eau au Burkina, notamment le barrage de Ziga (d’une capacité de 200 millions de m3) qui a atteint un taux de remplissage de 137% le 26 juillet 2010 contribuant à accroitre l’ampleur des inondations. D’autres localités situées en aval de Niamey peuvent également être touchées par les mêmes eaux d’inondation, notamment celle de Malanville à la frontière Niger-Bénin et certaines régions du Nigeria. Toutefois, on peut logiquement penser que l’ampleur des inondations va aller décroissant d’amont en aval.

Afrik.com : Il est établi que la crue est due à d’importantes précipitations... Pouvait-on la prévoir ?
Daniel Sighomnou : De nos jours, on sait prévoir les précipitations avec une certaine précision. Des institutions comme l’ACMAD basée à Niamey ainsi que les services météorologiques des pays de la région élaborent régulièrement de telles prévisions. Mais il faut disposer d’outils performants qui permettent de faire la transformation entre la quantité de pluie tombée et le débit que cela engendrera pour prévoir les inondations avec précision sur un bassin versant de près de 2 millions de km² comme celui du Niger. L’Autorité du Bassin du Niger dispose en ce moment d’un réseau de 105 stations hydrométriques pour le suivi des écoulements du fleuve, mais certains équipements utilisés ne permettent pas de faire la transmission des données en temps réel afin de permettre de faire des prévisions de tels événements sur l’ensemble du bassin. Des efforts sont en train d’être faits pour remédier à la situation et un logiciel de prévision des écoulements sur une bonne partie du réseau est en cours de développement à l’ABN. Il permettra à terme de faire des simulations d’écoulement qui peuvent aider dans la prévision des inondations au moins sur certaines parties du bassin du Niger.

Afrik.com : Existe-t-il des digues le long du fleuve pour éviter ce genre de catastrophe ?
Daniel Sighomnou : Le fleuve Niger est endigué par endroit, mais il est bien connu que la protection absolue contre les inondations n’est techniquement pas possible et n’est par ailleurs pas toujours souhaitable du point de vue écologique. Des travaux d’approfondissement ou d’élargissement du chenal d’écoulement sont prévus sur certains biefs [1] du fleuve, notamment au Nigeria. La construction de trois barrages structurants (Fomi en Guinée, Taoussa au Mali et Kandadji au Niger) est également envisagée dans un très proche avenir. Ces barrages contribueront à terme, entre autres, à l’écrêtement des crues. Il est à noter également que le projet de lutte contre l’ensablement du fleuve Niger actuellement en cours à l’ABN, contribue à la régénération de la végétation sur certaines parties du bassin et par ricochet à la diminution du taux de ruissellement des eaux de pluie, diminuant de fait les risques d’inondation.

Afrik.com : On s’inquiétait de l’assèchement du fleuve Niger, les précipitations exceptionnelles qui s’abattent actuellement sur la région vont elles permettre de le réapprovisionner suffisamment en eau ?
Daniel Sighomnou : La baisse des débits du fleuve Niger est le résultat d’une baisse généralisée des précipitations dans la région depuis le début des années 1970. Si les précipitations revenaient à leur niveau des années 1950-1960, on devrait logiquement s’attendre à une inversion de la tendance actuelle. Une situation comparable (mais d’une durée plus courte) avait été connue dans la région durant les années 40, mais les écoulements avaient repris avec les abondantes précipitations des années 50 et 60.

Idriss Deby critique la présence militaire française au Tchad


Le millier de soldats de l'ex-puissance coloniale n'a pas encore commencé à faire ses valises, mais pour Idriss Déby, il n'est pas inutile de se présenter comme l'initiateur de cet éventuel départ et aussi de revêtir le costume du premier défenseur des intérêts de la patrie un jour de commémoration de l'indépendance.

Idriss Deby donne des gages à ses voisins

Le président tchadien, qui a grandement bénéficié de la présence militaire française lors des deux dernières attaques rebelles sur Ndjamena, semble bien avoir décidé de reprendre à son compte les demandes de ses pairs Abdoulaye Wade et Ismael Omar Guelleh. Les présidents sénégalais et djiboutien veulent que la France paye plus pour maintenir des soldats dans leurs pays. Idriss Déby souhaite donc qu'il en soit de même pour le Tchad.

Ces déclarations du président tchadien ont enfin un objectif diplomatique auprès de deux de ses voisins. Dans une période de détente avec le Soudan, il donne des gages à son ancien ennemi Omar el-Béchir. Il en donne également à Mouammar Khadafi qui n'a jamais supporté une présence militaire occidentale dans ce qu'il considère être son pré carré.

24 ans de relations militaires franco-tchadiennes

Depuis le 6 mars 1976, la France et le Tchad sont liés par un simple accord de coopération militaire, technique et logistique. Sur le papier, la France ne dispose pas de base permanente dans le pays, mais pourtant, depuis 24 ans, elle maintient près d’un millier de militaires sur place, dans le cadre du dispositif Epervier mis en place à la demande du Tchad en 1986, pour contrer une agression extérieure, une offensive de l’armée libyenne. En avril 1990, du temps de Hissène Habré, un protocole additionnel avait été signé concernant le stationnement des troupes françaises sur place. Accord complété en 1998.

En 2006, lorsqu’une nouvelle rébellion éclate, les français sont toujours là. Les mirages ouvrent le feu et stoppent la colonne du chef rebelle Mahamat Nour. En 2008, une fois de plus, la France utilise les moyens de l’opération Epervier pour fournir des renseignements à l’armée tchadienne et protéger l’aéroport de Ndjamena, cette fois-ci face à la coalition rebelle de Timane Erdimi et de Mahamat Nouri.

Mais cette même année au Cap, en Afrique du Sud, le ton change. Nicolas Sarkozy annonce que la France doit rénover sa relation de défense avec ses anciennes colonies. Concernant les opérations en Côte d’Ivoire et au Tchad, il précise, début 2010, que l’armée française n’a pas vocation à s’éterniser en Afrique. Mais le Tchad reste un carrefour et une position stratégique, à l’heure ou la France annonce qu’elle souhaite renforcer ses défenses au Sahel.Le président tchadien, Idriss Déby, a remis en cause la présence militaire française dans son pays, au cours d'une conférence tenue le 11 août. Il estime que l'opération Epervier ne joue plus son rôle et que la France doit verser une contrepartie financière à son pays si elle veut maintenir une présence militaire. La France s'est dite « prête à examiner » la demande du Tchad.

De sombres nuages planent-ils sur la relation franco-tchadienne ? A Ndjamena comme à Paris, on affirme que non. Alors comment comprendre les propos d'Idriss Déby ? Tout d'abord, le chef de l'Etat tchadien sait parfaitement que pour des raisons budgétaires le départ d'Epervier est très sérieusement envisagé par les autorités françaises.

Barbès au rythme du ramadan



Jeûner en pays laïque, le lot commun des musulmans de France. Dans le quartier de Barbès, à Paris, la foule abonde devant les boucheries et les boulangeries pendant le ramadan. Si certains pratiquants regrettent de ne pourvoir célébrer le mois sacré dans leurs pays d’origine, d’autres préfèrent le passer à Paris, où ils le vivent comme ils l’entendent.

« Même mon chien fait carême ! », s’exclame tout sourire Rachida, une femme d’origine marocaine. « Il n’a pas mangé ce matin, mais lui il boit », ajoute-elle. Pour cette gérante de hammam à Paris, le mois va être calme. « Les femmes ne boivent pas, elles évitent de venir ici, il fait trop chaud. On fonctionne au ralenti mais les femmes qui ne font pas ramadan viennent toujours, notamment quand elles ont leurs règles : impures, elles ne peuvent pas jeûner. » Devant les bouchers et boulangers par contre, la foule s’amoncelle jusque sur les trottoirs du quartier de Barbès à Paris. Les clients sont impatients, les vendeurs refusent de s’exprimer sur ce mois qui s’annonce fatiguant, d’autant plus qu’eux aussi font ramadan. « Je n’ai pas même un café dans le ventre », rappelle ce boulanger de la Goutte d’or, « et encore plein de gâteaux à faire » souffle-t-il devant la chaleur de l’huile bouillante où il va tremper ses pâtisseries orientales. La pile de sablés, de makrouds et autres zlabias est impressionnante mais « il n’y en a pas assez ».

Dans le quartier, aucun commerçant ne pourrait oublier que le ramadan vient de commencer. Il y a les magasins qui vont connaître la plus forte affluence de l’année, et les autres, à la clientèle clairsemée. Pour Djemila, vendeuse de cosmétiques d’origine algérienne, le mois va être on ne peut plus calme. « Maquillage et parfum sont indésirables, ce n’est pas ce mois-ci qu’elles vont en acheter… » De plus, fatiguées et attentives à leur porte-monnaie, les musulmanes pratiquantes « réduisent leurs courses à l’essentiel, la nourriture ».Faire le ramadan en France

S’abstenir de boire et de manger du « lever du soleil » à son « coucher » au cœur du mois d’août, représente 16 heures de privation. Et pourtant les trois quarts des 5 à 6 millions de musulmans de France jeûnent durant le mois sacré. Pour le mauritanien Amadou, en France depuis ses 15 ans, « il est important de se rappeler ses coutumes, le ramadan en fait partie ». Il aurait aimé rentrer au pays pour l’occasion, parce que « là-bas ce n’est pas pareil, tout le monde le fait » mais il n’a pas pu.

La marocaine Samira rappelle quant à elle que la foi est « individuelle. On peut faire ramadan où que l’on soit ». Et pour cette femme qui a adopté « le rythme occidental », la perspective de rentrer au pays « pour manger et dormir » l’ennuie d’avance. Aujourd’hui, elle s’est rendue à la Grande Mosquée de Paris, ce qui n’est pas dans ses habitudes un mercredi. « C’est un jour spécial », glisse cette jeune femme. Djamel va dans son sens « en France, chacun fait le ramadan comme il l’entend. En Algérie, tout le monde te regarde bizarrement si tu fais le moindre truc de travers ». C’est précisément cette attitude que dénonce le malien Mohamed « pendant le ramadan les gens vont à la mosquée, ils sont gentils, ils partagent, ils sont de bons musulmans ». La faim au ventre, il estime que « ça devrait toujours être ainsi. Il faudrait que ce soit toujours ramadan, en France et ailleurs ! »

Délocalisation informatique : l’Afrique, nouvel Eden


Une étude réalisée par AT Kearney montre que 7 pays africains figurent parmi les 50 meilleures destinations mondiales pour la délocalisation des services informatiques, également appelée offshoring. Égypte, Tunisie, Maroc et Sénégal sont parmi les destinations privilégiées par les entreprises occidentales.

Une population francophone ou anglophone bien formée et peu payée… Voilà de quoi intéresser les entreprises occidentales pour délocaliser leurs services informatiques. Une étude publiée en avril 2010 par un spécialiste américain des études stratégiques internationales, AT Kearney, montre qu’en 2009, 7 pays africains figurent parmi les 50 meilleures destinations mondiales pour cette pratique appelée offshoring. Le trio de tête avec l’ Inde, la Chine et la Malaisie, est asiatique, mais le continent gagne des places dans le classement. Ces délocalisations ont surtout pour but d’assurer des services comme la maintenance d’applications informatiques, les centres d’appel et la gestion.

Les données prises chaque année en compte par le cabinet AT Kearney pour établir ce classement sont la structure financière, l’environnement économique et la qualité de la main d’œuvre. Le cumul de ces critères donne un index qui correspond à l’attractivité des pays. L’Égypte, qui gagne 7 places, est 6ème en terme d’attractivité mondiale, et la Tunisie, qui en gagne 9, occupe cette année la 17ème place. Pour les pays anglophones, le Ghana et sa 15è place et l’Afrique du Sud qui occupe la 39è place attirent également les entreprises offshore.

Le Sénégal tire son épingle du jeu

Les nouveaux entrants, comme le Sénégal qui a fait un bond de 13 places, sont très offensifs. Le pays sub-saharien aux faibles coûts de personnel attire de plus en plus de centres d’appels. Malgré les deux heures de décalage horaire avec l’hexagone, ses téléopératrices calquent leurs journées sur celles des Français. Selon une étude de l’Apix, l’agence sénégalaise de promotion des investissements et grands travaux, le salaire moyen d’un téléacteur est de 308 euros par mois au Sénégal, contre 433 euros par mois en Tunisie et près de 458 euros au Maroc. Le Sénégal, avec un taux de chômage de 40% dispose également d’une main d’œuvre nettement plus abondante que ses concurrents maghrébins (15% en Tunisie et 20% au Maroc). Ces pays tirent leur épingle du jeu grâce au développement de l’offshoring en France qui privilégie les pays francophones et la proximité avec l’Europe.

Le Maroc, le Sénégal et la Tunisie seraient les pays les plus performants au monde en matière de centres d’appels. Du coup, les externalisations y sont nombreuses. En Tunisie, les centres d’appels comptent parmi les plus importants pôles d’emploi. Au Maroc, le nombre de télé-salariés a d’ailleurs été multiplié par 10 en 4 ans. Ainsi au « call center » de Dell à Casanearshore, la « cité de l’offshoring », 1 800 personnes travaillent dans des locaux flambant neufs. Depuis Casablanca, les employés marocains gèrent, pour le fabricant américain d’ordinateurs, la vente et le service après-vente de toute l’Europe du Sud.

Le marché de l’offshoring, qui représente 55 milliards de dollars selon le professeur Leslie Willcoks de la London School of Economics, représente une manne financière pour le continent. Mais, le revers de la médaille est sa contribution à l’accroissement des écarts de salaire entre pays du nord et pays du sud, qui mènent une course aux prix bas pour attirer les délocalisations.